Vous avez tous entendu parler d’une personne mystérieuse, étrange, extravagante à qui vos ami(e)s, voisins prêtaient des rumeurs loufoques voir même, parfois, inquiétantes ?
Aujourd’hui, je vais vous parler d’une de ces personnes, une certaine Maggie Magic Mushroom.
Évidemment, c’était le sobriquet donné par tout Los Angeles, et même jusqu’à New-York. Peut-être même partout dans le monde.
Je ne pourrai pas vous donner une description précise de Maggie, personne ne semble l’avoir vue. Ceux qui le prétendent donnent tous des descriptions différentes. Une vieille femme blanche, blonde, toute ridée et petite. Une belle femme Noire, aux longues jambes et aux yeux vert, certains ont même juré sur leurs mères qu’elles n’étaient pas humaine, la mystérieuse dame était un lézard…
Sa légende perdure depuis plus de soixante ans. Jamais deux descriptions similaires d’une prétendue rencontre avec la Dame.
Mais, si nous ne saurons jamais à quoi ressemblait vraiment Maggie, je peux vous expliquez ce qu’elle faisait, pourquoi nous avons ajouté ‘Magic Mushroom’ à son prénom. (Inutile de vous dire que nous n’avons aucune information sur son nom de famille. D’ailleurs, son vrai nom n’est sûrement pas Maggie.)
Plusieurs rumeurs persistantes datent son apparition dès la fin des années 60. Et, cela se tient.
L’époque était aux riffs endiablées de Jimi Hendrix, de ceux hypnotisant de Santana, de la voix puissante de Janis Joplin, du lapin blanc des franciscanais de Jefferson Airplane et des paroles psychédéliques des Grateful Dead.
C’était l’époque des expériences psychédéliques, et aussi de l’amour, du rapprochement de l’Homme et de Mère Nature, mais aussi d’un climat politique délétère, la Guerre Froide, le Vietnam.
La jeunesse avait trouvé dans la drogue un échappatoire, autant psychique que physique. Ils avaient découvert par l’expérience de ces psychédéliques, que la vie n’était que ce qu’ils pouvaient voir, le monde physique n’était qu’une infime partie de l’expérience sur terre.
C’est à cette époque qu’une certaine Maggie fit parler d’elle. Elle vendait toute sorte de drogue, à des prix dérisoires, et ce d’une manière originale.
En effet, vous deviez trouver dans San Francisco ce que les tous nouveaux fidèles de Maggie appelaient : La Pyramide.
Ici aussi, la localisation précise et les descriptions de ‘La pyramide’ divergent suivant à quel ancien vous demandez. Ce que j’ai pu entendre me permet seulement de confirmer que le toit de cette maison était pyramidal. Aucunes photos d’époque n’existent, pourquoi ? La discrétion était semble-t-il de mise, même si cela n’a pas vraiment de sens, beaucoup de monde venaient acheter les produits de Maggie.
Si vous aviez la chance de trouver la Pyramide, vous n’aviez qu’à rentrer dedans.
Plusieurs tables s’offraient à vous. Dessus, un bloc-notes et un stylo.
Vous n’aviez qu’à marquer ce que vous désiriez, puis sur un des trois murs, au choix, faire passer votre bout de papier avec l’argent (je ne sais comment les anciens savaient quelle somme donner exactement. Les témoignages divergent là encore) à travers une fente de boîte aux lettres encastrées à chaque mur de la pièce où vous vous trouviez et à attendre quelques minutes. Puis, vous n’aviez plus qu’à récupérer votre commande à travers une trappe placée juste à côté de la fente, comme un petit coffre fort mural.
Mais pourquoi Maggie était et reste si légendaire ?
Parce que sa came semble venir d’un autre monde, comme la mystérieuse Dame derrière cette entreprise.
Les anciens et les nouveaux adeptes de Maggie ne jurent que par ses produits.
Son succès envers les amateurs de voyages psychédélique à San Francisco lui a valu une telle renommée que les pyramides de Maggie étaient apparues à Los Angeles et à New-York.
Nous pouvons en déduire que Maggie est en fait plusieurs personne. Mais il n’y a jamais personne qui semble rentrer ni sortir des Pyramides, en dehors des clients. Même les voisins de Maggie se souviennent de s’être réveillé un jour pour voir une maison avec un toit pyramidal dans leur rue.
Personne n’est jamais mort ni sombré dans la démence à cause des produits de Maggie. Au contraire, certains jurent que ses substances les ont miraculeusement guéri de leur dépression, des douleurs chroniques et autres maladies liées aux nerfs ou à la santé mentale.
Les Pyramides existent dans toutes les grandes villes actuelles, je ne peux pas confirmer cette information, je n’ai jamais réussis à en trouver une seule.
Maintenant, je vous laisse avec cette légende. Faites-en ce que vous voulez.
J’étais comme beaucoup d’étudiant, fauché. Rien de nouveau à ça, et comme beaucoup d’entre eux, il me fallait trouver un gagne-pain pour payer mon prêt étudiant et, surtout, pour régler mon loyer, mes factures et manger.
J’écumais les sites de recherches d’emplois, j’avais inscrit mon mail dans plusieurs de ces sites et je trouvais parfois des offres intéressantes, mais mes envoies de CV avec lettres de motivations restaient lettres mortes. Je commençais à me résigner, à me dire que finalement, travailler dans un fast-food, me bruler les doigts dans l’huile, rester coincé dans le réfrigérateur, et sentir la frite n’était pas si mal que ça, peut-être même n’aurai-je plus besoin d’aller à la Banque Alimentaire pour me nourrir. J’étais à un jour ou deux de craquer quand j’ai reçu un mail me proposant 1 800 euros pour juste une journée de travail par semaine. Et ce pendant un maximum de deux mois.
Gagner 1 800 euros en une journée, c’était incroyable, impensable presque. Trop beau pour être vrai, mais laissez-moi vous parler de ce « job ».
Cobaye pour une entreprise pharmaceutique.
Pas le droit de parler de ce que j’allais voir et vivre là-bas. Je ne « travaillerai » qu’un jour par semaine, l’étude ne durant que 2 mois, soit en tout, 8 jours de travail.
Le mail ne demandait rien de plus qu’une personne « relativement jeune et en bonne santé ». Je pense qu’à 20 ans, on est « relativement » jeune, et surtout, j’avais la santé.
J’ai donc envoyé ma candidature sur leur site, site des plus basiques, comme les vieux sites des années 2000. Le formulaire était aussi formel que n’importe quel autre sauf qu’il n’y avait pas besoin d’envoyer de CV ni de lettres de motivations. Je recevrai un deuxième mail pour savoir si j’étais pris dans 24h et aucun, si je n’étais pas sélectionné.
J’attendais patiemment en jouant sur ma console quand le bruit d’une notification mail m’avertit sur mon smartphone.
Même pas 5 heures après ma candidature, je recevais le mail de confirmation !
J’étais extatique ! Fini les fins de mois difficile pour quelque temps, je pourrai même mettre de côté une somme conséquente pour le remboursement de mon prêt étudiant.
Le mail m’indiquait, outre le fait que l’entreprise était très heureuse et impatiente de commencer à travailler avec moi, que je pourrai commencer le lendemain !
De fauché à 1 800 euros en une journée ! Nous étions en semaine, j’allai rater des classes mais je pouvais les rattraper grâce à nos classes « en lignes » qui permettait aux étudiants, qui rater des cours à cause de leur travail, de pouvoir rattraper un peu ce qu’ils avaient manqué.
J’avais juste à envoyer un mail à une autre adresse mail confirmant ma venue. Ce que je fis.
Je dormis peu, car j’étais légèrement angoissé. Bien sûr, « cobaye médical » ne semblait pas être nécessairement une partie de plaisir. J’avais peur des répercutions sur mon corps, le fait de ne pouvoir travailler, en tout et pour tout, seulement 8 jours m’inquiétait. Je présumais que ce que subirais en tant que cobaye n’était sûrement pas rien. Mais après tout, on ne crache pas sur 1 800 € en une seule journée quand le temps nous est compté et que nous sommes fauchés n’est-ce pas ?
Je pense avoir dormi peut-être 3 heures d’un sommeil agité. Mon inconscient m’envoyait des messages inquiétants. Mon corps et mon esprit avaient peur. Et ils avaient raisons. Peut-être est-ce cela « l’instinct », peut-être qu’après tout, nous avons tous ce pouvoir de sentir quand quelque chose ne va pas même si on ne le voit pas.
J’aurais dû m’écouter. Quoique, en y réfléchissant bien…
Enfin, après avoir embêté et atterré tous ces zombies qui me servaient de collègues, je pus leur lancer ce que j’avais sur le cœur :
« – Continuez ainsi, à ne pas vivre ! Obéissez, produisez, engraissez le capital ! Endettez-vous surtout ! Soyez docile ! On se retrouvera en enfer, enfin si nous ne le somme pas déjà ! Pour ceux qui refusent cette vie, prenez votre envol ! »
Je ramassais le peu d’affaire autorisé que j’avais laissé à mon bureau, quelques dossiers qui trainaient dans un tiroir depuis des années et un paquet de post-it. L’entreprise nous fournissait ces derniers gratuitement mais au compte goute.
Je pris la direction de la sortie avec une bonne dose d’adrénaline traversant mon corps, je partais la tête haute. Mon patron dédaigna sortir de son bureau pour voir ce qu’il se passait sauf quand il me vit partir bien avant l’heure de la fin de mon service. Il m’interpella :
« – Monsieur Gaspard Dincy, ce n’est pas l’heure de partir, retournez travailler !
Non.
Exc… pardon ?
Je vous pardonne !
Mais enfin… monsieur Dincy, êtes-vous souffrant ?
Non ! Enfin un peu mais je suis dans la voie de la guérison.
Je suis confus… qu’est-ce qu’il se passe ?
Il se passe que je pars !
Vous partez ? Mais comment ça ?! Ce n’est pas l’heure !
Avant l’heure c’est pas l’heure et après l’heure c’est plus l’heure comme le disait si bien ma grand-mère !
Quelle insolence ! Retournez à votre bureau ou je vous colle un blâme et il vous hantera tout au long de votre vie.
Carrez-le-vous dans le cul ! Ah ! Sûr que là, il vous hantera !
Assez ! Venez dans mon bureau tout de suite, vous êtes sur la sellette !
Vous m’invitez boire un verre ? Mais quelle agréable intention Monsieur Otrhew ! Tout le monde sait que vous buvez là-dedans !
Suffit ! J’appel la sécurité !
Pour quoi faire ? Me faire sortir ? Mais j’y vais mon bon monsieur ! Pas besoin de vous donner tant de peine !
Vous regretterez !
À la bonne heure ! Au revoir messieurs dames ! Et bonne continuation ! »
J’ai toujours rêvé d’insulter mon patron, le remettre à sa place, le faire sortir de ses gonds, c’était chose faite. Depuis une décennie, cet homme me tyrannisait, et maintenant, toute ma haine était sortie. Sa tête rubiconde et chauve était devenue écarlate, on voyait les nerfs gonflés sur son front et des taches violettes, des vaisseaux sanguins qui avaient sûrement éclaté ou quelque chose dans le genre, chose d’ailleurs observable chez les poivrots invétérés comme lui. Son petit corps dodu se retournant et sa manière de déambuler, comme un canard, ne m’énervaient plus, je n’avais plus de comptes à lui rendre, littéralement.
Je sortis, sans escorte, du bâtiment, rentra dans ma voiture sans rater de plonger le pied dans la flaque d’eau côté portière conducteur, mais c’était la dernière fois.
Direction l’appartement, terne, sans vie, sans âme qui n’était rien d’autre qu’un toit sous ma tête, le minimum pour être un employé.
Un toit, un micro-ondes, des toilettes, une douche, une télé, un lit, un ordinateur portable, c’était cela mon chez-moi. Le minimum syndical.
Je ramassais en vrac quelques habits, mon ordinateur, mon chargeur de téléphone et je mis un post-it sur la télévision :
« – Servez-vous, je n’en ai plus l’utilité. Prenez ce que vous voulez dans l’appartement. Sincèrement, monsieur Dincy. »
Je n’avais aucune tristesse à quitter cette endroit dans lequel je vivais depuis dix ans. Aucun souvenir marquant, rien. Toute cette époque de ma vie, je l’a vois en gris. Terne.
Puis, je pris un taxi pour l’aéroport. J’avais laissé ma voiture avec les clés sur le contact, elle m’avait fidèlement servie pendant plus d’une décennie, la personne qui la récupérerait ne la vendra pas telle quel mais en pièces détachées. Je ferai un heureux, cela serait sûrement bon pour mon karma pensais-je.
Le trajet de l’aéroport fut un moment étrange de réflexion et questionnement. Je n’avais pas l’habitude d’anticiper, tout était organisé dans une routine réglée à la minute près, mais maintenant, c’était comme si j’avais lâché les rennes de ma vie, je ne contrôlais plus tout, à commencer par ce taxi. C’est toujours étrange de se faire conduire quand nous avons l’habitude de le faire. C’est même agréable, et le chauffeur ne me parlait pas. Évidemment, car il travaillait. Travailler n’était plus un plaisir dans ce monde mais un fardeau. Le chauffeur était en compétition constante et chaque client devait l’évaluer sur son smartphone. Les choses étaient ainsi. Moi, je partais guérir les blessures et cicatrices que cette vie de forçat bureaucratique infernal m’avait infligée et mon pauvre bougre de chauffeur continuerait sa triste besogne jusqu’à ce que l’entreprise le renvoie pour mauvais services ou pour le mettre à la retraite.
Arrivé à l’aéroport, tout se passa comme sur des roulettes. Les hôtesses, la sécurité, les contrôles, tout me semblaient drôles, ou plutôt, légers. J’avais le sourire, je marchais la tête haute, roulais des épaules, disait bonsoir à toutes les personnes que je croisais, en leur décochant un grand sourire.
Tout ce que je reçus en retour étaient des regards effarouchés, inquiets, ou même, rien du tout.
