Dante’s Dusty Roads – Chapitre 6

Putain de bordel de merde ! Voilà ! Voilà pourquoi il fallait rester à New-York ! Pourquoi ce trou paumé remplis de cul-terreux analphabètes ? Le retrait idyllique de l’artiste ? Le fantasme de l’écrivain ermite à la Tolstoï ? C’était un délire de nouveau riche oui !

Il fit vrombir la voiture en marche arrière et passa en marche avant en faisant crisser les pneus. Un bref coup d’œil au dîner. Peter était à l’entrée et le regardait partir. L’envie de lui faire un doigt d’honneur lui démangeait mais il ne le fit pas. Il avait de l’honneur, lui. Insulter de la merde n’en ferait pas de l’or.

Il allait rouler aussi loin que possible, ne s’arrêter que pour l’essence. Il mangerait un MacDonald, dans sa nouvelle voiture. Mieux valait ça que de retomber sur un tel connard, pensait-il.

L’envie d’allumer une cigarette lui taquinait l’esprit. Il avait arrêté depuis trois ans, trop cher, un luxe pour un écrivain sans le sou. Mais maintenant, il pouvait se le permettre. Juste une, pour décompresser un peu, faire un break. Il s’arrêta sur le parking d’un petit magasin. Par chance, pour l’écrivain, le parking et le magasin étaient vide. Dante entra et ressortit presque aussitôt du petit commerce, un paquet de Camels longues dans la main.

Il fuma dans sa voiture. Sa toute nouvelle voiture qui sentait bon le neuf.

Je ne suis même pas arrivé que je commence déjà à faire des conneries.

Un enchaînement de bruit éclata près son oreille gauche. Un type à la barbe hirsute lui faisait signe de baisser sa vitre. Ce qu’il fit sans vraiment réfléchir. Peut-être aurait-il mieux fallu ne rien faire.

Jaskiers

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Vive, lumière !

« – C’était ici ! Dit Jacquot au journaliste.

  • Donc ça s’est passé ici ?
  • Ouai…
  • C’est vous qui l’avez trouvé ?
  • Ouai…
  • Et… comment… qu’est-ce que vous avez ressentis ?
  • Bah… voyez… enfin… c’pas drôle. »

Le journaliste hocha légèrement la tête en signe d’acquiescement ou de sympathie.

Pourquoi je dois me coltiner ces reportages merde !

« -Enfin j’l’ai pas vu au début voyez.

  • Ah, comment ça ?
  • Bah, j’le cherchais partout l’Claude, j’ai cherché chez lui, dans l’étable à côté d’sa maison, dans la grange, j’ai passé au peigne fin ses deux champs, c’te vielle bâtisse j’y étais jamais aller.
  • Et… quand vous passiez du temps avec lui il ne vous en avez jamais parler ?
  • Oh si ! Y’m’disait que ça servait plus à rien depuis l’époque de son grand père d’ja c’te vielle bâtisse. Il voulait l’abattre d’ailleurs car ça prenait d’la place dans son champs.
  • D’accords. »

Le journaliste écrivait sur son calepin.

« -Comme s’qu’on vois à la télé !

  • Pardon ?
  • Z’ecrivez dans un calepin comme à la télé !
  • Ah oui, je suis de la vielle époque.
  • Z’etes jeune pourtant !
  • Oh oui, mais la technologie est bien utile, sauf quand elle vous lâche !
  • Ah ça moi j’ai pas c’probleme m’sieur, ah non ! L’ordinateur, internet machin chouette non non. Vous les jeunes vous avez grandis avec ça mais pas nous !
  • La technologie c’est pas mal, enfin quand ça fonctionne !
  • Ouai sûrement. Mais regardes moi, mon tracteur John Deere, il a une petite panne, paf je le répare en moins d’deux !
  • Moi, changer une roue c’est tout c’que je peux faire.
  • Chacun ses trucs !
  • Exactement. »

Le paysans regardait en l’air, en direction de la poutre, voyait-il un fantôme ?

« – Donc vous me disiez que vous ne l’aviez pas vu tout de suite ?

  • Nan, je connaissais pas la bâtisse, jamais entré d’dans.
  • Vous êtes entré, au rez-de-chaussée, personne ?
  • Bah ouai, personne, mais j’ai senti tout de suite que quelque chose n’allait pas, la poussière, quelqu’un était entré là dedans quoi.
  • Vous l’avez appelé ?
  • Ouai, j’ai fais ‘Claude’ mais rien, mais j’avais une impression bizarre vous voyez, j’devais monter à l’étage.
  • D’accord. Et une fois à l’étage ?
  • Bah y’a c’te porte juste après les escaliers là, par laquelle on vient de rentrer mais elle était fermée à clé.
  • Ah, et vous vous êtes dit qu’il devait être là dedans.
  • C’était le dernière endroit où j’pouvais vérifier.
  • Vous avez forcé la porte ?
  • Ouai, regardez, c’était un vieux loquet comme dans l’temps, pas très solide.
  • D’accord, vous avez peiné ?
  • Bah, j’me fais vieux mais agriculteur sa conserve. »

Un silence s’installa après le dernière parole de l’agriculteur.

« – Donc vous ouvrez, et là vous le voyez ?

  • Nan pas tout d’suite voyez y fait noir sans lumière. Donc moi bah je tâtonne sur le mur à gauche de la porte et coup de chance, si j’puis dire, un vieil interrupteur et ça s’allume.
  • Et là…
  • Ouai là… bah v’la mon Claude quoi.
  • Il était, pendu à cette poutre là ?
  • Ouai celle là juste derrière vous. »

L’agriculteur, les yeux humides et la voix légèrement sanglotante, ajouta :

« S’avez, ça m’étonne même pu… pas le premier ami qui se suicide… s’avez… agriculteur nous… bah on nourris les gens mais on a plus rien dans nos assiettes. »

Le journaliste referma son calepin.

J’écrirai mon article, il sera publié et rien ne changera.

Je dédie ce récit aux agriculteurs de l’Allier et de l’Auvergne, que j’ai eu la chance de côtoyer pendant plus de 10 ans.

« Les agriculteurs se suicident plus que le reste de la population. Selon les données les plus récentes de la sécurité sociale agricole (MSA), 529 suicides ont été dénombrés en 2016 parmi les 1,6 million d’assurés du régime agricole âgés d’au moins 15 ans. » Source : -> https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/11/23/suicides-chez-les-agriculteurs-le-gouvernement-lance-une-mobilisation-collective_6103324_3224.html

Jaskiers

Il y a des choses inexplicables dans les forêts de l’Allier

[Avertissement : ce texte fait presque 4 000 mots, lisez-le à votre rythme. Je n’ai pas trouvé judicieux de le diviser en chapitre]

Fiction

Il y a des choses inexplicables qui se déroulent aux milieux de nos forêts gamin, ne t’y mêles jamais ! – Avertissement d’un vieille homme rencontré un soir dans le bar de mon village.