J’étais une sorte d’alien, j’étais le seul heureux à ce qu’il me paraissait. C’était étrange car si je n’avais pas lu cette anodine annonce dans le journal, j’aurais eu la même réaction que ces gens. Ce n’était pas normal d’être heureux, c’était normal d’être usé, au bord du gouffre, à la limite de l’implosion, d’être en colère contre soi. Pas contre le monde non, cela était trop dangereux, mais contre soi-même. Quand on ne peut pas extérioriser notre colère sur la vraie raison de notre mal-être, nous nous replions sur nous même, nous créant une carapace de haine et de dédain dirigé envers nous-mêmes. C’était ce que voulait ceux qui nous gouvernaient. Un peuple abasourdi, amorphe, sans aucune estime de soi, où la seule raison de l’existence d’un citoyen et de produire du capital encore et toujours et d’en mourir. Peu de gens arrivaient à la retraite, si on pouvait appeler ça « retraite ». Vous arriviez à l’âge de vous retirer ? Bien ! Tenez, le ‘minimum vital’, 1 000 dollars et ce, peu importe votre travail. Bien sûr, cela ne s’appliquait pas aux patrons et à nos élites gouvernantes consanguines qui, eux, jouissaient d’une richesse colossale, car chaque employé n’était qu’une sorte de pantin, dont on se débarrassait quand les fils commençaient à s’effilocher et les articulations à rouiller. Aucune dépense superflue. Soit vous aviez la chance d’être né riche, soit vous travaillez.
Je scrutais les visages dans la salle d’attente de l’aéroport en attendant mon avion direction l’état du Vermont. Une certaine révolte commençait à bouillir en moi, elle était apparue quand j’ai commencé à me sentir coupable d’être le seul être humain heureux parmi tous ces gens dépités. C’était impossible de les aider, ils étaient conditionnés. Ils leur avaient fallu un déclic, comme je l’ai eu après avoir lu l’annonce pour la cure de Rien. Cela devait venir naturellement et ils devaient attraper immédiatement le taureau par les cornes et oser.
Quand j’entrais dans l’avion, j’eus la triste vision de ces femmes hôtesses de l’air qui devaient se forcer à sourire, quoiqu’il arrive. Leurs joues étaient creusées et leurs yeux cernés, le maquillage ne cachait rien. La peau, le corps était marqué par des années d’asservissement.
Je m’installas à ma place, attendant de voir à côté de qui j’allai partager ce voyage rédempteur.
C’était une dame d’une cinquantaine d’années, maigre, portant des vêtements relativement chic pour une place en classe éco’ dans l’avion. La moitié de son visage était caché par une sorte de léger voile. Elle me fit un sourire poli en s’asseyant et lâcha un bonjour suivis d’un nouveau et grand sourire.
Je ne me rappelais plus à quand remontait la dernière fois où je reçus un sourire honnête et sincère. Cette femme était soit riche, soit en partance pour la cure de Rien ou une agent du gouvernement infiltrée pour attraper les réfractaires au travail comme moi.
J’osais engager la conversation :
« – Ça fais plaisir de voir sourire !
N’est-ce pas ? J’ai été surpris par le vôtre aussi !
Les grands esprits se rencontrent !
Il semblerait !
Gaspard Dincy, enchanté.
Janet… Jill… en faite… je ne sais plus comment je m’appelle !
Pas étonnant avec cette vie de chien !
Et encore, les chiens gardent leur dignité.
Ça oui !
Mais de là a oublier son nom… vous devez me prendre pour une folle.
Ce monde est fou.
Hey bien… je peux vous faire une confidence ?
Avec plaisir !
Je ne suis pas… vraiment normale.
Qui l’est de nos jours ?
J’ai… plusieurs prénoms… et noms !
À la bonne heure ! Donc, vous vivez plusieurs vies en même temps ?
Oui, on peut dire ça comme ça. Vous comprenez, maintenant, soit vous obéissez à l’ordre établi, soit vous devenez un indésirable !
Exactement ! Mais, pourquoi plusieurs alias ?
Il faut bien manger vous voyez ?
Oh ! Vous n’allez pas me voler j’espère ?
Ah ! Bon jeu de mot ! Voler, dans un avion !
Ah ! Même pas fait exprès sur le coup !
Non je ne vous volerai pas. Mais je suis curieuse de savoir comment vous, vous vivez tranquillement une vie qui semble… hors des normes ?
Le hasard m’a envoyé de l’aide.
Oh ! Et l’aide en question ?
Une cure !
Pardon ?
Une cure ! Suffit de vous faire porter malade pour tirer au flanc !
J’aimerais plus d’explications, je me suis cassée le cul à voler, mentir, trahir et courir toute ma vie et vous, vous me dire que vous n’avez fait que vous porter malade ?
Hey bien… oui en faite. Chaque système a ses failles et j’ai trouvé la faille, ou une des failles de celui-ci.
Donc vous quittez votre travail pour faire une cure et aucun problème ? On vous a laissé partir ?
Oui. En faite, cette cure est remboursée par ma mutuelle. En partant du bureau, j’ai fait quelques vagues, preuve que j’avais besoin de soin. Et je pars faire ma cure dans le Vermont.
Je… doute que vous puissiez un jour reprendre votre vie normale.
Justement, je n’y compte pas. J’ai lu l’annonce de cette cure dans le journal et mon instinct, ou un truc du genre m’a poussé à y aller.
Et elle consiste en quoi cette cure ?
En rien.
Hein ?
La cure de Rien. C’est le nom de ma libération !
Attendez, je… une cure de rien ? Mais ça consiste en quoi exactement ?
Aucune putain d’idée chère amie ! Apparemment, c’est une cure révolutionnaire, nouvelle et les personnes en chargent de cette cure semblent avoir l’argent et le pouvoir nécessaire pour vraiment aider les gens qui s’écartent du droit chemin !
Vous n’avez aucune idée de ce que cela pourrait être ? Ils vous ont donné des informations ?
Rien…
Permettez-moi de vous dire que ça sent mauvais.
Vous pensez ?
Ça sent le coup fourré à plein nez ! Ils sont forts pour trouver les déviants comme nous.
Donc vous pensez que ce serait un piège ?
Honnêtement, oui.
Mon instinct me dit que je suis sur le bon chemin.
J’ai appris à écouter mon instinct depuis que je suis en cavale, il ne m’a jamais trahis. J’espère pour vous que ce sera la même chose.
Je n’en doute pas une seconde ! »
Nous nous arrêtâmes de discuter pendant une bonne demi-heure quand elle reprit la parole.
« – Mon vrai nom, Selena Brown.
Hey bien, enchanté Madame Brown !
Écoutez, je pense que vous partez droit dans la gueule du loup. Je peux vous aider. Je me dois de vous le proposer. Je vais dans le Vermont voir quelques déviants. Nous sommes une sorte de société secrète composée de… tire-au-flanc, comme vous le dites si bien. D’accord, société secrète, c’est un peu tiré par les cheveux, surtout que le gouvernement nous a à la bonne. Mais à part eux et nous, personne d’autre ne nous connaît. Nous avons construit un véritable réseau underground très efficace qui nous permet de vivre chichement, sur le dos des autres. Je peux vous faire entrer dans notre réseau, je vous parrainerai.
C’est très gentil de votre part. Je ne doute pas de mon instinct, mais si je réalise que je me suis fait avoir, je penserai à vous.
Tenez. »
Elle sortit un vieux téléphone portable et me le tendit.
« – Votre moyen de me contacter, au cas où. Allumer le, le seul numéro à l’intérieur est le mien. N’hésitez pas à me contacter au seul doute que vous avez.
Merci…
Mais ne laissez pas mes paroles vous faire douter, peut-être avez-vous raison. Et dans ce cas, un coup de téléphone pour me prévenir, cela pourra m’aider aussi, moi et mes collègues, à l’avenir.
Évidemment ! »
Le reste du vol passa rapidement, échangeant des banalités car Selena redoutait les oreilles indiscrètes.
Arrivez à l’aéroport international de Burlington, nous nous séparâmes rapidement. Elle ne se retourna pas pour me donner un dernier regard.
La dame n’aurait pas eut le temps car au moment même où je mis les pieds dehors, deux jeunes gens en blouse blanche m’interpellèrent.
Était-ce le milieu de la nuit ? Au début ? À l’aube ?
Je ne me rappelle plus, seulement, je sais que la chambre était plongée dans la pénombre.
Pourquoi étais-je réveillé ? Je ne me rappelle plus.
Pourquoi je fixais la porte de ma chambre ? Vous avez deviné, je ne me souviens plus.
Est-ce que j’étais éveillé ou encore dans les bras de Morphée ? Encore une question sans réponse.
Ce dont je me rappelle, ce sont ces mannequins de boutiques, ceux que je voyais quand je passais devant cette boutique de prêt-à-porter, boutique qui dans mes souvenirs n’était jamais ouverte. Les mannequins n’étaient jamais habillés, il semblait y avoir de la poussière sur eux, de la crasse. Ces mannequins n’étaient pas ceux que l’on trouve habituellement dans les boutiques. Ils étaient plats, grands, aucunes formes, asexuelles. On distinguait évidemment la tête, les bras, peut-être un peu de hanche, les jambes et c’est tout. Mais ils étaient plats et chacun avaient sa couleur, bleu, rouge, gris, blanc, noir, vert.
Je passais devant souvent. La boutique était dans une galerie marchande où ma mère m’emmenait pour faire les courses et je jetai toujours un coup d’œil à ces mannequins, abandonnés au regard de tout le monde.
La nuit dont je parle, ces mannequins ont ouvert la porte de ma chambre, ils étaient toujours aussi plats, leur bras et jambes bougeaient et c’était tout. Qu’ils étaient maigres ces bras et ces jambes ! Mais ils étaient sûrs de leur mouvement. Celui (ou celle…) qui avait ouvert la porte était le mannequin de couleur jaune, j’ai vu sa main et son avant-bras lentement redescendre à ses flancs après avoir ouvert la porte pour lui et ses camarades.
Ils rentrèrent tous, toutes les couleurs et s’installèrent debout, devant mon lit et ne bougèrent plus.
Attendaient-ils de moi quelque chose ? Voulaient-ils que je les habille ? Que je leur parle ?
Je n’en sais rien car j’ai crié et me suis caché sous ma couette. Le temps que ma mère arrive pour demander ce qu’il se passait et me rassurer, ils avaient disparus.
Cauchemar… Cauchemar ? J’avais environ 6 ans, je me rappelle distinctement les voir rentrer doucement, et même si leur visage n’était qu’un vulgaire ovale sans traits aucuns, j’étais persuadé qu’ils me regardaient. Maintenant encore, quand il m’arrive de repenser à cette horreur onirique, je ne m’en rappelle pas comme d’un cauchemar mais comme un vrai souvenir, comme si j’étais éveillé et que ces mannequins étaient vraiment entrées dans ma chambre. Qu’ils étaient vivants, avec une conscience. Si je me concentre, j’ai presque l’impression qu’ils m’ont parlé, pas physiquement, ils n’avaient pas de bouches mais communiquaient par télépathie.
Pourquoi étaient-ils venus ME voir, moi un enfant et pas un autre ? Que me voulaient-ils ? Que me serait-il arrivé si ma mère n’était pas venues à mon secours ?
Peut-être qu’en fin de compte, tout ceci était un rêve, enfin un cauchemar. Même si ma mère ne s’en souvient pas du tout, et pourtant, je n’étais pas le genre d’enfant à crier et à appeler à l’aide après un mauvais voyage onirique.
Après tout, pourquoi, après cette nuit, les mannequins avaient disparu de la boutique ?
Tant de questions, dans un monde qui est obsédé par les réponses. Je ne cherche pas plus loin, les choses sont parfois mieux laissées sans réponses.
[Avertissement : ce texte fait presque 4 000 mots, lisez-le à votre rythme. Je n’ai pas trouvé judicieux de le diviser en chapitre]
—
Fiction
Il y a des choses inexplicables qui se déroulent aux milieux de nos forêts gamin, ne t’y mêles jamais ! – Avertissement d’un vieille homme rencontré un soir dans le bar de mon village.
C’était un de ces été chaud, sec, étouffant que nous avions dans notre petit village de l’Allier. Un été où aucun de mes amis ne partaient en vacance. Les vacances, pour nous, étaient un temps pour tous nous réunir, jouer au foot, vagabonder dans le village, faire la fête.
Je me rappelle de cette curieuse semaine, plus qu’aucune autre, de cet été là.
Après une partie de football toujours âprement disputée, nous avions décidé de réunir notre argent pour aller à la supérette du village, à l’autre bout de celle-ci. Nous avions à faire 20 minutes de marches. En plein caniard. Rien ne pouvait arrêter nos matchs de foot, on était jeunes et le petit stade multisport, que le maire nous avez gracieusement offert, était notre point de rendez-vous.
Le seul problème, c’était de pouvoir manger et se rafraîchir. Les magasins du bourg, à quelque pas du stade, avaient, pour la plupart, fermés. Écrasés par la concurrence de la supérette d’une grande marque, à l’entrée du village. Il nous fallait traverser notre patelin pour pouvoir nous acheter de l’eau et quelques gâteaux pour étancher notre soif, terrible, et notre faim, ou disons, pour être honnête, notre gourmandise.
Ce jour-là était comme tous les autres. Nous marchions à travers le bourg et les rues. La chaleur nous écrasait mais nous étions ensemble, le trajet semble toujours moins long quand nous sommes accompagnés d’amis.
Après avoir atteint notre destination, mettant les maigres contenus de nos porte-monnaies en commun, nous achetâmes de l’eau et des gâteaux apéro de sous-marques, nous étions ressorti fauchés comme les blés. Le magasin avait le monopole des biens et en profitait pour imposer des prix exorbitants.
Le meilleur moment, pour nous, aller arriver. Manger et boire ! Manger et boire en société !
Il nous fallait décider où nous devrions aller pour déguster notre pique-nique. C’était toujours une décision sujette à débat. Manger sur le parking ? Non ça craint ! Retourner au stade ? L’eau serait déjà chaude à notre arrivée.
Et si nous allions dans ce champs, de l’autre côté de la rue ? Cette idée nous plut. Ce champs était juste de l’autre côté de la rue, il était immense.
Il devait bien faire 300 mètres carrés, il est difficile de juger de la dimension d’un champ à vu d’œil. Il n’y a rien, pas un repère, pour pouvoir estimer la dimension d’un champ.
Au nord, le champ était fermé naturellement par une forêt qui menait jusqu’à l’Allier (mais ça, nous ne le savions pas encore). Au sud-est, une petit mare, ou un point d’eau, entourée de roseaux et à moitié couvert part un vieil arbre desséché, noueux et qui semblait agoniser malgré l’eau à ses racines. Au sud, se trouvait une toute petite maison, disons une cabane qui ne dit pas son nom, pas plus grande qu’une chambre d’appartement où une cuisine, installé au bord du champ, un côté sur la chaussée, comme toute les maisons, et un côté donnant sur l’immense champ. Curieuse chose, que cette maison. Une porte donnant sur la rue, une autre sur le champ. Elle avait l’air d’une maison à une seule pièce et non pas d’une grange ou à tout autre bâtiment de paysans. Deux fenêtre seulement, là aussi, une donnant sur la rue, l’autre sur le champs. Les volets en bois étaient fermés, un panneau publicitaire indiquant le supermarché était accroché à l’une de ses façades.
Il nous fallait donc trouver un passage dans le vieux grillage qui clôturait le tout. Nous étions jeunes, un grillage n’allait pas nous empêcher d’entrer dans ce champs et de nous trouver une place à l’ombre près du point d’eau, sous l’arbre tordu et asséché qui semblait le gardien de cette petite mare.
Nous avions décidé de rentrer par le côté est, ou se trouvait le point d’eau. Nous décidâmes de tasser le grillage. Le but n’était pas de le défoncer, de causer du tort. Nous devions juste le plier assez pour pouvoir l’enjamber. Ce que nous fîmes. Évidemment, cela a endommagé le grillage, encore aujourd’hui, si un jour vous passer par là, vous verrez une partie de ce grillagée affaissée. Nous avons marqué notre passage, notre œuvre. Mais je vous déconseille de suivre nos pas, d’entrer dans ce champs. Car ce que nous y avons vus, vécus, ressentis, nous a laissé perplexe et tellement apeuré que nous n’osâmes plus en parler depuis. Même après plus d’une décennie. Chaque questions que nous nous posâmes après ces événements n’amenaient à aucunes réponses, pire, elles amenaient plus de questions.
Voici notre expérience, véridique, qui nous a marquée, et qui nous hante encore. Si vous vous y risquez, j’espère pour vous que ce que nous avons observé n’est plus.
Nous enjambâmes donc le grillage, ruisselant de sueurs. Le point d’eau était à une vingtaines de mètres, et ces derniers mètres semblaient interminables tant notre soif nous taraudait. Le champ n’était bien sûr pas un gazon de stade de football. Nous manquions nous briser les chevilles à chaque pas, nous fatiguant encore plus. Nous étions silencieux, excepté nos plaintes : « putain j’ai soif ».
Nous arrivâmes au point d’eau pour réaliser que la terre et l’herbe autour était humide. Une découverte surprenante, mais somme toute logique. La nature a ses règles. En pleine canicule, elle peut conserver une petite mare grâce aux ombres des roseaux et des feuilles d’un arbre. Croyez le ou non, mais j’avais l’impression de sentir un brise fraîche, comme lorsque vous êtes au bord d’un cours d’eau important ou sur une plage. Certes pas si puissantes qu’une brise marine, mais aujourd’hui encore quand j’ai l’opportunité de marcher sur une plage, ce vent frais de la mer me rappelle ce petit trou d’eau au milieu d’un champ de l’Allier. La nature est vivante.
Nous trouvâmes une toute petite place sous l’arbre dont l’écorce était noire et sèche. Certains d’entre nous avaient plus de chance que d’autres question ombre. Nous ne patientâmes point pour boire toute notre eau, mais la faim ne nous taraudait pas, ou plus, car nous avions bu tellement d’eau en si peu de temps que boire nous avait désaltéré et rempli l’estomac, nous n’avions plus de place pour les quelques gâteaux apéritifs, qui d’ailleurs donne soif tellement ils étaient salés.
Bien que certains avaient vécus dans notre village depuis tout petits, aucun de nous n’avait jamais songé explorer cet endroit. Nous regardâmes la petite maison qui était en face de nous, et nous nous posâmes des questions sur sa présence. Comme je l’ai écrit plus haut, c’était une maison, pas une cabane, quelqu’un aurait pu habiter ici, bien qu’elle ne fut pas plus grande qu’une chambre d’appartement lambdas. Nous imaginâmes l’intérieur, qu’est ce qu’il pouvait bien y avoir là-dedans ? Jamais personne n’avait vu ses volets ouverts ou quelqu’un y mettre les pieds et pourtant, elle se situait sur le trottoir juste en face de la supérette du village. Nous pensâmes que le toit était peut-être habitable, encore une fois, c’était une maison miniature avec pignon ! Un petite mansarde, ou en tous cas une fenêtre de mansarde, était présente sur la face du toit donnant sur le champ. C’était la première fois que nous y faisions attention. Un petit luxe car les maisons habituelles du village n’avaient pas toutes, loin de là, des mansardes.
On s’imaginait qu’un jour, on achèterait cette maisonnette pour en faire notre repère, une sorte de club secret. On travaillerait dur pour construire une piscine, en gardant bien sur ce point d’eau magique que nous appelions « Oasis ». Des projets de jeunesses fous, comme tout projets de jeunesses. Mais à la différence des projets d’adultes, ils nous étaient autorisé de rêver.
Évidemment, étant une bande d’adolescents, des blagues scabreuses sortaient de nos bouches de temps à autres. L’un de nous voulez y faire une garçonnière, il pourrait y amener ses nombreuses maîtresses quand il serait marié. C’était parfois cru, mais on rigolait, nous n’avions que ça à faire après tout, rire. Pas d’impôts à payer, pas de patrons, pas de responsabilités.
Un flash de lumière provenant de la mansarde me surprit. Quand j’avertissais mes amis, j’eu le droit à des regards moqueurs « T’es sur que y’avait que de l’eau dans les bouteilles ?! ». Je répondis qu’on avait tous bu dans les mêmes bouteilles, je leur demandais de regarder la toute petite fenêtre du toit, et d’attendre.
Flash ! Un autre ! Tous furent surpris. J’avais l’habitude de sortir des trucs bizarres mais là, c’était vrai !
« – C’est un flash de photo ?!
Ça peut-être que ça !
C’est peut-être le reflet du soleil sur les voitures quand elles passent…
Ou bien, c’est un code en morse nous demandant de l’aide ! »
Quand j’eu dis cela, ils me regardèrent, tétanisés.
« – T’as toujours des idées bizarres !
C’est moi qu’est bizarre ? Quelqu’un joue avec une lampe torche plutôt puissante ou un flash dans une maisonnette abandonnée ! Tout les scénarios sont possibles ! »
Je vous avais dis que nous étions des adolescent à l’humour scabreuse non ? Vous ne serez pas surpris d’apprendre que l’un de mes amis baissa son pantalon pour offrir à la personne à l’intérieur de la maison une vision de son anus. Et j’avouerai que j’ai bien rigolé, on a tous bien rigolé.
Le flash se déclencha encore et encore, sans rythme spécifique. Ils étaient… erratiques.
« – Tu connais le morse ?
Non pas du tout. »
Mon idée avait faite son chemin dans leurs têtes. J’avais dis cela sans vraiment être sérieux, mais il fallait avouer que quelqu’un essayait de communiquer avec nous.
Mon ami « sans culotte » remit son pantalon et décida de poser comme un mannequin, nous rigolâmes, décidâmes de le rejoindre en assénant des « T’aimes ça hein pervers ! » à la source des flash. Nous balançâmes évidemment quelques insultes et doigts d’honneurs.
Les flash ne s’arrêtaient pas.
« – Imaginez, ça se trouve c’est une planque de flic !
Hein ?
Bah ouai, à côté de la route, à la sortie du village, à l’endroit où il y a le plus de trafic ! »
J’avais encore lancé une de mes idées bizarres. On me regardait, stupéfaits
« – Ça se trouve ils sont en planques, ils attendent un deal de drogue et ils pensent que c’est nous les truands ! »
J’adorai voir sur leurs visages le doute s’installer. Je ne croyais pas un mot de ce que je disais, j’étais aussi confus qu’eux. Et puis ça pouvait tenir la route « j’ai vu dans 90 minutes enquête, le truc de reportage télé, les flics ils font ça. » J’enfonçais le clou. « Si ça se trouve c’est un appareil qui se déclenche automatiquement quand quelqu’un rentre dans le champ, un truc de sécurité. »
Là, je me faisais peur moi même. Pendant tout ce temps, le flash continuait à émettre sa lumière, par intermittence, irrégulière. Imaginez la puissance que cette chose devait produire ! Nous étions en plein été, aucun nuage, grand soleil, et ce flash de lumière était assez puissant pour laisser ces petites marques sur la rétine, ceux que nous avons quand nous regardons une lumière ou le soleil et clignons des yeux.
Le plus courageux d’entre nous, le Sans-Culotte, décida de s’approcher. Certains protestèrent, d’autres curieux de voir ce qu’il pouvait se produire l’encourageaient. Je faisais partie de ces derniers, trop curieux d’avoir le fin mot de l’histoire.
La maison était à une dizaine de mètres, notre ami s’y dirigeait doucement, comme si il était a l’affût, posant parfois le pied dans un trou, le faisant tituber comme un ivrogne. Nous rigolâmes pendant que les autres lui disaient de revenir. Il était trop loin pour faire demi-tour, c’est ce que je lui disais pour le motiver.
Enfin il arriva à la maison. Le flash venant de la fenêtre du toit, il était impossible pour lui de voir quoi que ce soit, mais il pouvait entendre. Et secrètement, espérai-je, peut-être que quelqu’un sortirait et nous expliquerait qu’elle était ce délire.
Nous regardâmes donc notre camarade qui avait posé son oreille contre le mur de la maison, nous guettions ses expressions, très curieux de voir ce qu’il pouvait bien entendre.
« – T’entends un truc ?
Y’a comme un bourdonnement !
C’est la zone 51 version auvergnate ! On a filmé ‘La soupe aux choux’ pas loin d’ici ça a dû les attirer.
Y’a vraiment juste un bourdonnement.
Pas de voix ?
Non je crois… pas.
Des trucs genre… des bruit de pas ?
Peut-être mais le bourdonnement est impressionnant, le mur vibre ! »
Conscient que Sans-Culotte était probablement en train de se foutre de nous, j’avançais dans sa direction, suivit d’un autre ami. Les camarades restaient derrières et nous suppliaient de faire attention, et nous avertirent qu’eux allaient commencer à repartir par là où nous étions arrivés.
À mi-chemin, je ne sais pourquoi, mais je m’arrêta, mon ami aussi. Et nous entendîmes ce cri qui, aujourd’hui encore, me fait frémir ; « Vous êtes trop jeunes, trop jeune pour crever ! »
Inutile de vous dire que nous prîmes nos jambes à nos cous. Nous courions comme des dératés vers le grillage affaissé. Oublié la fatigue, la chaleur, nos provisions. Pas très écolo, mais c’était la dernière chose à laquelle nous pensions, la première était de nous échapper du champ.
Sans-Culotte nous rejoignit au grillage où nous passions chacun notre tour, dans la panique, certains essayèrent d’enjamber ce grillage de leurs propres moyens mais les bouts de ferrailles en pointe à son sommet rendaient l’opération presque impossible. Un y réussis pourtant en s’écorchant les mains et en trouant ses vêtements. De mon côté, j’étais pétrifié, mon cerveau reptilien fixait mes yeux sur la maison. J’attendais mon tour pour passer en n’oubliant pas de lâcher quelques imprécations peu raffinées aux autres qui enjambaient tant bien que mal la partie du grillage que nous avions abîmées. Aucun mouvement dans la maisonnette, à part ce flash qui crépitait.
Je franchissais finalement le grillage en dernier. Nous nous regroupâmes, comme du bétail apeuré, les yeux fixés sur notre probable bourreau, ou plutôt son repère.
D’où nous étions, à l’est, nous n’avions plus de vue sur la fenêtre du toit d’où émanait le flash.
Nous pensions à la vengeance. Nous insultâmes copieusement l’habitant de cette curieuse maison. Tous, nous étions d’accord sur le fait que la voix était celle d’un homme, âgé. Sans-Culotte jurait avoir entendu un rire de femme après l’avertissement du vieillard. Il nous en fallait pas plus pour lâcher de créatives insultes grivoises aux mystérieux hôtes.
Après 10 minutes d’insultes diverses et variés, nous étions fatigués mais notre colère était loin d’être apaisée.
D’un commun accord, un projet germa dans nos petites têtes, un projet accepté à l’unanimité : revenir cette nuit avec des œufs, des crottes de chiens (qui étaient légions dans nos rues à cette époque) et quelques cailloux pour les balancer sur la maison. C’était notre tarif, le prix à payer pour nous avoir fichus la trouille et, surtout, pour nous avoir fais ravaler notre fierté.
Nous rentrâmes chacun chez nous, pas avant d’avoir prévu notre opération : rendez-vous à 23h30 devant chez Sans-Culotte avec chacun quelque chose de substantiel à jeter sur la maison. Nous arriverions devant cette dernière vers 23 h 50. La nuit serait tombée et nous tomberions rapidement sur la maison avec nos projectiles.
Nous passâmes notre soirée à nous envoyer des textos. Chacun demandant l’avis des autres sur le choix des projectiles, d’autres demandant de l’aide pour berner leurs parents qui ne voulaient pas que leurs adolescents sortent si tard. Après tout, nous n’étions que des gamins. Et il s’avéra que les adultes avaient eut raison d’essayer d’interdire à leurs ouailles une sortie champêtre tardive.
L’excitation fit traîner en longueur cette soirée, nous étions tellement pressés d’en découdre ! Mais il nous fallait attendre la nuit. Ce que nous fîmes.