C’était un de ces été chaud, sec, étouffant que nous avions dans notre petit village de l’Allier. Un été où aucun de mes amis ne partaient en vacance. Les vacances, pour nous, étaient un temps pour tous nous réunir, jouer au foot, vagabonder dans le village, faire la fête.

Je me rappelle de cette curieuse semaine, plus qu’aucune autre, de cet été là.

Après une partie de football toujours âprement disputée, nous avions décidé de réunir notre argent pour aller à la supérette du village, à l’autre bout de celle-ci. Nous avions à faire 20 minutes de marches. En plein caniard. Rien ne pouvait arrêter nos matchs de foot, on était jeunes et le petit stade multisport, que le maire nous avez gracieusement offert, était notre point de rendez-vous.

Le seul problème, c’était de pouvoir manger et se rafraîchir. Les magasins du bourg, à quelque pas du stade, avaient, pour la plupart, fermés. Écrasés par la concurrence de la supérette d’une grande marque, à l’entrée du village. Il nous fallait traverser notre patelin pour pouvoir nous acheter de l’eau et quelques gâteaux pour étancher notre soif, terrible, et notre faim, ou disons, pour être honnête, notre gourmandise.

Ce jour-là était comme tous les autres. Nous marchions à travers le bourg et les rues. La chaleur nous écrasait mais nous étions ensemble, le trajet semble toujours moins long quand nous sommes accompagnés d’amis.

Après avoir atteint notre destination, mettant les maigres contenus de nos porte-monnaies en commun, nous achetâmes de l’eau et des gâteaux apéro de sous-marques, nous étions ressorti fauchés comme les blés. Le magasin avait le monopole des biens et en profitait pour imposer des prix exorbitants.

Le meilleur moment, pour nous, aller arriver. Manger et boire ! Manger et boire en société !

Il nous fallait décider où nous devrions aller pour déguster notre pique-nique. C’était toujours une décision sujette à débat. Manger sur le parking ? Non ça craint ! Retourner au stade ? L’eau serait déjà chaude à notre arrivée.

Et si nous allions dans ce champs, de l’autre côté de la rue ? Cette idée nous plut. Ce champs était juste de l’autre côté de la rue, il était immense.

Il devait bien faire 300 mètres carrés, il est difficile de juger de la dimension d’un champ à vu d’œil. Il n’y a rien, pas un repère, pour pouvoir estimer la dimension d’un champ.

Au nord, le champ était fermé naturellement par une forêt qui menait jusqu’à l’Allier (mais ça, nous ne le savions pas encore). Au sud-est, une petit mare, ou un point d’eau, entourée de roseaux et à moitié couvert part un vieil arbre desséché, noueux et qui semblait agoniser malgré l’eau à ses racines. Au sud, se trouvait une toute petite maison, disons une cabane qui ne dit pas son nom, pas plus grande qu’une chambre d’appartement où une cuisine, installé au bord du champ, un côté sur la chaussée, comme toute les maisons, et un côté donnant sur l’immense champ. Curieuse chose, que cette maison. Une porte donnant sur la rue, une autre sur le champ. Elle avait l’air d’une maison à une seule pièce et non pas d’une grange ou à tout autre bâtiment de paysans. Deux fenêtre seulement, là aussi, une donnant sur la rue, l’autre sur le champs. Les volets en bois étaient fermés, un panneau publicitaire indiquant le supermarché était accroché à l’une de ses façades.

Il nous fallait donc trouver un passage dans le vieux grillage qui clôturait le tout. Nous étions jeunes, un grillage n’allait pas nous empêcher d’entrer dans ce champs et de nous trouver une place à l’ombre près du point d’eau, sous l’arbre tordu et asséché qui semblait le gardien de cette petite mare.

Nous avions décidé de rentrer par le côté est, ou se trouvait le point d’eau. Nous décidâmes de tasser le grillage. Le but n’était pas de le défoncer, de causer du tort. Nous devions juste le plier assez pour pouvoir l’enjamber. Ce que nous fîmes. Évidemment, cela a endommagé le grillage, encore aujourd’hui, si un jour vous passer par là, vous verrez une partie de ce grillagée affaissée. Nous avons marqué notre passage, notre œuvre. Mais je vous déconseille de suivre nos pas, d’entrer dans ce champs. Car ce que nous y avons vus, vécus, ressentis, nous a laissé perplexe et tellement apeuré que nous n’osâmes plus en parler depuis. Même après plus d’une décennie. Chaque questions que nous nous posâmes après ces événements n’amenaient à aucunes réponses, pire, elles amenaient plus de questions.

Voici notre expérience, véridique, qui nous a marquée, et qui nous hante encore. Si vous vous y risquez, j’espère pour vous que ce que nous avons observé n’est plus.

Nous enjambâmes donc le grillage, ruisselant de sueurs. Le point d’eau était à une vingtaines de mètres, et ces derniers mètres semblaient interminables tant notre soif nous taraudait. Le champ n’était bien sûr pas un gazon de stade de football. Nous manquions nous briser les chevilles à chaque pas, nous fatiguant encore plus. Nous étions silencieux, excepté nos plaintes : « putain j’ai soif ».

Nous arrivâmes au point d’eau pour réaliser que la terre et l’herbe autour était humide. Une découverte surprenante, mais somme toute logique. La nature a ses règles. En pleine canicule, elle peut conserver une petite mare grâce aux ombres des roseaux et des feuilles d’un arbre. Croyez le ou non, mais j’avais l’impression de sentir un brise fraîche, comme lorsque vous êtes au bord d’un cours d’eau important ou sur une plage. Certes pas si puissantes qu’une brise marine, mais aujourd’hui encore quand j’ai l’opportunité de marcher sur une plage, ce vent frais de la mer me rappelle ce petit trou d’eau au milieu d’un champ de l’Allier. La nature est vivante.

Nous trouvâmes une toute petite place sous l’arbre dont l’écorce était noire et sèche. Certains d’entre nous avaient plus de chance que d’autres question ombre. Nous ne patientâmes point pour boire toute notre eau, mais la faim ne nous taraudait pas, ou plus, car nous avions bu tellement d’eau en si peu de temps que boire nous avait désaltéré et rempli l’estomac, nous n’avions plus de place pour les quelques gâteaux apéritifs, qui d’ailleurs donne soif tellement ils étaient salés.

Bien que certains avaient vécus dans notre village depuis tout petits, aucun de nous n’avait jamais songé explorer cet endroit. Nous regardâmes la petite maison qui était en face de nous, et nous nous posâmes des questions sur sa présence. Comme je l’ai écrit plus haut, c’était une maison, pas une cabane, quelqu’un aurait pu habiter ici, bien qu’elle ne fut pas plus grande qu’une chambre d’appartement lambdas. Nous imaginâmes l’intérieur, qu’est ce qu’il pouvait bien y avoir là-dedans ? Jamais personne n’avait vu ses volets ouverts ou quelqu’un y mettre les pieds et pourtant, elle se situait sur le trottoir juste en face de la supérette du village. Nous pensâmes que le toit était peut-être habitable, encore une fois, c’était une maison miniature avec pignon ! Un petite mansarde, ou en tous cas une fenêtre de mansarde, était présente sur la face du toit donnant sur le champ. C’était la première fois que nous y faisions attention. Un petit luxe car les maisons habituelles du village n’avaient pas toutes, loin de là, des mansardes.

On s’imaginait qu’un jour, on achèterait cette maisonnette pour en faire notre repère, une sorte de club secret. On travaillerait dur pour construire une piscine, en gardant bien sur ce point d’eau magique que nous appelions « Oasis ». Des projets de jeunesses fous, comme tout projets de jeunesses. Mais à la différence des projets d’adultes, ils nous étaient autorisé de rêver.

Évidemment, étant une bande d’adolescents, des blagues scabreuses sortaient de nos bouches de temps à autres. L’un de nous voulez y faire une garçonnière, il pourrait y amener ses nombreuses maîtresses quand il serait marié. C’était parfois cru, mais on rigolait, nous n’avions que ça à faire après tout, rire. Pas d’impôts à payer, pas de patrons, pas de responsabilités.

Un flash de lumière provenant de la mansarde me surprit. Quand j’avertissais mes amis, j’eu le droit à des regards moqueurs « T’es sur que y’avait que de l’eau dans les bouteilles ?! ». Je répondis qu’on avait tous bu dans les mêmes bouteilles, je leur demandais de regarder la toute petite fenêtre du toit, et d’attendre.

Flash ! Un autre ! Tous furent surpris. J’avais l’habitude de sortir des trucs bizarres mais là, c’était vrai !

« – C’est un flash de photo ?!

  • Ça peut-être que ça !
  • C’est peut-être le reflet du soleil sur les voitures quand elles passent…
  • Ou bien, c’est un code en morse nous demandant de l’aide ! »

Quand j’eu dis cela, ils me regardèrent, tétanisés.

« – T’as toujours des idées bizarres !

  • C’est moi qu’est bizarre ? Quelqu’un joue avec une lampe torche plutôt puissante ou un flash dans une maisonnette abandonnée ! Tout les scénarios sont possibles ! »

Je vous avais dis que nous étions des adolescent à l’humour scabreuse non ? Vous ne serez pas surpris d’apprendre que l’un de mes amis baissa son pantalon pour offrir à la personne à l’intérieur de la maison une vision de son anus. Et j’avouerai que j’ai bien rigolé, on a tous bien rigolé.

Le flash se déclencha encore et encore, sans rythme spécifique. Ils étaient… erratiques.

«  – Tu connais le morse ?

  • Non pas du tout. »

Mon idée avait faite son chemin dans leurs têtes. J’avais dis cela sans vraiment être sérieux, mais il fallait avouer que quelqu’un essayait de communiquer avec nous.

Mon ami « sans culotte » remit son pantalon et décida de poser comme un mannequin, nous rigolâmes, décidâmes de le rejoindre en assénant des « T’aimes ça hein pervers ! » à la source des flash. Nous balançâmes évidemment quelques insultes et doigts d’honneurs.

Les flash ne s’arrêtaient pas.

« – Imaginez, ça se trouve c’est une planque de flic !

  • Hein ?
  • Bah ouai, à côté de la route, à la sortie du village, à l’endroit où il y a le plus de trafic ! »

J’avais encore lancé une de mes idées bizarres. On me regardait, stupéfaits

« – Ça se trouve ils sont en planques, ils attendent un deal de drogue et ils pensent que c’est nous les truands ! »

J’adorai voir sur leurs visages le doute s’installer. Je ne croyais pas un mot de ce que je disais, j’étais aussi confus qu’eux. Et puis ça pouvait tenir la route « j’ai vu dans 90 minutes enquête, le truc de reportage télé, les flics ils font ça. » J’enfonçais le clou. « Si ça se trouve c’est un appareil qui se déclenche automatiquement quand quelqu’un rentre dans le champ, un truc de sécurité. »

Là, je me faisais peur moi même. Pendant tout ce temps, le flash continuait à émettre sa lumière, par intermittence, irrégulière. Imaginez la puissance que cette chose devait produire ! Nous étions en plein été, aucun nuage, grand soleil, et ce flash de lumière était assez puissant pour laisser ces petites marques sur la rétine, ceux que nous avons quand nous regardons une lumière ou le soleil et clignons des yeux.

Le plus courageux d’entre nous, le Sans-Culotte, décida de s’approcher. Certains protestèrent, d’autres curieux de voir ce qu’il pouvait se produire l’encourageaient. Je faisais partie de ces derniers, trop curieux d’avoir le fin mot de l’histoire.

La maison était à une dizaine de mètres, notre ami s’y dirigeait doucement, comme si il était a l’affût, posant parfois le pied dans un trou, le faisant tituber comme un ivrogne. Nous rigolâmes pendant que les autres lui disaient de revenir. Il était trop loin pour faire demi-tour, c’est ce que je lui disais pour le motiver.

Enfin il arriva à la maison. Le flash venant de la fenêtre du toit, il était impossible pour lui de voir quoi que ce soit, mais il pouvait entendre. Et secrètement, espérai-je, peut-être que quelqu’un sortirait et nous expliquerait qu’elle était ce délire.

Nous regardâmes donc notre camarade qui avait posé son oreille contre le mur de la maison, nous guettions ses expressions, très curieux de voir ce qu’il pouvait bien entendre.

« – T’entends un truc ?

  • Y’a comme un bourdonnement !
  • C’est la zone 51 version auvergnate ! On a filmé ‘La soupe aux choux’ pas loin d’ici ça a dû les attirer.
  • Y’a vraiment juste un bourdonnement.
  • Pas de voix ?
  • Non je crois… pas.
  • Des trucs genre… des bruit de pas ?
  • Peut-être mais le bourdonnement est impressionnant, le mur vibre ! »

Conscient que Sans-Culotte était probablement en train de se foutre de nous, j’avançais dans sa direction, suivit d’un autre ami. Les camarades restaient derrières et nous suppliaient de faire attention, et nous avertirent qu’eux allaient commencer à repartir par là où nous étions arrivés.

À mi-chemin, je ne sais pourquoi, mais je m’arrêta, mon ami aussi. Et nous entendîmes ce cri qui, aujourd’hui encore, me fait frémir ; « Vous êtes trop jeunes, trop jeune pour crever ! »

Inutile de vous dire que nous prîmes nos jambes à nos cous. Nous courions comme des dératés vers le grillage affaissé. Oublié la fatigue, la chaleur, nos provisions. Pas très écolo, mais c’était la dernière chose à laquelle nous pensions, la première était de nous échapper du champ.