Nous nous rejoignîmes comme prévu devant la maison de Sans-Culotte avec nos sac à dos d’écoles sur les épaules, emplis d’objets et de matière pas très ragoûtantes. Nous craignîmes la police qui rôdait parfois dans le village. Aussi, nous prîmes des routes moins fréquentées.
Plus nous nous approchions de la maison, plus l’angoisse de l’excitation montée. Elle se tourna en terreur à la vue de la scène qui se déroulait sous nos yeux.
Nous nous arrêtâmes net. Des gens étaient réunis autour de la mare. La lune était pleine, heureusement car sans elle, nous serions tombés au beau milieu d’une cérémonie qui n’avait rien d’une fête de village.
Les personnes étaient déguisée, tous affublés d’une sorte de robe noir et encapuchonnés.
« – C’est genre le Ku Kux Klan version française ! Dis-je.
C’est une putain de secte ! »
Nous entendions parler et rire. Un d’eux alluma un flambeau, nous vîmes leurs ombres immenses danser sur l’herbe. Les capuches étaient rabattus sur leurs visages ne laissant que la bouche de visible. Puis, nous vîmes une lueur arrivée de la forêt au nord. Nous comprîmes qu’un autre contingent de capuchonnés arrivait. Les deux groupes se firent des signes et s’hélèrent à grand cris, certains imitaient le cri du loup, d’autre sortaient des sortes de borborigmes tonitruants, graves et tout cela raisonnaient dans l’immensité du champ. Certains se mirent à danser, leurs ombres se mélangeaient avec leurs corps, aucun rythme, aucune chorégraphie, ils dansaient comme des pantins désarticulés.
Nous étions à court de mot. Les « putains » et « c’est quoi se bordel » avaient tous fusé de nos bouches.
Le groupe venant de la forêt se fonda dans la masse déjà présente de « païens ». Le silence revint d’un coup, ils ne bougeaient plus.
« – Donc du coup, on leur balance ce qu’on a à ces types au lieu de la maison ?
Je pensais même plus à ça !
On va peut-être éviter ?
Ouai, j’ai pas envie de finir en sacrifice humain à je ne sais quel démon !
On les emmerdes, donnez moi des œufs vous aller voir.
Mec je suis pas sûr que ce soit vraiment un truc à faire.
Tu veux rester là à les observer toute la nuit ?
C’est étrange mais oui, je me demande ce qu’ils foutent là, accoutré comme des glands.
Si ça se trouve c’est l’amical des chasseurs du village !
Ouai imagine si ils sortent les fusils !
Bah on court.
Fais chier, tu veux vraiment faire ça ? »
À ces mots, Sans-Culotte posa et ouvrit son sac et en sortit un carton de boîte d’œuf, il l’ouvrit, prit un œuf, lui posa un délicat baisé et l’envoya en direction des sectaires.
Nous étions sur le qui-vive, nous voulions voir leurs réactions avant de partir tout de go. Mais nous vîmes dans la lueur de la pleine lune l’œuf s’écraser bien loin du groupe de joyeux lurons déguisés. Et il ne fit aucun bruit. C’était comme si rien n’avait été envoyé.
« – Putain mais t’es vraiment une chèvre !
Mec t’es une vraie charrette ! »
Sans-Culotte reprit un œuf et se rapprocha du grillage du champ. Nous ne dîmes rien, trop content que quelqu’un d’autre que nous s’attarde si près d’eux. Nous le vîmes balancer son œuf. La forme sombre de l’œuf alla finir sa course vers l’un d’eux. À cet instant, nous étions aussi tendu que la corde d’un arc. Nos joyeux sectaires tournèrent leurs regards vers l’œuf tombé aux pieds de l’un d’eux et ils tournèrent leurs têtes, de concert, vers nous. L’un éteignît la torche et nous entendîmes : « Vous encore ! Vous, vous êtes trop jeune pour crever ! »
Nous allions partir en courant quand nous entendîmes Sans-Culotte, décidément le plus téméraire d’entre-nous leur répondre : « Et ta mémé ? Elle sait que tu fais des méchouis en plein été avec tes copains déguisés en pèquenots ? »
La flamme de leur brasero étant éteinte, nous ne vîmes que des formes sombres se précipiter dans la direction de Sans-Culotte et la notre. Sans culotte se mit à cavaler et nous aussi. Nos sac nous fouettaient le dos, nous allâmes dans des directions différentes, nous forçant à nous arrêter pour vite nous concerter et attendre Sans-Culotte. Tous pour un et un pour tous, ou presque.
Nous vîmes arriver le téméraire qui s’époumoner à nous dire : « Mais courrez putain ils sont derrière ! »
Nous crûmes à une blague, comment était-ce possible que ces gens puissent nous suivre ? Nous étions jeunes, sportifs et eux étaient sûrement vieux et portaient tous une robe. Mais nous recommençâmes à courir quand nous vîmes surgir de l’obscurité deux de ces personnes. Je me rappelle encore cette vision terrible de ces deux silhouettes encapuchonnées sortir des ombres, comme si les ténèbres avaient éjecté deux de ses entités à notre poursuite.
Nous courûmes.
Enfin, quand je m’arrêtais pour reprendre mon souffle, je réalisais à mon grand désarroi que j’étais seul ! Dans notre panique, nous nous étions séparés. Restait à savoir lesquels d’entre nous nos deux poursuivant avaient choisit de pister. Heureusement, nous avions nos téléphones portables (comment faisaient nos aînées sans ce gadget ?!) et je téléphonais à Sans-Culotte, il décrocha : « – Mec je sais pas où t’es partis mais cours parce qu’ils t’ont suivie ! »
Je ne raccroché pas mais courus dans une ruelles puis dans une autres. Quand je repris le téléphone, Sans-Culotte m’informât de le rejoindre avec tous les autres au stade multisport. C’était, si vous vous en rappelez, à une sacrée trotte.
J’entendis des bruits de pas précipités et lourds et deux personnes courir comme des dératés dans ma direction. Je détalais rapidement, ils criaient derrière moi mais le bruit de mon souffle, de mes pieds martelant le sol et les frottements de mon sac à dos m’empêchaient d’entendre leurs paroles.
Je courais bien à pleine vitesse depuis 2 minutes quand je me hasarda à regarder derrière moi, les deux personnes étaient là, et je l’ai reconnus, c’était deux des mes amis. Quand ils me rejoignirent, ils me dirent que c’étaient eux qui me hurlaient, tantôt, de m’arrêter.
Content d’avoir à nouveau de la compagnie, nous partîmes en direction du terrain multisport où tous nous attendaient.
Après maints débats, maintes théories, fatigués, nous décidâmes de rentrer chez nous, en prenant des chemins de traverses que seuls les habitants de longue date du hameau pouvaient connaître. Ce qui ne nous empêcha pas de jeter des regards derrière nous toute les 10 secondes.
Depuis ce jour, nous n’avons pas plus de réponses à nos questions, jamais nous n’avons retenté l’expérience. Nous avons gardé cette histoire avec nous car si nous en parlions en publique, ces messieurs (et dames ?) en robes noires auraient sût qui les avaient dérangés durant leur mystérieux pique-nique de pleine lune.
Des années plus tard, toujours avec ce même groupe d’amis, nous étions au bar du village, qui avait une fois encore changé de propriétaire, 3 fois en moins de 7 ans. Nous faisions connaissance avec le nouveau tenancier (par là comprendre : essayer de tâter le terrain et voir si il était possible d’avoir des verres gratuits, il s’avérait que pour ce nouveau propriétaire, un verre d’eau du robinet était vendu 50 centimes, donc non, pas moyen d’avoir des verres à l’œil. Petit conseil si vous décidez un jour de reprendre un bar en campagne, offrez des verres, ne soyez pas radin, conseil d’ami !).
Nous engageâmes la conversation avec un vieux monsieur, il nous parlait des années « Yé-yé » et d’autres histoires qui, si vous avez un âge avancé, passionnent les jeunes générations. En tous cas, moi j’étais intéressé. Je ne peux vous dire comment la discutions sur les forêts de l’Allier arriva sur le tapis, il faut dire que j’étais saoul, comme tous ceux qui étaient au bistrot mais toujours est-il que ce monsieur au cheveux grisonnant, petit, avec un pull en laine sale et plein de copeaux de bois nous donna un avertissement : « Il y a des choses dans les forêts gamins, je parle pas d’extraterrestre hein, quoique… mais des Hommes. Si un jour vous croisez des types louches ou qui vous donne l’impression que quelque chose cloche avec eux, ne vous mêlez pas à eux. Ils font… Il y a des choses inexplicables qui se déroulent aux milieux de nos forêts gamin, ne t’y mêles jamais ! »
J’oserais vous dire que dans son regards, cet avertissement n’était pas vraiment amical, un sourire malicieux, s’était affiché le temps d’une seconde sur son visage ridé et fatigué.
-Le writing prompt 2 était un exercice personnel que j’ai préféré ne pas partager sur le blog –
Sabine avait toujours était curieuse de cette grand cabane au fond du jardin de grand-mère. Elle était en mauvaise état, elle penchait dangereusement. Son bois semblait fatigué et la rouille avait prise possession des petites fenêtres. Elle faisait peur à voir, semblant pouvoir s’écrouler au moindre coup de vent mais Sabine avait tellement l’habitude de la voir qu’elle n’en n’avait plus peur depuis longtemps. C’était un travail solide puisque depuis des décennies, cette cabane était encore là, malgré l’épreuve impitoyable du temps et des attaques de la nature.
La curiosité la piquait tellement. Qu’est-ce qu’il pouvait bien y avoir là dedans ?
Nourrissant encore plus son envie d’y aller, grand-mère et papa lui avaient formellement interdit d’y rentrer. C’était trop dangereux disait mamie et papa, lui, disait qu’il n’y avait que du vieux matériels pour l’entretien du jardin.
Et si ils mentaient ? Et si il y avait, en faite, une créature qui s’y logeait ? Ou un trésor ? Ou un passage secret menant à un lieu que personne ne devait connaître ?
Elle n’était pas du genre, Sabine, à désobéir. Le conflit, elle en avait déjà assez vécus et plus que tout, subit. Entre ses parents surtout. Moins il y avait de conflit, mieux elle se portait, naturellement. Elle ne faisait rien, ne désobéissait jamais par crainte de la dispute, de la confrontation qui menaient souvent à de stupides et injustes conséquences.
Mais là, c’était trop tentant.
Un jour, papa partit au bar et grand-mère s’était endormie. Elle sauta sur l’occasion.
Elle ne prit aucune précaution. Pas le temps et quelle précaution prendre ?
Elle s’avança jusqu’à la porte de la cabane. Un petit loquet cylindrique rouillé fermait la porte. Tout simplement. Saisissant la petite tige pour tirer le loquet, elle rencontra la résistance de la rouille. Elle secoua avec sa force à elle le loquet, de bas en haut, le métal grinçait. Heureusement que la cabane était à une petite distance de la maison et que les voisins était tous vieux. Vieux et sourds !
Elle continua de travailler le mécanisme, le tube cylindrique cédait du terrain, il reculait doucement de son encoche. La porte se libéra après 5 bonnes minutes de lutte.
La porte penchée s’ouvrait vers l’intérieure raclant le sol qui s’avérait être en terre. Mais elle avait beau pousser de toutes ses forces, la porte ne fit que s’entrouvrir, ne laissant la place que de s’y faufiler. Enfin elle pouvait jeter un coup d’œil à l’intérieur.
Des matériaux de jardin rouillés, des papiers, beaucoup, beaucoup de papiers. C’était eux qui semblait bloquer la porte de l’intérieur.
Elle se faufila pour rentrer, évitant des clous rouillés entreposés sur une étagère en bois pourrie.
La lumière rentrait par les petits interstices entre les charpentes de bois. Elle vit dès étagères, encore. Posé dessus, des vieilles boîtes de clous, des bouteilles en verre vides, des bidons, des bocaux et beaucoup de toiles d’araignées.
Elle n’aimait pas les araignées, ça non, mais elle semblait toute planquées ou absentes. Elle n’allait pas repartir avant d’avoir fouillée un peu, sa curiosité passait outre sa phobie des arachides.
À sa surprise, il y avait une échelle, et une grande plateforme à mi-hauteur de la cabane, où cette échelle était accolée. Sur la pointe des pieds, elle vît que la plateforme était emplie de paille et d’herbes pourries.
Elle voulut atteindre l’échelle mais pour cela, il fallait marcher sur ces tas de feuilles blanches. Elle en ramassa une. Il semblait que ces feuilles n’étaient qu’en faite des bons de commandes de l’époque où son grand-père travaillait comme menuisier. Ils étaient tous vierges. Mais à vue d’œil, il y en avait plusieurs centaines.
En se frayant un chemin sur ces feuilles, en espérant ne pas se blesser ou se fouler la cheville, elle remarqua un vieux meuble, juste en dessous de la fenêtre.
Elle ne pouvait le voir de l’extérieur car la vitre était sale, rongée dans ses contours par la rouille, poussiéreuse et avec des toiles d’araignées la couvrant de l’intérieur.
Quand enfin elle s’en approcha, elle remarqua un verrou. À sa surprise, elle le tourna facilement. Et s’ouvrît sur une pile de vieilles feuilles jaunies.
Elle ne ressemblait pas aux bons de commande éparpillés partout dans la cabane.
Elle les ramassa délicatement et vît une écriture très fine et élégantes. C’était des lettres !
Elle n’avait jamais lu ce genre de lettre, comme à l’époque, l’époque des vieux. Les lettres, les mots avaient de grandes et majestueuses lignes.
Elle peinait à déchiffrer ce qu’il était écrit tellement l’écriture était fine et les feuilles tachées, des taches marrons. C’était du français, évidemment, mais du vieux français, elle arrivait avec difficultés à déchiffrer certains mots. Elle trouva un rayon de soleil et y exposa une lettre.
Elle était adressée à « Ma chère Aline » ! Qui était Aline ? Elle ne connaissait aucune Aline dans sa famille. La lettre, quant elle arrivait à déchiffrer l’écriture, parlait d’hommes partant à la recherche de chevaux, de « sections », de « brigades », de « combats », des « allemands », des noms de hameaux ou de villes qu’elle ne connaissait pas.