Sans-Culotte nous rejoignit au grillage où nous passions chacun notre tour, dans la panique, certains essayèrent d’enjamber ce grillage de leurs propres moyens mais les bouts de ferrailles en pointe à son sommet rendaient l’opération presque impossible. Un y réussis pourtant en s’écorchant les mains et en trouant ses vêtements. De mon côté, j’étais pétrifié, mon cerveau reptilien fixait mes yeux sur la maison. J’attendais mon tour pour passer en n’oubliant pas de lâcher quelques imprécations peu raffinées aux autres qui enjambaient tant bien que mal la partie du grillage que nous avions abîmées. Aucun mouvement dans la maisonnette, à part ce flash qui crépitait.

Je franchissais finalement le grillage en dernier. Nous nous regroupâmes, comme du bétail apeuré, les yeux fixés sur notre probable bourreau, ou plutôt son repère.

D’où nous étions, à l’est, nous n’avions plus de vue sur la fenêtre du toit d’où émanait le flash.

Nous pensions à la vengeance. Nous insultâmes copieusement l’habitant de cette curieuse maison. Tous, nous étions d’accord sur le fait que la voix était celle d’un homme, âgé. Sans-Culotte jurait avoir entendu un rire de femme après l’avertissement du vieillard. Il nous en fallait pas plus pour lâcher de créatives insultes grivoises aux mystérieux hôtes.

Après 10 minutes d’insultes diverses et variés, nous étions fatigués mais notre colère était loin d’être apaisée.

D’un commun accord, un projet germa dans nos petites têtes, un projet accepté à l’unanimité : revenir cette nuit avec des œufs, des crottes de chiens (qui étaient légions dans nos rues à cette époque) et quelques cailloux pour les balancer sur la maison. C’était notre tarif, le prix à payer pour nous avoir fichus la trouille et, surtout, pour nous avoir fais ravaler notre fierté.

Nous rentrâmes chacun chez nous, pas avant d’avoir prévu notre opération : rendez-vous à 23h30 devant chez Sans-Culotte avec chacun quelque chose de substantiel à jeter sur la maison. Nous arriverions devant cette dernière vers 23 h 50. La nuit serait tombée et nous tomberions rapidement sur la maison avec nos projectiles.

Nous passâmes notre soirée à nous envoyer des textos. Chacun demandant l’avis des autres sur le choix des projectiles, d’autres demandant de l’aide pour berner leurs parents qui ne voulaient pas que leurs adolescents sortent si tard. Après tout, nous n’étions que des gamins. Et il s’avéra que les adultes avaient eut raison d’essayer d’interdire à leurs ouailles une sortie champêtre tardive.

L’excitation fit traîner en longueur cette soirée, nous étions tellement pressés d’en découdre ! Mais il nous fallait attendre la nuit. Ce que nous fîmes.

Nous nous rejoignîmes comme prévu devant la maison de Sans-Culotte avec nos sac à dos d’écoles sur les épaules, emplis d’objets et de matière pas très ragoûtantes. Nous craignîmes la police qui rôdait parfois dans le village. Aussi, nous prîmes des routes moins fréquentées.

Plus nous nous approchions de la maison, plus l’angoisse de l’excitation montée. Elle se tourna en terreur à la vue de la scène qui se déroulait sous nos yeux.

Nous nous arrêtâmes net. Des gens étaient réunis autour de la mare. La lune était pleine, heureusement car sans elle, nous serions tombés au beau milieu d’une cérémonie qui n’avait rien d’une fête de village.

Les personnes étaient déguisée, tous affublés d’une sorte de robe noir et encapuchonnés.

« – C’est genre le Ku Kux Klan version française ! Dis-je.

  • C’est une putain de secte ! »

Nous entendions parler et rire. Un d’eux alluma un flambeau, nous vîmes leurs ombres immenses danser sur l’herbe. Les capuches étaient rabattus sur leurs visages ne laissant que la bouche de visible. Puis, nous vîmes une lueur arrivée de la forêt au nord. Nous comprîmes qu’un autre contingent de capuchonnés arrivait. Les deux groupes se firent des signes et s’hélèrent à grand cris, certains imitaient le cri du loup, d’autre sortaient des sortes de borborigmes tonitruants, graves et tout cela raisonnaient dans l’immensité du champ. Certains se mirent à danser, leurs ombres se mélangeaient avec leurs corps, aucun rythme, aucune chorégraphie, ils dansaient comme des pantins désarticulés.

Nous étions à court de mot. Les « putains » et « c’est quoi se bordel » avaient tous fusé de nos bouches.

Le groupe venant de la forêt se fonda dans la masse déjà présente de « païens ». Le silence revint d’un coup, ils ne bougeaient plus.

« – Donc du coup, on leur balance ce qu’on a à ces types au lieu de la maison ?

  • Je pensais même plus à ça !
  • On va peut-être éviter ?
  • Ouai, j’ai pas envie de finir en sacrifice humain à je ne sais quel démon !
  • On les emmerdes, donnez moi des œufs vous aller voir.
  • Mec je suis pas sûr que ce soit vraiment un truc à faire.
  • Tu veux rester là à les observer toute la nuit ?
  • C’est étrange mais oui, je me demande ce qu’ils foutent là, accoutré comme des glands.
  • Si ça se trouve c’est l’amical des chasseurs du village !
  • Ouai imagine si ils sortent les fusils !
  • Bah on court.
  • Fais chier, tu veux vraiment faire ça ? »

À ces mots, Sans-Culotte posa et ouvrit son sac et en sortit un carton de boîte d’œuf, il l’ouvrit, prit un œuf, lui posa un délicat baisé et l’envoya en direction des sectaires.

Nous étions sur le qui-vive, nous voulions voir leurs réactions avant de partir tout de go. Mais nous vîmes dans la lueur de la pleine lune l’œuf s’écraser bien loin du groupe de joyeux lurons déguisés. Et il ne fit aucun bruit. C’était comme si rien n’avait été envoyé.

« – Putain mais t’es vraiment une chèvre !

  • Mec t’es une vraie charrette ! »

Sans-Culotte reprit un œuf et se rapprocha du grillage du champ. Nous ne dîmes rien, trop content que quelqu’un d’autre que nous s’attarde si près d’eux. Nous le vîmes balancer son œuf. La forme sombre de l’œuf alla finir sa course vers l’un d’eux. À cet instant, nous étions aussi tendu que la corde d’un arc. Nos joyeux sectaires tournèrent leurs regards vers l’œuf tombé aux pieds de l’un d’eux et ils tournèrent leurs têtes, de concert, vers nous. L’un éteignît la torche et nous entendîmes : « Vous encore ! Vous, vous êtes trop jeune pour crever ! »

Nous allions partir en courant quand nous entendîmes Sans-Culotte, décidément le plus téméraire d’entre-nous leur répondre : « Et ta mémé ? Elle sait que tu fais des méchouis en plein été avec tes copains déguisés en pèquenots ? »

La flamme de leur brasero étant éteinte, nous ne vîmes que des formes sombres se précipiter dans la direction de Sans-Culotte et la notre. Sans culotte se mit à cavaler et nous aussi. Nos sac nous fouettaient le dos, nous allâmes dans des directions différentes, nous forçant à nous arrêter pour vite nous concerter et attendre Sans-Culotte. Tous pour un et un pour tous, ou presque.

Nous vîmes arriver le téméraire qui s’époumoner à nous dire : « Mais courrez putain ils sont derrière ! »

Nous crûmes à une blague, comment était-ce possible que ces gens puissent nous suivre ? Nous étions jeunes, sportifs et eux étaient sûrement vieux et portaient tous une robe. Mais nous recommençâmes à courir quand nous vîmes surgir de l’obscurité deux de ces personnes. Je me rappelle encore cette vision terrible de ces deux silhouettes encapuchonnées sortir des ombres, comme si les ténèbres avaient éjecté deux de ses entités à notre poursuite.

Nous courûmes.

Enfin, quand je m’arrêtais pour reprendre mon souffle, je réalisais à mon grand désarroi que j’étais seul ! Dans notre panique, nous nous étions séparés. Restait à savoir lesquels d’entre nous nos deux poursuivant avaient choisit de pister. Heureusement, nous avions nos téléphones portables (comment faisaient nos aînées sans ce gadget ?!) et je téléphonais à Sans-Culotte, il décrocha : « – Mec je sais pas où t’es partis mais cours parce qu’ils t’ont suivie ! »

Je ne raccroché pas mais courus dans une ruelles puis dans une autres. Quand je repris le téléphone, Sans-Culotte m’informât de le rejoindre avec tous les autres au stade multisport. C’était, si vous vous en rappelez, à une sacrée trotte.

J’entendis des bruits de pas précipités et lourds et deux personnes courir comme des dératés dans ma direction. Je détalais rapidement, ils criaient derrière moi mais le bruit de mon souffle, de mes pieds martelant le sol et les frottements de mon sac à dos m’empêchaient d’entendre leurs paroles.

Je courais bien à pleine vitesse depuis 2 minutes quand je me hasarda à regarder derrière moi, les deux personnes étaient là, et je l’ai reconnus, c’était deux des mes amis. Quand ils me rejoignirent, ils me dirent que c’étaient eux qui me hurlaient, tantôt, de m’arrêter.

Content d’avoir à nouveau de la compagnie, nous partîmes en direction du terrain multisport où tous nous attendaient.

Après maints débats, maintes théories, fatigués, nous décidâmes de rentrer chez nous, en prenant des chemins de traverses que seuls les habitants de longue date du hameau pouvaient connaître. Ce qui ne nous empêcha pas de jeter des regards derrière nous toute les 10 secondes.

Depuis ce jour, nous n’avons pas plus de réponses à nos questions, jamais nous n’avons retenté l’expérience. Nous avons gardé cette histoire avec nous car si nous en parlions en publique, ces messieurs (et dames ?) en robes noires auraient sût qui les avaient dérangés durant leur mystérieux pique-nique de pleine lune.

Des années plus tard, toujours avec ce même groupe d’amis, nous étions au bar du village, qui avait une fois encore changé de propriétaire, 3 fois en moins de 7 ans. Nous faisions connaissance avec le nouveau tenancier (par là comprendre : essayer de tâter le terrain et voir si il était possible d’avoir des verres gratuits, il s’avérait que pour ce nouveau propriétaire, un verre d’eau du robinet était vendu 50 centimes, donc non, pas moyen d’avoir des verres à l’œil. Petit conseil si vous décidez un jour de reprendre un bar en campagne, offrez des verres, ne soyez pas radin, conseil d’ami !).

Nous engageâmes la conversation avec un vieux monsieur, il nous parlait des années « Yé-yé » et d’autres histoires qui, si vous avez un âge avancé, passionnent les jeunes générations. En tous cas, moi j’étais intéressé. Je ne peux vous dire comment la discutions sur les forêts de l’Allier arriva sur le tapis, il faut dire que j’étais saoul, comme tous ceux qui étaient au bistrot mais toujours est-il que ce monsieur au cheveux grisonnant, petit, avec un pull en laine sale et plein de copeaux de bois nous donna un avertissement : « Il y a des choses dans les forêts gamins, je parle pas d’extraterrestre hein, quoique… mais des Hommes. Si un jour vous croisez des types louches ou qui vous donne l’impression que quelque chose cloche avec eux, ne vous mêlez pas à eux. Ils font… Il y a des choses inexplicables qui se déroulent aux milieux de nos forêts gamin, ne t’y mêles jamais ! »

J’oserais vous dire que dans son regards, cet avertissement n’était pas vraiment amical, un sourire malicieux, s’était affiché le temps d’une seconde sur son visage ridé et fatigué.

Je me permets de transmettre son message.

Jaskiers

On voulait refaire le monde.

Ceci est une FICTION

On descendait du train, revenant du lycée. C’était un vendredi, nos ami(e)s du week-end qui étaient en internat revenaient avec nous.

Ces jours étaient agréables pour nous les demi-pensionnaires car on se retrouvait tous dans le train avec nos ami(e)s pensionnaires qui nous ramènerait chez nous pour un week-end bien mérité. C’était la pagaille dans les wagons !

Cette fois on avait même prévus quelque chose de très spécial. Deux de mes amis et moi avions prévu une petite fin d’après midi rien qu’entre nous..

La fatigue mêlée à l’excitation du week-end faisait qu’on avait encore assez d’énergie pour, une fois arrivés, traîner encore un peu ensemble dans le village.

Nous étions donc arrivé à notre gare, on était descendu. Après des au revoir plutôt mouvementés agrémentés de petites insultes, quelques coups sans méchancetés et des vœux de bon week-end échangés, mon pote demi pensionnaire et camarade de train et un autre, pote pensionnaire celui-là, décidâmes de mener à bien notre petit projet d’aventure.

Nous avons traversé la moitié du village, trouvé un petit chemin en terre longeant un champ immense. On était jamais aller ici, autant les uns que les autres. Moi j’avais un peu l’impression de partir en exploration pendant que mes potes, eux, avaient l’air plus excités par ce que nous allions faire que notre petite balade champêtre.