C’était une lettre d’un homme à sa femme. D’un soldat ! Et c’était plein d’amour. Des « mon amour », « ma tendre », « tu me manque », « pense beaucoup à toi », « à mon retour ». Elle regarda la signature, elle pensait voir un M, un R et elle finissait par un S. Marius ? Quelque chose dans le genre pensa-t-elle, un vieux prénom de l’époque.
Elle avait encore plusieurs lettres dans les mains. C’était donc vrai, il y avait un petit trésor dans cette cabane ! Mais que faisaient ces lettres si belles, autant visuellement que dans leurs contenues, dans le meuble d’une cabane pourrissante ? Il fallait les ramener dehors, les ramener à la vie ! À la lumière !
Des larmes d’excitations coulaient le long de ses joues. Enfin de l’aventure ! C’était peut-être ça de braver un interdit ; une aventure. Mais braver un interdit n’était pas sans conséquences, surtout si on se faisait attraper.
Elle n’entendît pas son père arriver. L’herbe ne fait pas raisonner les pas. Elle ne le remarqua que quant elle sortit, difficilement, en rampant presque à même le sol, de la cabane.
Il se tenait là, dos au soleil, les mains sur les hanches. Le temps de se réhabituer à la lumière du jour, elle comprit que c’était son papa. Ses joues étaient rouges, il semblait ne pas bien tenir sur ses jambes. Elle savait, il avait bu.
Elle reçus une claque sur la joue gauche mais elle ne pleura pas et resta immobile et stoïque. Il lui arracha les lettres des mains, lui cria dessus, ce n’était qu’une petite insolente, une idiote, se rendait-elle compte à quel point c’était dangereux ?
Il l’attrapa par les cheveux, ceux juste au dessus de l’oreille et la ramena à la maison tout en fulminant à haute voix.
Elle fut envoyée dans sa chambre. Elle pleurait. Non pas à cause de son père, de la claque, de l’engueulade ni de la douleur, mais des lettres ! Qu’allaitent-ils faire des lettres ? C’était incroyable d’avoir trouvé ça !
Quand elle fut autorisé à sortir de sa chambre elle n’osa pas demander où elles étaient tellement la colère de son père avait été brutale.
Jamais elle ne les a revue.
Quand des années plus tard, elle en reparla à son père, il ne s’en souvenait plus. Sa grand-mère non plus. Elle savait qu’ils mentaient. Ces lettres étaient importantes. Peut-être cachaient-elles un de ces secrets de familles qu’il ne faut surtout par ressortir. Une blessure qui, depuis quelques générations, ne s’était pas refermée. Jamais elle ne retrouvera ces lettres, pense-t-elle, mais elle garde et chérie en elle leurs souvenirs, ces belles lettres tracées finement, ces mots d’amours qu’elle a cru déchiffrer, ces mots de tristesses, misérables, des mots de soldats. D’un soldat à son amoureuse.
Il lui semblait qu’en faisant disparaître ces lettres, avaient aussi disparut l’amour entre ces deux personnes. Amour gâché par une guerre et maintenant, par le souvenir, car trop difficile pour certains de le faire ressurgir. Elle se pensait et se pense toujours la gardienne de leurs amours et de ce drame.
Intérieurement, ils vivent en elles, un jour peut-être, elle a ce fol espoir, retrouvera-t-elle ces lettres. Un jour peut-être, même si elle ne les retrouve pas, elle refera vivre leurs amour et leurs souvenirs, que ça plaise ou non.
Car ce serait une injustice de les oublier, encore.
Le vent froid faisait flotter sa robe de tous les côtés. On pouvait voir ses jambes fines et ses bras pâles. Elle était pied nues dans l’herbe sauvage.
Que faisait-elle au bord de cette falaise ?
Personne ne semblait s’en préoccuper.
Elle attrapait le bas de sa robe et écartait les bras, tournant sur elle même. On pouvait voir un sourire sur ses lèvres et sa chevelure d’un brun de jais s’ébattre elle aussi au gré du terrible vent.
Le temps était d’un gris fade. La plage, en contre bas montrait son sable encore humide, des bouts de bois pourris et des algues mortes. On pouvait sentir l’air salé et la mauvaise odeur que les algues abandonnés sur le rivage projetaient jusqu’ici.
Elle s’arrêta de tourner et elle vous fixa, d’un regard surpris et un peu effrayant. Sa bouche fit une moue, de côté. Il y avait aussi un soupçon de dédain sur son visage. Puis elle continua sa ronde. Vous pouviez jurez l’entendre chanter, mais vous pensez que c’était le vent qui s’engouffrait avec force dans vos oreilles qui vous jouait de mauvais tours.
Il était erratique ce vent, une fois à gauche, une fois à droite, une fois en face et puis dans le dos. Parfois de tous les côtés à la fois vous semblez-t-il.
Vous entendiez les vagues s’écraser sur la plage avec force.
Des oiseaux noirs luttaient tant bien que mal contre ce déchaînement de violence d’Éole. On aurait dit des cerfs-volants dont on avait perdu le contrôle.
Vous rameniez votre col à votre menton, la femme avait disparu.
Vous avez été tenté de vous approchez de l’endroit où elle dansait et surtout du bord de la falaise pour voir si elle n’était pas tombé mais vous ne l’avez pas fais.
De toute façon, je vous le dis, elle n’est pas tombé. Je ne sais pas non plus où elle est partie. Ni comment elle est apparue, vous l’avez sûrement vu apparaître mais pas moi. Peut-être est-elle apparue comme elle a disparu. Dites-moi !
À qui allez vous racontez ça ? Qui vous croira ? Et surtout qui vous écoutera ?
Ce souvenir vous le gardez pour vous seul car tout n’a pas à être partagé.
Et puis vous aussi, vous avez disparu. Et moi je reste et j’attends, dans ce vent froid.
Pour qui ? Pour quoi ? Je ne sais pas. Peut-être est-ce moi, qui dans le vent tournoie.
Ce jeudi s’annonce comme un jeudi banal pour moi. Je sors de la douche et regarde la table de salle à manger. Des papiers y sont posés… Ah oui ! Il faut que j’aille m’inscrire sur les listes électorales. J’ai jusqu’au mois de décembre mais mieux vaut le faire tout de suite. Pour une fois que je m’y prends à l’avance !
C’est les petits trucs comme ça, après un déménagement qui sont chiants. Ces petites démarches qui ne demandent pas grands choses mais qui font chiés parce qu’on n’y a pas forcément pensé avant. En tous cas pour moi.
Les cheveux encore mouillés, j’enfile mon bombers noir et mes fidèles Timberland. Je fourre mon téléphone dans la poche, mon portefeuille dans l’autre, mes clopes dans la poche intérieures. Pourquoi mettre mes cigarettes dans la poche intérieur, il faudrait plutôt mettre mon portefeuille non ?
Sur ce coup là non, il me faut mon portefeuille à porté de mains, j’y ai plié tant bien que mal les papiers nécessaires pour mon inscription sur les listes.
Oui, l’année prochaine je voterai, comme à la dernière élection, pour éviter que l’extrême droite ne passe.
L’élection qui s’amène entraîne avec elle un candidat d’extrême-droite, une copie de Trump dans l’idéologie nationaliste, physiquement plutôt gargamelle.
C’est très bas d’attaquer les gens sur leurs physiques Jaskiers.
C’est mal. Oui je sais je m’excuse… Mais il a quand même une sacré gueule de… Bref.
Maintenant il faut sortir, croiser d’autres êtres humains.
Une voisine entre deux âges nettoie ses vitres et en profite pour me regarder passer. Je me demande parfois si mes bottes me vont bien ou si j’ai l’air d’un clown avec. Non je ne pense pas, ma petite soeur n’aurait pas manqué de me le dire (comprendre : se foutre de ma gueule, mais ce serait de bonne guerre !).
A deux pas de l’entrée de la mairie, je réalise que j’ai oublié mon masque. Classique Jaskiers. Je suis vacciné mais je ne peux pas rentrer sans. Presque deux ans que l’on vit avec le virus et je n’ai toujours pas les « gestes barrières réflexes » ! En faite si, je les avaient mais après m’être fais vacciner, j’ai relâché mes habitudes.
Demi-tour, remonter à l’appartement, prendre le premier masque qui traîne et je redescends pour la mairie.
Une dame dans sa soixantaine m’accueille gentiment. J’ai tous les papiers… Ah non, j’ai oubliés ma carte d’identité. Classique Jaskiers. Normalement, elle est dans mon portefeuille…
Je demande à la dame si je peux revenir en vitesse la chercher. Pas de soucis. Demi-tour, encore, pour l’appartement, je trouves ma carte d’identité bien en évidence sur la table là où étaient exactement les papiers d’inscriptions. Je m’insulte de connard parce qu’il le faut bien. Retour à la mairie.
« Monsieur Jaskier, votre carte d’identité est périmée, depuis trois ans, il faut penser à la changer. Je ne sais même pas si elle vous permettra l’inscription pour les listes.
⁃ J’ai mon permis ?
⁃ Allons-y peut-être que ça sera utile. »
Elle me donne un papier à remplir, j’ai amené mon stylo Bic quatre-couleurs. Geste barrière niveau expert, je me jette un peu de fleurs. Je commence à remplir mon papier quand l’encre bleu semble au bout de sa vie. Et merde.
La dame qui me regardait fixement remplir mon papier comme une vielle prof fouille dans son tiroir, me sort un stylo bleu. J’en ai marre que ces petits trucs m’arrivent. Mais c’est classique Jaskiers. (Je parle de moi à la troisième personne comme Delon.)
Bien, je finis de remplir mes papiers. Tout est bon. Je rentres a l’appartement.
Mais aujourd’hui j’ai envie de sortir un peu. Seul. Au cimetière. [Petite dédicace àPandora].
Je ressort tout de suite, si je commence à trop réfléchir je vais rester à l’appartement.
Ça caille.
La Normandie c’est beau, et sa caille. Mais j’aime le froid. Le froid, sa conserve m-a-ton dis un jour. Prendre une grande bouffée d’air frais, la sentir m’envahir les poumons qui sont pleins de merde à cause du tabac. Je tousse dans la rue, les gens vont penser que j’ai la Covid. Et que j’ai l’air d’un clown avec mes chaussures.
Qu’à cela ne tienne. Je passe devant un bar, personne en terrasse, quelque papys à l’intérieur, sans masque, buvant leur vin blanc. Pas évident de boire avec un masque… Un jeune homme et une femme assis face à face à une table. Je pense qu’ils sont peut-être en plein rencard. Ou peut-être pas, les rencards ça existe plus ? D’ailleurs est que ça a vraiment existé en France ? C’est très américain d’ailleurs, « going on a date ». Maintenant on a Tinder et autres dérivations. Si j’étais une femme, je pense que j’irai à un rencard avec un petit quelque chose pour me protéger, mieux même, une amie devrait me surveiller, de loin. On aurait des signes discrets qu’on utiliserait pour avertir l’autre si il y avait un danger ou au contraire si tout allait bien.
Je continue ma petite marche, je passe devant la boulangerie de la Basilique, j’y sens le pain chaud. J’évite de regarder dedans de peur de craquer pour un petit encas, il faut dire que j’ai pris du poids ces derniers temps, c’est nouveau pour moi. Je fixes mon regard sur l’objectif. Un banc !
(Le mégot de cigarette n’est pas de moi. Ne jetez pas vos foutus mégots par terre sérieusement.)
Une fois mon gros cul (les antidépresseurs font grossir. Ce n’est pas une légende. Si vous allez dans un hôpital psychiatrique, vous verrez que certains patients sont bouffis, pas gros, juste bouffis et leurs visage, gonflés. Pas tous bien sûr mais pour moi, qui ai toujours été mince et sportif, j’ai vu mes muscles abdominaux fondre. J’ai une légère bedaine et un double menton quand je m’assois. Et je vieillis aussi. Quand j’irai mieux j’irai à la salle de sport. Quand j’irai mieux…) posé devant la basilique, je vois deux bonnes sœurs. Elles me fascinent ! J’ai toujours eu envie de leur poser des questions, sur la religion, la vie, la philosophie, Dieu, la vie mais je ne le ferai jamais, à quoi bon au final.
Donc ces deux bonnes sœurs atteignent leurs voitures. Une voiture électrique s’il vous plaît ! Et pas une petite, une sacré berline d’une marque françaises. Je ne pourrai pas vous dire la marque, je ne suis pas du tout voiture, ni bricolage. J’en ai rien à foutre des deux. Tant qu’une voiture roule, c’est tous ce que je lui demande, et j’aime pas conduire depuis que je suis sous traitement.. Quant au bricolage… je ne m’y suis jamais mis. Moi, fils d’un cheminot, petit et arrière petit fils de menuisier, je ne sais pas me servir de mes deux mains. C’est bizarre les gènes.
Si un jour je trouve une femme qui aime conduire, bingo. Rien à foutre des règles sexistes, une femme peut bien conduire son homme non ?
Et si jamais, en plus, elle bricole. Alléluia. Enfin on se mariera pas ni n’aurions d’enfants.
On en était où la ? Ah oui les bonnes sœurs. Elles débranchent tant bien que mal leur voiture de la borne de rechargement. L’une d’elle dit à l’autre : T’inquiète je gère.
Woah ! Elle est à deux doigts de dire « Wesh », si ça s’y trouve elle a un compte tiktok où elle lache des « DAB » sur une musique d’un rappeur américain en chaleur. On peut être bonne sœur et être moderne !
Non c’est trop Jaskiers.
J’allume une clope. Je me dis qu’il me faut écrire un article. Je le sens.
Il faudra que je prenne des photos. Le blog a changé, maintenant j’écris pour moi. Ce premier article sera un test. Je n’écrirai pas que ce genre d’article.
Je contemple la Basilique, elle n’a pas changé, n’a pas bougé de place ni changé de couleur depuis la dernière fois que je l’ai vu.