Voyez-vous, pour faire ce genre de chose quand on habite un village, mieux vaut rester discret. La rumeur ce propage très vite, avec bien sûr, les sacro-saintes exagérations et inventions que chacun agrémente à sa sauce au fil de son parcours. Il n’y pas personne à blâmer car nous le faisons tous, d’une manière ou d’une autre. C’est un moyen de ce fondre dans la vie du village, de faire partie de la communauté. Et Dieu sait que c’est difficile de faire partie d’un village quand vous n’y êtes pas né. C’est un peu comme-ci les gens vous prenez pour un étranger. Ce n’est pas que vous n’êtes pas le bienvenue, c’est juste que vous ne ferez jamais vraiment partie de la communauté, même si vous y mettez du cœur. Pire, si vous mettez trop de cœur à l’ouvrage, vous serrez encore plus louche à leurs yeux. En tous cas, c’était mon ressenti à l’époque. Rentrer dans un microcosme de gens qui se connaissaient depuis l’enfance n’est pas chose aisé. Même intégré, j’avais cette impression de vivre dans un pays à l’intérieur même du village.

Parfois c’était frustrant. Mais vous ne pouvez rien y changer. Il faut avoir les nerfs bien accrochés et être prêt à mettre votre ego de côté.

Nous étions arrivé à un renfoncement sur la gauche du chemin terreux. Des pierres y étaient disposées comme si un rituel druidique c’était déroulé ici la veille. Un coin mystérieux cerné par de vieux arbres. À droite, un immense champ, des vaches au loin, le soleil qui se couchait lentement. On était, le pensait-on du moins, tranquille.

Mon pote d’habitude, le demi pensionnaire et camarade de train sorti le nécessaire pour se rouler un joint de marijuana.

On profita que je sois le seul fumeur de notre trio pour rouler la cigarette magique.

Au final c’est plutôt simple, il suffit de bien tasser votre tabac en le roulant dans la feuille, de manière à ce que le tabac (et la substance que vous y mettez) prenne une forme cylindrique puis d’enrouler la feuille autour du cylindre de tabac mélangé. Bien sûr, vous aurez placer avant le « toncar », le carton en verlan, un filtre. Juste un petit bout de carton, ou un ersatz, la plupart du temps nous utilisions le cartons qui contenait les feuilles à rouler. Il vous faut des grandes feuilles pour mener à bien votre petit projet. Le toncar donc, est un petit « truc » que vous transformer en tube. Il sert aussi d’indicateur pour la quantité de tabac et autres ingrédients à insérer. Mieux vaut que le cylindre de substance ne soit pas plus gros que le toncar car cela signifie que vous avez trop mis ou mal égalé votre cylindre, et pas assez gros pourrait être encore pire, le joint pourrait se briser et vous aurez tout perdu. Trouvez le juste milieu. Et si vous bravez cette règle, votre cigarette ou votre joint risque d’être inégal et cela va être un sacré carnage et un triste gâchis une fois allumé.

Rouler est un art.

Donc qui roule craque (allume le joint), qui fournit suit. C’est l’adage à respecter pour éviter les prises de têtes. Vous n’avez vraiment pas besoin de ça avant de fumer votre joint avec les copains et copines.

Bref. J’ai fumer ma latte, honnêtement, le shit ne m’a jamais vraiment plus. L’euphorie est passable au mieux, mais là c’était de la marijuana, de l’herbe, que j’ai distillé, saupoudré le long du joint. Pas besoin de faire fondre le bout de shit et de se bruler le bout des doigts, juste de prendre l’herbe, l’effritée et la repartir avec égalité sur tous le joint. Souvent il arrive qu’une partie du joint soit plus « chargé » que l’autre, mais en aucun cas vous n’avez le droit de vous réserver cette partie, le mieux quand on fume de l’herbe en société, c’est le partage. Comme la vinasse chez les vieux et vielles du villages.

Nous étions donc là, au milieu de presque nul part, un champ avec un couché de soleil, une température douce, et des discussions qui mènent partout et nul part. Des rires, on avait soif, on avait faim. Prévoyez de prendre un petit truc à boire, de l’eau ou un soda, pas d’alcool, ne tentez pas trop le diable, et des gâteaux à manger. Le mieux sont les gâteaux apéros et chips car tous le monde peut se servir à l’envie. Prévoyez une bonne quantité de bouffe quand même.

Mais nous, nous n’avions que notre bouffe du self de midi dans l’estomac… et la fatigue des allées – retours entre la ville et le lycée, celle des cours, des profs, des sacs trop lourd à se coltiner toute la journée, les devoirs qu’on aura à faire le week-end, et recommencer ça jusqu’aux prochaines vacances.

On avait 15 – 16 ans et on pensait déjà que nous méritions bien un petit joint. De décompresser.

Je me rappel m’être adossé à un arbre, de sourire béatement et tiré sur le joint en le faisant passer.

Petit moment suspendu. On refaisait notre monde, en rigolant à chaques paroles car tout est drôle sans raison avec le cannabis.

Le toncar devient humide à force de le passer, on appelle ça « mouillé ». La plupart du temps, c’est quand un des fumeurs aux lèvres trop humides à tiré une latte. Souvent on lui reproche. Il y a aussi « la carotte », une partie du joint se consume d’un côté mais pas de l’autre, ce qui fait du gâchis et comporte un risque assez élevé que le joint soit en trop mauvais état pour être consommé. Et c’est une catastrophe si le joint vient à s’éteindre car le rallumer est presque impossible, limite inutile. La plupart du temps, c’est celui qui l’a « craqué » qui se fait engueuler. Mais ce phénomène ne tient pas que de ça, il tient de la manière dont on a « tiré » dessus et aussi, un peu, de la manière dont il a été roulé.

Notre joint était juste humide, c’est un peu désagréable mais on le fumait quand même. Et on parlait, on riait, on oubliait un peu cette semaine infernale qui recommencerait bien trop tôt.

C’était un moment ou rien ne semblait plus nous atteindre, plus à s’occuper du regard des autres, ni réflexions des parents et des professeurs, ni de l’immense poids du travail scolaire. Tout était oublié pour un temps.

La discussion était passée des événements du lycée à des réflexions plus philosophiques voir même sérieuses sur notre monde et son futur. Bien que nous étions perchés, la discutions était cohérente, parfois un peu loufoque, mais nous étions des gamins et pensions que le monde, durant ce tout petit instant, était à nous. Nous parlions culture, politique, philosophie pour finalement déborder sur le sujet qui nous préoccupez le plus, les filles.

Le temps était vite passé, plus vite qu’en cour, ça s’est sur !

Le soleil dardait ses derniers rayons, nous décidâmes de rentrer chacun chez nous. Avec ce petit pincement au cœur. Oui, j’allai rentrer chez moi, me reposer mais je quittait mes amis.

Nous avons eux après cela quelques années encore de fumette entre amis, avec de l’alcool cette fois. Beaucoup de bon souvenir, certains plutôt cocasses. Jeunesse s’est faite, certains sont partis de l’autre côté de la vie à cause de ça, d’autres ont eux leurs vies ruinées. D’autres ont réussis, certains moins qu’ils le pensaient et certains plus qu’il ne s’en sentaient capable.

Plus je vois notre présent et notre futur, plus je me dis que les jeunes n’auront pas l’opportunité que nous avons eux, nous, de faire des expériences et de vivres dans l’allégresse de notre jeunesse. Des erreurs parfois certes mais la vie est un apprentissage. On apprend beaucoup par l’erreur. C’est injuste pour eux, les nouvelles générations mais peut-être n’avons nous pas besoin de ces expériences de paradis artificiels pour profitez de notre jeunesse. Mais sortir entre ami(e)s, c’est tellement important.

Jaskiers

Une histoire vraie personnelle #4 – Le jour où je me suis perdu aux milieux des champs, complètement saoul.

Crédit photo – Trip Advisor

Avant de rentrer dans le vif du sujet, je tiens, cher lecteur et lectrice, à vous avertir que j’ai changé le début de l’histoire pour raison d’anonymat. La partie où je sors de la voiture et le point de l’histoire ou rien n’a été modifié ou inventé. L’alcool, les ami(e)s, avec modération.

Je devais avoir 20-21 ans, il y a quelques années de ça. C’était un samedi soir, bien sur, un ami fêtard m’appelle pour me demander si je veux sortir en boîte. BIEN SUR lui ai-je répondu. Allez danser et surtout boire pour oublier un peu les problèmes, c’était notre truc avec mon ami fêtard.

Étant de gros buveur, en soirée je précise, nous ne conduisions JAMAIS alcoolisé. Il nous fallait un chauffeur, un SAM comme disait la publicité pour la sécurité routière de l’époque.

SAM, CELUI QUI CONDUIT, C’EST CELUI QUI NE BOIT PAS

Alors si possible un SAM et pourquoi pas décuver chez quelqu’un. Nous avions en vu d’être hébergé par une amie qui habitait pas loin de la boîte de nuit où nous voulions aller. Elle avait la trentaine, nous laisser dormir dans sa maison puis repartir le lendemain.

Avec bonheur, nous trouvons notre SAM et la femme qui nous hébergeait a accepté que nous « crashions » chez elle après la beuverie.

Tous ce déroule comme prévu, nous arrivons en boîte, buvons beaucoup (trop), dansons, flirtons maladroitement (enfin si je me rappel bien). Nous étions dans la « vibe » voyez vous. Quand une personne est dans la vibe cela signifie être assez saoul pour mettre le feu au danse floor (enfin c’est ce que la personne croit), assez désinhibé pour flirter aussi, malheureusement, il est très dur de sortir cette personne de la boîte de nuit. Elle a envie de continuer jusqu’au bout de la nuit. Sortir ? Déjà ? Hors de question !

Eh bien… Cette fois là, j’étais en plein dans cette vibe quand la femme qui nous hébergeait nous déclara que c’était le moment de partir. Elle avait des choses à faire.

Bien sur, je refuse, je suis dans mon truc, j’y reste jusqu’à l’aube !

C’était sans compter sur notre chauffeur et notre amie logeuse, qui avec mains efforts m’on traînés jusqu’à la voiture avec mon camarade de beuverie.

Dans la voiture, je commence à me plaindre, sérieusement, si c’était pour rentrer à 2h30 du matin, c’était pas la peine de nous héberger ni de nous amener. J’aurai pu rester chez moi à bouquiner. Et puis de toute façon, vous êtes plus comme avant. Et puis-

Je m’arrête dans mon monologue de soûlard avec une superbe idée en tête, faire arrêter la voiture et m’enfuir.

« – Hey l’ami, faut que tu t’arrête je vais gerber »

Le SAM arrête la voiture dans un petit chemin champêtre menant nul ne sait où. Je sors avec mon complice de beuverie et lui dit avec le ton qu’on les gens bourrés quand ils parlent :

« – Mec, ils me cassent les couilles sévère !

– Ouai moi aussi.

– J’m’en fou, j’ai pas b’soin d’eux pour me ramener !

– Mec, le village doit être encore à… genre… 11, 12 km !

– Par les champs mecs, j’vais rentrer par les champs !

– Arrête tes conneries ! T’es bourré tu sais pas c’que tu fais ! »

Trop tard, je passe à travers la haie d’un champ, tant bien quel mal, racines, ronces et fils barbelés ne m’ont pas arrêté. Quand on est saoul, on ne sens rien à par le lendemain… J’entends mon collègue gueuler à notre SAM :

« – Putain les gars ils se cassent par les champs ! »

SAM m’interpella :

« – Putain Jaskiers ! REVIENS ! J’te préviens si tu reviens pas je te défonce ! »

C’est exactement ce qu’il ne faut pas dire à un mec bourré. Ne provoquez pas un mec saoul pour essayer de le ramener à la raison. Ça a en faite l’effet inverse… J’ai pris ces paroles comme un défi.

« – Bah viens puceau ! Viens me chercher alors ! »

J’étais déjà loin, je ne sais pas si il m’a entendu, dans tous les cas, je marchais dans la terre humide d’un champ dans une direction complètement aléatoire. « J’l’ai emmerde ! » pensais-je tout en passant encore à travers une autre haie de ronce et de barbelé.

Je ne me souviens pas combien de temps je suis rester à marcher dans les champs. Il faisait littéralement nuit noir ! Les étoiles étaient cachés par des nuages, et je commençais vite fais à dessoûler au fur et à mesure de ma petite escapade.

Puis viens la sacro-sainte question de tous les personnes qui dessoûle : POURQUOI J’AI FAIS ÇA ?

Dieu merci, j’avais mon téléphone. J’essayas d’appeler mon camarade de beuverie, je tomba directement sur la messagerie. Il fallait que je ravale ma fierté. Il me fallait appeler mon SAM à la rescousse. Ce que je fis.

« – Jaskiers putain t’es où ?

– Je sais pas ce qui m’as pris putain j’suis désolé ! J’suis dans un champ, vers une haie, il y a trop de boue pour que je puisse passer. Je dois pas être loin de la route j’entends des voitures !

– Ok on va klaxonner et faire des appels de phares et dis nous si tu entends.

– Je crois vaguement entendre un klaxon mais pas de phare.

– Essaie de te rapprocher de la route et je vais rouler, si ça se trouve t’a pas trop dévier de la route. »

C’est ce que je fis, tant bien que mal, chaque pas m’enfonçant dans la boue jusqu’à la cheville.

« – Je suis au bord de la route, je vous attends. »

Tout en restant au téléphone et avec mon SAM qui utilisait son klaxon et ses phares, je vis enfin mon carrosse arriver !

« – C’est bon je vous vois ! »

Mon SAM bienfaisant s’arrêta, m’aida a traverser le fossé qu’il y a au bord de chaque route de campagne en France.

« – Ou est mon camarade de beuverie ?

– il t’a suivis, ont pensé qu’il était avec toi !

– Je ne l’ai pas vu, et son téléphone donne directement sur son répondeur ! »

Nous voilà terriblement paniqués. Je m’imagine les pires scénarios. Il était bourré, comme moi, il s’est noyé dans la boue, il est tombé dans un fossé et s’est brisé la nuque !