J’entend le vrombissement typique d’un hélicoptère. C’est l’hélicoptère médicale du CHU de Rouen, Dragon 76. Il passe au loin, derrière la Basilique puis je ne le revois plus. Il passe souvent.
Est-ce ce genre d’hélicoptère qui a transporté les 6 organes de mon frères ? Je crois vaguement me souvenir qu’ils avaient été transportés par hélicoptère. L’idée de faire un tour au cimetière me vient à l’esprit. Oui, c’est bizarre mais j’aime ce cimetière, il est unique, atypique, pour moi du moins. La moitié des cendres de mon frère y reposent dans le Jardin des souvenirs. José-Maria de Heredia y a sa tombe ainsi que le Père Hamel, tué par un terroriste dans son église à St-Etienne-du-Rouvray. J’irai les voir.
Je reste quelques minutes de plus sur le banc. Le vent frais me caresse le visage, ce n’est pas un froid qui vous pétrifie mais un froid doux. Ma respiration s’envole en petite volute.
Deux joggeuses dans la quarantaine peut-être passent et parlent, leurs voix est saccadées par l’effort. Je devrais me remettre au sport. Courir ou même marcher. Mes poumons sont grillés par la cigarette, je cracherai mes bronches après 1 minute d’efforts.
Dire que quand j’étais jeune, j’étais le premier dans les courses d’endurances. Je pouvais courir pendant 1h30 sans m’arrêter puis jouer au foot pendant les récréations. Pas une journée sans sport à cette époque. Le contraste avec aujourd’hui est attristant. Je court deux minutes et mes poumons me brûlent, mes genoux me font mal et craquent et le lendemain les courbatures m’attendront sagement pour se plaindre de mon manque de conditions physiques.
Enfin courir c’est pas pour aujourd’hui. J’ouvre mon téléphone. Je me dis que les passants qui me regardant doivent se dire : Ah ces jeunes, pas 2 minutes sans aller sur leurs téléphones.
J’envoie un snap à ma sœur pour garder nos « flammes ». (Ceux qui utilisent Snapchat savent de quoi je parle.)
J’ouvre l’application de l’AssociatedPress, un américain exécuté par injection létale, un autre va être exécuté bientôt. Je regarde leur visages, je n’ouvre pas les articles. Je referme l’application.
Pendant que je prends de pleine bouffée de cet air frais, que mes poumons meurtris par mes conneries se gonflent, un type en Amérique a été exécuté. Ses poumons ne se remplissent plus, plus jamais ils ne se rempliront. Je ne sais pas ce qu’il a fais. Peut-être était-ce un enfoiré de première.
La Basilique juste devant moi, je respire encore doucement cet air, je le sens s’engouffrer dans mon poumons et se confronter à mes bronches encrassées.
Lui, là-bas, il est mort dans une cabine, attaché. Ont lui a injecté des produits, il est mort devant des gens venu pour assister à sa mort. Quelles odeurs cette sorte de cabine doit avoir ? Moi, je respire, encore, je sens, encore.
À voir des gens assister à ta mort, certains mêmes sont payés pour, d’autres veulent juste te voir mourrir, il se passe quoi dans ta tête ? Des infirmiers et au moins un médecin doivent assister à l’exécution, je penses en tous cas.
Les médecins américains doivent-ils prêter le serment d’Hypocrate ? Je n’en sais rien.
Dans tous les cas, ils tuent un tueur, en espérant qu’il ne soit pas innocent. On tue un tueur donc… ça ne fait pas un tueur de moins sur terre.
Je sais qu’une exécution en Amérique coûte plus chère qu’un emprisonnement à perpétuité. J’aime l’Amérique même si je n’y suis jamais allé mais je peine à la comprendre. Encore plus ces dernières années. Quelques choses s’est brisés là-bas et bien souvent, ce qui se produit aux États-Unis se répercute d’une manière ou d’une autre dans l’hexagone. Sauf qu’en France, on a moins la class ! On est très terroir quand même ! Appelons ça la french touch.
Et que penser de l’autre qui attends d’être exécuté ?
Je respire encore, je fermes les yeux deux secondes, pas longtemps, on ne sais jamais à notre époque.
Beware of yoursurroundings comme on dit en Amérique.
J’ai une légère idée de ce qui se passe dans sa tête au type qui attend de crever en public. Lire les ouvrages de Caryl Chessman m’aura au moins appris cela.
C’est pas marrant pour lui évidemment. Je ne sais pas quand il va y passer. Il doit penser à la douleur, à la sensation de la mort. Il va se sentir passer de vie à trépas. Respire t-il l’air vicié de sa cellule du couloir de la mort comme moi je respire l’air frais normand ? Est-ce qu’il regrette ce qu’il a fais ? Est-ce qu’il a pensé à la peine de mort quand il a commis son crime ? Si oui, ça ne l’a pas arrêté… On récolte ce que l’on sème. Tu donne la mort, on te la donne aussi. La loi tu Talion.
Il doit penser à quelqu’un qu’il aime. Regretter de ne pas avoir passé plus de moments avec cette personne. Peut-être qu’il pleure la nuit. Silencieusement pour ne pas réveiller les autres détenus. A-t-il choisis son dernier repas ? A-t-il le droit de se fumer une dernière clope avant d’y passer ? Pense-t-il que sa vie aurait pu être différente ? Blâme t-il quelqu’un pour sa faute ? Est-il innocent ?
Et moi je regarde la Basilique. Un type est mort cette nuit, un autre va bientôt mourrir.
Et Dieu dans tous ça ? Croit-il en Lui le type prostré dans l’antichambre de la mort ? Va-t-on en enfer quand on a commis le crime de Caïn même si on est exécuté ? Est-ce qu’être exécuté pour avoir commis le pire des péchés remet les compteur à zéro durant le Jugement Dernier ?
Et moi dans tous ça ? Et vous ? Nous ?
Je reste à fixer le lieux de culte pendant 5 minutes je penses. Perdu dans mes pensées. Les passant doivent se demander ce que je fais, à fixer la Basilique sans rien faire d’autre, sans même bouger.
Assez attendu, je pars direction la Basilique, je passe à côté pour descendre au cimetière.
Tient, une plaque explicative portant sur l’histoire du cimetière ! Il y en a une devant la mairie, devant la Basilique, la salle des fêtes et d’autres part. Ces panneaux/plaques sont récents.
J’y lis qu’un champion de course de voiture y est mort. Philippe Étancelin. Je Google son nom, Wikipedia. Ah oui c’était il y a vraiment longtemps !
D’autres personnalités, qui ne m’intéresse pas, complètent la liste.
Sur la dernière ligne des célèbres morts enterrés là est écrit : « Notre illustre poète José-Maria de Heredia » je m’arrête la. « Notre » ? Vraiment ? Notre ? Un poète ? Notre ? Je veux dire… Un être humain peut-il appartenir à toute une ville ? Un artiste ? Un être humain n’appartient déjà pas à un autre être humain (dixit Breakfast At Tiffany). Je n’aime pas cette formulation, « notre ». C’est peut-être con. Je m’insurge sûrement pour rien. Peut-être est-ce parce que je suis de cette génération qui est offensée par tout et n’importe quoi.
Bref je rentres dans le cimetière, d’autres personnes, toutes âgées, y déambulent. Pourquoi suis-je s’y vieux ? Dans ma tête comme dans mes actes ? Quand j’étais gamin, j’avais été voir « La môme » au cinéma avec mon père. Ce dernier aimait à dire à tout le monde que j’étais le seul enfant dans le cinéma. C’est vrai il n’avait pas tord. Les autres spectateurs étaient pour l’écrasante majorité des personnes d’âge mûres ou âgées.
Et me voilà ! Une décennie (plus quelques années) après a déambuler dans un truc de vieux. Je sais que je ne suis pas le seul à faire ça (re-salut Pandora, maintenant je comprends pourquoi tu aimes flâner dans les cimetières).
Direction l’immense statue du Christ sur sa croix. Le Calvaire. C’est peut-être le mot adéquat quand on attend d’être exécuter. Un calvaire.
Je regarde la statue. Elle est impressionnante. Ce cimetière est… beau, plutôt grand, sur plusieurs « étages ».
Au pied de la statue, le Jardin des souvenirs. Des petits tas de cendres et des gerbes de fleurs.
Les cendres de mon frangin ne sont plus là depuis longtemps.
L’anniversaire de sa mort arrive et je suis en colère contre lui. Je réalise que je suis dans une nouvelle étape de mon deuil. 15 ans après sa mort : la colère.
Crever à 18 ans c’est nul, toi qui excellait dans tous. Dans le meilleur comme dans le pire car dans le pire, tu a trouvé la mort. Félicitation ! Tes diplômes, tes conquêtes féminines, tes « ami(e)s » qui pleuraient comme des madeleines à ton enterrement, qui me disaient « on sera toujours là pour toi », tu sais que la plupart d’entre eux sont misérables maintenant ? Certains t’on rejoint, certains sont en prison, certains sont des drogués, d’autres vivent dans la misère. D’autres ont « réussis » leurs vies, enfin sûrement car je n’ai plus aucune nouvelles de ceux-là. Aucun n’a jamais été là pour moi. Avec des ami(e)s comme ça mon frère, pas besoin d’ennemi.
Tu était un esprit brillant et combatif, moi, toujours en proie à mes démons intérieurs dont certains sont dû à ta mort. Tu était le jour, je suis la nuit, j’écris, je lis et je prépare l’aube d’une vie sans toi.
Je ne suis pas dans une belle situation non plus je l’admet. Je me bats pourtant. Je suis là, tu es mort à 18 ans, j’en ai 27. Je suis ton grand frère maintenant ! Je suis toujours un petit con comme tu peux le voir. Un jour peut-être je réussirai à te laisser partir. Pour l’instant tu me fais chier. Te rends tu compte de la peine que tu as causé ? Ce n’est pas de ta faute ? Mais avec toi, même si ce « n’était pas de ma faute » il fallait que j’agisse en étant responsable. À ton tour maintenant, d’être « responsable ». Tu ne peux répondre, au final, je vaux aussi bien que toi. Si je continue à penser que tu étais « mieux » que moi je n’avancerai pas. Nous serons à égalité maintenant. Tu n’a pas ton mot à dire. Pas mieux, pas pire que toi. Sauf que moi, j’ai survécu plus longtemps. C’est moi maintenant le grand frère. À toi de porter un peu de ma peine, de porter ma croix, à mes côtés car je l’ai décidé. Le cadet doit respecter l’aîné non ? Maintenant respecte moi et obéi moi. Laisse moi vivre sans ton fantôme à mes côtés ! Non reste à mes côtés, j’ai besoin de toi pour affronter le monde. Reste. Je t’aimerai toujours.
‘Non, mère. Laisse-moi être et laisse moi vivre’ à pensé Stephen Dedalus en voyant sa mère passe de vie à trépas.
Les fleurs sentent cette hideuse odeur de crématorium. Je pensais que c’était dû aux corps brûlés cette odeur mais non. L’expérience m’a appris que c’était ces fleurs.
Pourquoi les gens mettent-ils ces plantes qui sentent tellement mauvaises ? Ou peut-être est-ce le papier avec lesquelles elles sont vendues ? Sûrement cela.
Je me retourne pour voir une vue dégagée de Rouen Ouest et de ses alentours.
De grande cheminée au loin crachent leurs fumée. Crématorium. Non Une usine.
Poum–poum–poum. Tiens Dragon 76 est de retour ?! Non, cette fois c’est l’hélicoptère de la gendarmerie qui fais des allers-retours au dessus d’une zone industrielle traversée par un chemin de fer. Je regarde ce numéro d’insecte mécanique que je n’ai pas l’habitude de voir. Il tourne et tourne, en rond… L’argent du contribuable est bien dépensé ! Il y a des habitations par là, des HLM. Et moi de penser à 1984. Enfin, pour nous surveiller, maintenant, la police peut utiliser des drones ! Et j’ai lu qu’Elon Musk avait, peut-être, un projet consistant à projeter des publicités dans le ciel ! Imaginer regarder le ciel bleu mais devoir regarder un spot publicitaire avant… Ce n’est pas la technologie le problème, c’est l’humain.
Je regarde la Seine qui passe en contrebas. Elle a l’air tranquille. J’ai même le droit de voir quelque mouettes. Je me demande ce qu’elles font si loin dans les terres. J’ai envie de leur dire : vous savez, y’a vraiment des endroits plus beaux, vous avez des ailes, profitez-en. Et éviter de nous chier dessus ou sur les voitures.
Les oiseaux sont très intelligents, si ils sont là, c’est sûrement pour une raison.
J’ai perdu de vue l’hélicoptère des gendarmes. Disparu comme il est arrivé.
Si ça se trouve, au pied d’une statue du Christ. Ils m’ont peut-être vu prendre en photo le panorama et pensés que j’étais un truand.
Un panneau indique les différentes banlieues que l’on peut voir depuis ce panorama. J’ai l’impression que Rouen se trouvent dans une sorte de cuve, entourée de grande collines de forêts.
Le panneau indique que je regarde plein ouest. L’ouest, l’Amérique ! Si ça se trouve, je fais face à New-York.
Dernièrement, je suis fasciné par New-York. J’ai commandé des livres de Colum McCann, de Paul Auster, de Truman Capote (j’ai carrément pris tout ses ouvrages), de Hubert Shelby Jr, de Dennis Cooper, de Patti Smith, un ouvrage de Beigbeder (Window on the World un livre que m’a conseillé Pandora), J.D. Salinger, Tom Wolfe, James Baldwin et d’autres ouvrages se déroulant dans la Grande Pomme. Je ne me comprend pas, j’oscille entre l’envie de découvrir la nature sauvage de l’Alaska ou la jungle urbaine de New-York. Je n’irai peut-être jamais dans la ville qui ne dort jamais, mais je lirai New-York.
Les livres sont ma vie. C’est triste à dire. Ma pile à lire est immense. Je dirai quelque chose comme 300 livres. Certains me diront qu’à 27 printemps, il serait plutôt temps de trouver une copine plutôt que de rester seul avec mes bouquins.