Avec panique et précipitation, nous refaisons tant bien que mal le chemin inverse, l’aube commence à ce pointer. Nous crions son prénom, marchons, encore, dans la boue et à travers les ronces.

Un fermier se pointe. Je le vois arriver. Je constate qu’il n’a pas sorti le fusil, c’est déjà ça. Il nous interpelle, nous demande ce que nous faisons ici à cette heure à crier comme des perdus. Nous lui expliquons la situation. Il nous dit qu’il n’a rien vu. Qu’il faut qu’on parte. Ce que nous faisons avec une énorme appréhension. Peut-être le retrouverons nous sur la route…

Bien sur, personne sur la route. Arrivé dans la rue de ma maison, je vois la voiture de mon collègue de beuverie. Il était chez moi !

« – Hey merde compagnon de beuverie ! Ça fais 2 heures qu’on te cherche dans les champs !

– Bah bravo ! Je t’ai suivis mais dans le noir je t’ai perdu ! J’ai continué mon chemin jusqu’au premier village que j’ai trouvé, je suis rentré dans une boulangerie tout crotté et j’ai demandé le téléphone pour que mon père vienne me chercher, car devine quoi, mon téléphone ne marche plus ! Mon père m’as ramené, je lui ai expliqué ce qui c’était passé et on a décidé de venir voir ton père pour l’avertir. »

Après une explication plus ou moins confuse donnée à mon père, nous décidâmes de descendre au bar du village pour nous détendre et refaire la soirée. Avec de l’eau bien sur…

Merci d’avoir lu jusqu’ici mon aventure de beuverie. Jamais quelque chose comme ça ne s’est répété, d’ailleurs depuis ce jour, je fais très attention à l’alcool.

Jaskiers

Une histoire vraie personnelle #3 – Le jour où j’ai rencontré Hervé Vilard devant chez lui.

Source de la photo : Wikipedia

Il y a de ça très longtemps. Impossible pour moi de me rappeler l’année, j’avais dans les 12 ou 13 ans peut-être.

Je vivais chez mon père, dont l’une de ses passions était le moto. Quelque fois, il m’emmenait faire des promenades dans la campagne. C’était si je m’en rappel bien une Yamaha 125 CBR. Ces balades étaient l’un de ces rares petits moments père-fils que nous avions.

Un jour en faisant tourner sa moto, il me dit : « – Tu connais Hervé Vilard ? »

J’avais 12 ans Cher lecteur/lectrice. Hervé Vilard était inconnu dans le bataillon de ma playlist.

À ma réponse négative il me dit : « – C’était l’amoureux à ta mère ! Quand on été ensemble elle l’adorait ! »

Ah bon d’accord. Elle ne m’en avait jamais parlée… Et à mon paternel de rajouter : « – Il habite pas loin d’ici, 25 km environ. Ça te dirai d’y aller ?

– Allons-y, ça va faire une belle et longue balade. »

Nous voilà parti dans la campagne. La moto s’est sympa, mais derrière on se fait sacrément… chier pour être honnête.

Nous passâmes sur des petites routes au milieux des champs. J’en déduisais que mon père n’était pas à son premier voyage dans le village de Mr Vilard. Lui aussi était un fan on dirais !

Nous arrivâmes finalement devant une petite église avec à droite, un très long mur avec une porte.

« – Voila, c’est ici qu’il habite. C’est son église ! Il l’a racheté et rénové. Derrière ce long mur il y a sa maison je crois.

– Ah d’accord. »

C’était propre si je m’en rappel bien. La propreté m’a marqué pour une certaine raison.

On entendit un chien japper derrière le mur.

« – Il y a sûrement le jardinier. Je vais aller toquer à la porte on verra bien, dit mon père.

– D’accord, moi je vais visiter la petite église alors. »

Je rentre dans la petite église, elle était petite, belle et vraiment propre. Là, j’entend la voix de mon père et la voix d’un autre homme. Je décide de sortir.

Mon père parlait avec un monsieur avec les cheveux blancs. Le monsieur avait l’air un peu blasé. Mon père était complètement choqué. Ses yeux étaient grands ouverts et il peinait à trouver ses mots. J’ai compris qui était le monsieur aux cheveux blancs. Hervé Vilard.

« – Voici mon fils Monsieur, il a visité l’église…

– Il a bien fait, il a bien fait.

– Il s’appel Jaskiers, il a —

– Laissez le se présenter je crois qu’il est assez grand.

– Bonjour, votre église est très belle et très propres, dis-je.

– Merci. Tu peux te présenter ?

– Je m’appel Jaskiers, j’ai 12 (ou 13) ans. Je viens de Nevers. J’ai déménagé dans l’Allier avec mon père après la mort de mon frère… Et je suis au collège.

– D’accord très bien. C’est bien d’avoir visité l’église. »

Je ne répondis pas. J’avais tout à coup et sans le connaître pris la mesure du monsieur avec qui je parlais. Mais malheureusement, après cette réalisation, c’était déjà la fin de notre discutions.

« – Hey bien messieurs, je vous laisse repartir, faite bonne route au revoir. »

Nous lui serrâmes la main et partîmes. Sous le choc.

Mon père avait un énorme sourire sur le visage.

« – Dés qu’on rentre, tu appel ta mère, elle ne te croire JAMAIS ! »

Nous n’arrêtâmes pas de rigoler tous le long du chemin à la maison. Même derrière les casques et les vibrations de la moto, on s’entendais ricaner. Mon père était comme un gosse.

Arrivé à la maison, je pris mon téléphone et appela ma mère :

« – Maman ! Devine quoi ! J’ai parlé à un certain Hervé Vilard ! »

Bien sur, il a fallu lui raconter notre aventure et comment s’est passé la rencontre. Elle a peiné à me croire mais elle a compris.

Encore aujourd’hui, je lui raconte l’histoire et elle me répond :

« – Quelle chance tu as eu ! Je l’adore tellement ! J’en suis amoureuse ! »

Voici comment se termine la fois où j’ai rencontré Hervé Vilard sans savoir vraiment qui il était. Je garde en tête le toupet de mon défunt père qui a été cogner chez ce Monsieur comme si il était un ami de longue date du chanteur.

Je ne suis jamais retourner dans son village, ni dans son église, encore moins cogner à sa porte.

Hervé Vilard, la première (et dernière ?) fois que j’ai rencontré un grand artiste et une grande célébrité.

Ce sont des êtres humains comme nous au final. Ce qui m’as marqué, c’est la simplicité du monsieur. Même pas rasé, je présume qu’il faisait son jardin. Il avait par contre l’air fatigué mais heureux qu’un adolescent est visité son église. Église, qui, si je me rappel bien a été rénovée par ses soins car elle appartenait au curé qui l’avait recueillit. L’histoire est belle.

Et j’ai aussi appris que des fois, il fallait juste oser.

Jaskiers