L’immense majorité des livres sont d’occasions, ça reste que ça coûte cher ! Mais quand on aimes, on ne comptes pas, quitte à manger des pâtes tous les jours.
Pour l’instant, il n’y aura personne dans ma vie sentimentale. Ma liberté et ma tranquillité passent avant tout. Et les livres aussi. La demoiselle attendra que je sorte de mes pénates après avoir lu plus de 300 ouvrages.
Les gens pensent que je souffre de la solitude quand en faite, je l’apprécie tellement. J’en ai besoin. Est-ce que je m’ennuie ? Jamais ! Quand on aimes les livres, on as la chance de ne jamais souffrir de l’ennuie.
Du bruit derrière mon dos, je me retourne doucement, une dame de 70 ans environ marche sur la petite étendue d’herbes où sont dispersées cendres et gerbes de fleures. Tranquille la mamie qui marche sur les cendres. L’être humain est bizarre. Je me tais, on respect les aînés.
Il est temps d’aller voir « notre » illustre poète.
Je connais le chemin, j’avais visité ce cimetière il y a de ça un an.
Ça descend sévère. La pente est abrupte. Des deux côtés, des tombes pour la grande majorité délaissées, certaines semble même ouvertes. Que font les familles ? Les concessions ne doivent pas être gratuites ça s’est sûr, mais venir passer de temps en temps un coup de chiffon ou de balayette sur la tombe d’un proche, c’est pas la mort…
Une belle vue sur la Seine m’encourage à ne pas me casser la gueule.
Il me faut tourner à droite, prendre un tout d’escalier abrupte et étroit. Je les monte en faisant attention. Si je me casse quelque chose, je n’ai pas de couverture maladie. L’administration, ça a l’air d’être un bon job, prendre son temps, c’est ça leurs méthodes semble-t-il. Et la collection de papiers qu’ils perdent. Désolé si vous travaillez dans cette branche, évidement aucun travail n’est évident . Mais il faut bien se plaindre de quelque chose quand on est français.
La tombe du poète est entourée d’une sorte de grille « légèrement » rouillée. Des escargots, tous blancs, immobiles, semblent dormir autour de sa sépulture. La nature et le poète. Je prends une photo, je vais la mettre dans mon article. J’ai vu plusieurs blogs parler du poète, ils ont mis la photo de sa tombe. Son Wikipedia contient une photo de sa tombe. Même la pancarte explicative à l’entrée en a une.
Je lis ce qu’il est écrit sur sa tombe, je peine à déchiffrer. Le lieu de repos du natif de Cuba n’a pas l’air d’être entretenue. C’est triste.
Un homme de lettre, pardon, « notre » homme de lettre, un poète, qui repose avec je crois deux autres membres de sa famille semble ne pas être important pour la mairie. J’aimerai y (re)faire un tour pour le leur dire. Mais ne serait-ce pas un peu hypocrite de ma part ? Je n’ai jamais lu un seul de ses poèmes depuis mon arrivé. Il faudra que je penses à faire des recherches pour un recueil.
Les dalles sur lesquels je me tiens sont en mauvaises états, l’une est complètement décrochée des autres. Les poètes sont-ils condamnés à la misère et à la déconsidération même durant la mort ? Au moins, les escargots aux blanches coquilles lui rendent hommage. Je n’en ai pas vu d’autre sur les tombes aux alentours. Ou peut-être ne voulais-je pas les voir. Voulant garder une sorte de magie, une preuve que les Hommes de lettres sont d’immenses artistes.
La vérité, c’est que devant cette tombe, je me sens apaisé. Devant le Jardin des souvenirs : de la colère, devant « notre » José-Maria de Heredia : je me sens mieux. Peut-être est-ce le soleil qui commence à sortir des nuages et à me réchauffer un peu. Des rayons percent les nuages. C’est beau. J’aime les nuages quand ils se mélangent au soleil. J’ai toujours cette idée juvénile que les dieux grecques crèches là-haut. Encore plus ses jours-ci car je relis Homère la base du story-telling, le premier poète, le père de la littérature, du roman, j’ose l’affirmer. Je suis en plein dans l’Iliade, et ça bataille sec autour des nefs des Argiens. Les Dieux se querellent, font l’amour et se mêlent à la bataille.
Je me retourne pour contempler la vue qu’à le fantôme du poète. Elle est belle. Puis j’aperçois une curieuse chose perchée dans un arbre qui entoure le cimetière, on dirait un ballon de foot. Je prends une photo :
Je sais très bien que ce n’est pas un ballon, mais c’est curieux. Cette chose est quand même massive, perchée tout en haut de l’arbre. Encore une œuvre de ces génies d’oiseaux ? Si vous savez ce que c’est, je suis preneur.
Et tous ces découvertes se déroulent quand je suis aux côtés de la tombe d’un poète cubain. Cuba, si je me décale un peu sur ma gauche, je fais peut-être face à Cuba. Hemingway. Il me faut lire le grand ouvrage que j’avais trouvé par hasard et relire ses principales œuvres en anglais. Il me faut aussi trouver et lire José-Maria.
Lire lire lire. J’en oublie de vivre. Et honnêtement je m’en fous. Le virus nous empêches de voyager normalement. C’est l’excuse que je me donne car au lieu de prévoir un voyage je dépense toutes mes économies dans les livres. Bien qu’au fond de moi, je sais très bien que je ne peux pas faire de long voyage.
L’Homme est une contradiction, j’en suis sûr.
Je décide de descendre direction la tombe du prêtre assassiné. Vue sur la Seine, une péniche commerciale (c’est correct ça ? Enfin vous voyer ce que je veux dire, voici une photo) navigue doucement.
J’arrive presque en bas du cimetière. Sur la gauche, une longue série de tombe, sur trois rangs (je crois, je ne suis plus si sûr maintenant que je corrige l’article) longe le flanc jusqu’à un mur haut, gris et plutôt moche. Un écriteau indique quelque chose comme tombes communales. Les allées sont étroites, les tombes n’ont pas l’air très bien entretenue mais belle vue sur la Seine. Je ne m’y aventurerais pas, honnêtement, cette partie du cimetière est… glauque. Pardon mais bon.
Je continue tout en bas du cimetière pour visiter la tombe du Père Hamel. Il y a 1 an, j’avais beaucoup peiné à la trouvée. Elle est fleuri, tellement que l’on ne voit presque plus son nom. Je me retourne, je constate que la tombe du prêtre fait face à la cathédrale de Rouen. C’est beau. Ça a du sens. Les êtres humains aiment que les choses ai du sens. Enfin la majorité. Je pense.
Avant de quitter l’homme de foi, de remonter, je décide d’aller sur la gauche ou un portail ouvert donne sur un petit monument aux morts dédié aux soldats belges morts pendant la première guerre mondiale.
Plus loin, une longue allée bordée de buissons qui ont l’air à l’agonie donne sur un grand monument dédié au Roi Soldat, Albert I. Je décide d’aller le voir. Je prend une photo, je regarde l’œuvre de l’artiste. Ce monument n’est pas répertorié sur la pancarte à l’entrée du cimetière. Pas cool pour nos cousins belges !
Je fais demis tour, un couple de personnes âgées se recueil devant la tombe du Père Hamel. Ils doivent se demander ce que je pouvais bien faire ici. Un truc pas très catholique sûrement. Ou peut-être qu’ils sont cool et n’ont pas du tous pensé à ça. Et je me demande bien comment ils ont pu arriver jusqu’en bas tellement la côte menant à la tombe est escarpée.
Je passe devant la tombe des « Petites Sœurs des Pauvres ». C’est une grande tombe blanche, sans nom, sans fleur, sans gravure rien à part un écriteau : Petite Sœurs des Pauvres.
Même dans la mort, elles sont resté… pauvres ? C’est triste. J’imagine la vie de ces femmes, une vie dédié aux autres, aux plus démunis et elles reposent ici, aussi, sans rien, aucun artifice. Ça force le respect, l’humilité. Jusqu’à la mort elles sont restés fidèles à leurs idéaux. Je me force a comparer certaines tombes qui ont des formes… atypique je dirais. Certaines sont même TooMuch, tape à l’œil. Je remonte et vois une tombe avec une sculpture de femme. C’est une très belle sculpture, la femme est prostrée comme Le Penseur de Rodin sauf que son visage est marqué par la souffrance. Cette sculpture fait en faite partie d’une tombe. Je ne la prends pas en photo. Mais je me dis que quand même… certains ont de la vanité jusque dans la mort. C’est peut-être méchant de ma part, mais la sépulture des Petites Sœurs des Pauvres me parle plus que cette tombe.
Je me rends compte que je parles de tombe comme si je faisais une review de livres. Je suis vraiment un connard. Vous me pardonnerez n’est-ce pas ?
En continuant mon ascension vers la sortie, je décide de repasser par la tombe du poète. J’ai envie de ressentir cette sensation de douceur comme tout à l’heure. J’entends des gens parler, je n’y reste pas longtemps.
Je passe à côté du Calvaire, sans un regard pour le Jardin des souvenirs. Colère, tristesse. Il est temps de partir.
Je vois deux personnes dans la cinquantaine à la sortie, un homme, une femme. Ils finissent leurs conversation et se séparent dès que j’arrive, la femme lui dit de prendre soin de lui, lui de répondre « qu’au final c’est comme une simple grippe, je souffre pas tant que ça ».
Cool l’ami ! Donc tu as la Covid et tu vas au cimetière sans masque. Normalement je crois que tu dois rester chez toi en « quarantaine ». Qu’est-ce que tu fous au cimetière ? T’a peut-être peur que le virus t’emporte et t’as décidé de visiter ta prochaine demeure au cas où le virus te ôte la vie ? Un peu comme une visite d’appartement mortuaire peut-être. Ta dernière demeure. Peut-être que sur ta tombe tu mettra une sculpture de la Covid.
Je suis vraiment un connard.
Je suis vacciné, je peux attraper le virus mais avec des risques moindres d’hospitalisations, apparemment. Avec ma chance, le type m’aura passé un peu de sa Covid et je finirai à l’hôpital car j’ai des antécédents d’asthmatiques, asthme qui a disparu dans mon enfance. Au moins j’aurai visité le cimetière où ma mère déposera mes cendres. Mélangé à ceux d’inconnu(e)s et de mon frère, si il en reste.
Maintenant que j’y penses : Bobonnes a dessiné son expérience de vaccination.
Moi, je n’ai pas écris sur ma vaccination. (À l’heure où j’édite et vérifie ce texte, j’apprends que nous devrons recevoir une troisième dose pour garder notre pass-sanitaire… enfin je crois. C’est à ne plus rien y comprendre.)
Moi j’étais trop fainéant pour écrire ne serait-ce qu’une ligne sur mon expérience.
Je me suis fais piqué au Kindarena à Rouen. À ma première injection, c’était bondé ! Une file d’attente énorme. J’avais cette mauvaise impression, tout ces gens vont se faire vacciner, moi y compris. Je me suis peu renseigné sur le vaccin, j’ai peur, pas de la piqûre mais des effets secondaires. Une fois rentrée dans les locaux, des infirmières, infirmiers, très jeunes mon âge ou encore moins me donnent des papiers à remplir. Des médecins, des infirmières encore (que des femmes là) s’occupe de l’administratif. Je me fais vacciner par une dame de 60 ans. Elle me fais mon vaccin, aucune douleur. Elle me dit que je sens bon, sympa, elle me donne un chocobon et je m’installe pour patienter 15 minutes en cas d’effet secondaire. Le lendemain j’ai juste mal à l’épaule.
La deuxième dose. Personne dans la file d’attente, presque personne a l’intérieur. Les formalités administrations expédiées, un type dans la cinquantaine me vaccine.
Là ça fais un peu plus mal. J’ai l’impression de sentir le liquide chaud passé de la seringue à ma peau. J’ai eu le droit là encore à un chocobon. 15 minutes d’attentes. Une bonne fatigue pendant 2 jours et puis c’est tout.
Tada ! J’ai raconté vite fais comment je me suis fais vacciné.
Bobonnes l’a fais avec ses dessins et moi avec mes pauvres mots.
Je réalise qu’on peut raconter une histoire de différent moyens. L’art c’est magique putain. (Passez faire un petit coucou à Bobonnes, elle est cool.)
Par les mots, on peux raconter, écrire, en one-shot comme Pandora. On peux aussi lire les textes de Iotop, fort bien écrits, une maîtrise et un vocabulaire qui impressionnent.
Je ne peux écrire un texte décent sans le réviser un peu, au contraire de Pandora, et je n’ai pas la science des mots d’un Iotop. Peut-on parler de style ? Aucune idée, le plus important c’est que les textes/articles soient plaisant à lire quelque sois le sujet.
Bref.
Je bifurque sur la gauche et je vois le monument au morts. A ses pieds, des gerbes de fleures, c’était le 11 novembre il y a quelques jours. Je prends une photo et réalise que le monument dédié aux soldats belges de la première guerre mondiale plus bas n’a même pas une petite fleure à ses pieds. Très vite oubliés nos cousins belges et leurs sacrifices. C’est injuste et triste. Ou bien ces fleurs ont été enlevées mais pourquoi les gerbes des français sont-elles encore là ?
Le français est ingrat, il oublie vite et se plaint beaucoup. Je le sais, j’en suis un. Un gaulois pas réfractaire mais qui veut juste être seul, en paix. Un gaulois anachorète agnostique.
Je continue sur la gauche et je revois le couple de personne âgée, qui se recueillait sur la tombe du Père Hamel, sortir du cimetière et je réalise qu’il y a une autre entrée beaucoup plus accessible pour accéder à la partie la plus basse du cimetière. Jeune et con ! Les vieux ont l’avantage de la sagesse. Et l’expérience.
Je m’assied sur un banc près du magnifique monument de Jeanne d’Arc.
Malheureusement, impossible d’aller ce mettre à côté de sa statue. La vue y est imprenable sur une partie de Rouen. Le monument est magnifique. Pour une raison que j’ignore, l’accès y est fermée. Elle ne l’était pas avant la Covid dixit ma mère. Je ne comprends pas pourquoi son accès est fermée. C’est en plein air, il y a de l’espace. Si les gens sont civilisés, ils respecteraient la distanciation sociale. En faite ça me fais chier. Le monument est magnifique, c’est de l’art, de la culture. Culture qui a été malmenée voir sacrifié à cause de la Covid. On sacrifier la culture, on perd son identité. L’Homme a besoin d’histoire ! Que ce sois des livres, des chansons, des films, des séries télés, des sculptures, des tableaux, des dessins ect… Depuis la nuit des temps l’Homme a besoin de s’exprimer et d’entendre des histoires. Nos ancêtres dessinaient dans leurs grottes, l’art, c’est aussi prouver qu’on existe, que l’on a existé. Que nous sommes des humains. Sacrifier la culture, fermer les librairies, les cinémas, les musées, reviens, à mon avis, à fermer un magasin d’alimentation. L’Homme n’est plus nourris dans son âme. Et Dieu sait ce qu’il pourrait se passer quand l’Homme a besoin de rassasier sa soif de liberté, liberté d’apprendre, de s’éduquer, de s’émerveiller, de s’évader…
Je pense à ces petites librairies qui ont dû en chier pour rester debout. Je commande l’énorme majorité de mes livres par internet, j’achète des livres d’occasions qui proviennent d’associations ou de librairies indépendantes quand c’est possible. C’est à dire souvent.
Et là je m’imagine à New-York, je déambule dans une rue et je découvre une petite librairie. Je m’y engouffre, m’y vois y rester deux heures à feuilleter, sentir l’odeur, peut-être discuter avec la personne qui possède ce petit havre de culture et de paix. Je m’imagine que c’est une femme, 60 ans peut-être, elle a des lunettes, habillé à la cool, pas sophistiqué, du vécus, elle a peut-être croisée Blondie, Lou Reed, Bob Dylan et d’autres fortes personnalités qui ont marqué les U.S.A. dans sa jeunesse. Peut-être qu’elle a fréquenté des musiciens de Jazz aussi. Elle sourit en entendant mon accent français à couper à la tronçonneuse, me parle de son voyage en France et moi de lui parler du miens ici. Et on parle littérature américaine. On part loin, tous les deux sans bouger. Et puis je repars, un livre à la main, en espérant que la libraire ne soit pas la version féminine de Joe dans YOU. (Si vous ne le saviez pas, cette série, excellente au passage, est tirée de deux livres : Parfaite et Les corps cachés. L’auteure, Caroline Kepnes est même consultante sur la série ! Et non, je n’ai pas encore lu les livres, je fais tout à l’envers. La série avant les livres…)
Ah ! J’ai aussi plus de 30 livre de Stephen King ! J’ai presque tout ses livres. Je suis fou d’avoir tellement commandé.
Je me rappel qu’à l’appartement m’attendent des livres, notamment je me rappel aussi cette découverte : Virginie Despentes. King Kong théorie, bye bye blondie, baise-moi, les chiennes savantes, mordre à travers, Vernon Subutex. je suis impatient de lire cette écrivaine. Sa vie est… atypique . Comme la mienne. Qu’elle vie ne l’est pas d’ailleurs ? J’ai envie de lire son travail.
Find what you love and let it kill you.
Bang… Bang…Ding
La cloche de la Basilique me fait sursauter, déjà midi. Je m’allume une clope et je regarde Jeanne d’Arc. Il faut que j’aille visiter le musée dédié à elle à Rouen. Ma mère m’a dis que ça faisait peur, les mannequins bougent et truc comme ça. Elle m’a déjà emmener voir le lieux où elle a brûlé. Je ne sais pas trop quoi en dire. Je suis dubitatif. Jeanne d’Arc messieurs dames ! Je ne sais pas, ils auraient pu faire mieux.
Je me plains tous le temps en faite.
Ma clope consommée et le mégot rangé dans le paquet (sérieux, les mégots par terre, c’est degueulasse !), je vais faire un tour à côté de la salle des fêtes. Il y a une belle vue sur Rouen.
En chemin, des femmes mûres me suivent, elles ont des bâtons de marches dans chaque mains (marche nordique ?) et parlent du bienfait de la marche.
Je m’arrête pour vous prendre en photo cette horrible chose que les gens par ici appellent « le crapaud ». Voyez par vous même.
Qui a eu cette idée ? Qui a pensé que ce serait vraiment une bonne idée de poser ce truc là ? Petite infos complémentaires, des jeunes viennent souvent se garer à côté pour se défoncer à coup de protoxyde d’azote (je crois) contenu dans des ballons de baudruches. Une sorte de drogue qui est dans les parages depuis quelques années maintenant. Ces jeunes ne se cachent même pas.
J’arrive vers l’endroit qui donne une vue dégagée de Rouen ouest. Une photo puis je repart.
Je repasse à côté de la Basilique, je me demande si je vais y rentrer. Un panneau indique « vigilance », ce dernier mot écrit dans un triangle. Ce ne doit pas être pour la Covid, je pense que c’est un plan vigipirate, le pauvre Père Hamel…
Quel monde triste, je ne rentre pas. Je passe à côté du presbytère, un arbre magnifique est planté dans sa cour. Je ne le prends pas en photo, je ne pense pas que cela sois judicieux mais il est beau. Tout tordu . Je lis vite fais une affiche accrochée sur une porte attenante au mur du bâtiment religieux.
Je lis « inscription pour le café » au lieu de « caté ».
Maintenant j’ai envie d’un café.
Bourré de sucre. Mais j’ai arrêté. Le café hein, pas le sucre. Je m’étonne d’être gros !
Arrive à quelque mètres de mon appartement, je tâte les poches, je ne trouve pas les clés !
Je fais une fouille minutieuse de mes poches, je commence à suer. Je vais devoir me retaper tout le chemin jusqu’à tout en bas du cimetière ?!
Je revérifie mes poches et les retrouvent, emmitouflées dans mon masque. Super Jaskier !
J’entre dans mon bâtiment, ouvre ma boîte aux lettres. J’ai reçus des livres.
Pour finir cet article (très long, désolé), une petite citation que j’ai retrouvé dans mes notes. Je ne sais plus où je l’ai trouvé mais elle était là, dans mon application. Autant la partager avec vous en guise de fin !
JD Salinger au New-York Times : « La publication est une terrible invasion de ma vie privée. J’aime écrire. J’adore écrire. Mais j’écris pour moi et mon propre plaisir. »
P.S. : depuis que j’ai écris cet article (le 18/11) l’homme qui devait être exécuté en Amérique ne le sera pas, le gouverneur de son État l’a gracié.
P.S. 1 : j’ai finis L’Iliade et L’Odyssée, je m’apprête à attaquer Un été avec Homère de Sylvain Tesson. Suite logique !
P.S. 2 : n’hésitez pas à jeter un coup d’oeil aux blogueurs que j’ai mentionné dans l’article !
P.S. 3 : désolé pour les fautes de français…et pour le très long article. Merci d’avoir lu jusque-là !
Imaginez un type qui se réveille au petit matin sur le port de San Francisco avec une blessure à la tête, un flingue à ses côtés et le cadavre d’une fille quelques mètres plus loin. Même si il est sonné et a mal au crâne, il comprend immédiatement qu’il est dans la merde et qu’il va avoir les flics sur le dos. S’il ne veut pas finir sur la chaise électrique, il a intérêt à se barrer vite fait. Mais pour aller où ? Car il réalise tout à coup qu’il a totalement perdu la mémoire. Il ne se souvient ni de son nom, ni de sa vie. Le voilà obligé de fuir la police tout en menant une enquête sur lui-même.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il va aller de surprise en surprise…
GILA MONSTERn.m [angl. Gila monster, lat. heloderma suspectum]
L’heloderma suspectum est un gros lézard venimeux d’Amérique du Nord. Son venin est un neurotoxique aussi puissant que celui du serpent corail. L’attaque du Monstre de Gila est fulgurante et quand il a mordu, il est pratiquement impossible de lui faire lâcher prise. En cas de morsure, la seule solution est de plonger l’animal entier dans l’eau pour le forcer à ouvrir ses mâchoires. Un remède peu pratique quand il s’agit d’un lézard vivant essentiellement dans les zones désertiques de l’Ouest américain…
—
Encore un polar Jaskiers ?
Tant qu’à faire ! J’avais envie de me plonger dans le côté sombre de l’univers de la bande dessiné.
Donc c’est parti pour cette histoire qui semble prometteuse n’est-il point ? Et cette fameuse description de lézard dans la quatrième de couverture… effrayant non ?
D’abord, parlons du dessin, les personnages ont tous un air patibulaire ! Tous le monde semblent mauvais dans cette bd ! L’artiste a joué sur les couleurs pour jouer sur les différentes ambiances durant le récit.
L’histoire prend son temps, ce n’est pas une tare, au contraire, au début, nous nous retrouvons comme le personnage principal, que ce passe-t-il et qu’elle est ce fichu bordel ? Des indices nous sont données au fur et à mesure de l’histoire (encore heureux !).
La bd ne fait pas dans le gore ni dans le glauque. Peu de violence mais plus de psychologie.
Je trouve la partie enquête policière un peu simple, trop facile. Elle aurait sûrement gagnée à être plus développée.
L’ouvrage reste malgré tout un bon polar. Bien sûr, il y a 2 tomes et celui-ci finit sur un bon petit cliffhanger sans être trop frustrant.
Bien sûr, comme souvent avec les bandes dessinées, elle est très courte.
Je vous la conseil donc mais procurez-vous aussi le tome 2 !
– Tesson ! Je poursuis une bête depuis six ans, dit Munier. Elle se cache sur le plateau du Tibet. J’y retourne cet hiver, je t’emmène.
– Qui est-ce ?
– La panthère des neiges. Une ombre magique !
– Je pensais qu’elle avait disparu, dis-je.
– C’est ce qu’elle fait croire.
Sylvain Tesson a notamment publié aux Éditions Gallimard Dans les forêts de Sibérie (prix Médicis essais 2011), Une vie à coucher dehors (Goncourt de la nouvelle 2009) et Sur les chemins noirs.
—
Quel voyage que d’ouvrir ce livre et quel supplice que de devoir le refermer. Fini ! Plus une seule page, plus un seul paragraphe, plus une seule phrase, plus un seul mot à se mettre sous la dent.
C’est comme un retour de vacance, on est tristes, déprimés mais il nous reste les souvenirs, au moins, avant nous eut la chance de partir. Du moins, grâce aux livres, et pour moi, grâce à Sylvain Tesson.
Écrire un article sur un livre de Tesson n’est pas chose aisée quand on a un vocabulaire qui reste à désirer, un intellect plutôt brouillé.
Je parlerai d’une quête dont Sylvain Tesson n’était pas préparé mentalement. Ce n’est pas tant l’aventure, l’action qui a bousculé Tesson mais l’inactivité, la patience, l’observation et prendre le temps d’apprécier le spectacle de la nature sauvage.
Et bien sûr, cette panthère des neiges qui prends la forme d’une déesse, d’un spectre antique, d’une femme disparue, d’une statue païenne à l’allure hautaine, d’une créature de mythologie que l’Homme ne mériterait pas de regarder en face tant son esprit n’est pas préparé à être bousculé par l’immensité d’un regard, d’une attitude exposant un monde qui garde encore ses mystères. Nous, les Hommes, qui pensons tout connaître.
Saupoudré par des messages écologiques, de critiques sur l’être humain et son comportement, sur la société actuelle et bien sûr, quelque coups de plumes en direction des « meilleurs amis » de Tesson, les chasseurs.
Certains lecteurs ne pourraient pas apprécier ce genre de réflexion, ce n’est pas mon cas bien au contraire. Prêcher un converti !
Je me suis permis de partager quelques extraits que j’ai trouvé importants, j’aurai pu carrément réécrire le livre ici tant l’ouvrage a été plaisant à lire. J’ai choisis ces extraits en essayant de ne pas vous gâcher votre lecture.
Extraits :
Les fidèles [d’un temple bouddhiste] tournaient, attendant que passe cette vie. Parfois s’avancer dans la ronde un groupe de cavaliers du haut-plateau, avec des gueules de Kurt Cobain – surplis de fourrure, Ray-Ban et chapeau de cow-boys -, chevaliers du grand manège morbide.
–
Un renard s’offrît au soleil, découpé sur l’arête, loin de nous. Revenait-il de la chasse ? À peine mon œil le quitta qu’il s’évanouit. Je ne le revis jamais. Première leçon : les bêtes surgissent sans prémices puis s’évanouissent sans espoir qu’on les retrouve. Il faut bénir leur vision éphémère, la vénérer comme une offrande.
–
Je rêvais d’une presse quotidienne dévolue aux bêtes. Au lieu de : « Attaque meurtrière pendant le carnaval », on lirait dans les journaux : « Des chèvres bleues gagnent les Kunlun ». On y perdrait en angoisse, on y gagnerait en poésie.
–
La préhistoire pleurait et chacune de ses larmes était un yack. Leurs ombres disaient : « Nous sommes de la nature, nous ne varions pas, nous sommes d’ici et de toujours. Vous êtes de la culture, plastiques et instables, vous innovez sans cesse, où vous dirigiez-vous ? »
–
Ainsi, les bêtes surveillent-elles le monde, comme les gargouilles contrôlent la ville, en haut des beffrois. Nous passons à leur pied, ignorants.
–
L’intelligence de la nature féconde certains êtres sans qu’ils aient accompli d’études. Ce sont des voyants, ils percent les énigmes de l’agencement des choses là où les savants étudient une seule pièce de l’édifice.
–
Un vrai souverain se contente d’être. Il s’épargne d’agir et se dispense d’apparaître. Son existence fonde son autorité. Le président d’une démocratie, lui, doit se montrer sans cesse, animateur du rond-point.
–
Rencontrer un animal est une jouvence. L’œil capte un scintillement. La bête est une clef, elle ouvre une porte. Derrière, l’incommunicable.
–
Au « tout, tout de suite » de l’épilepsie moderne, s’opposait le « sans doute rien, jamais » de l’affût. Ce luxe de passer une journée entière à attendre l’improbable !
—
En espérant que cet article vous ai plus, difficile comme je l’ai écris plus haut de parler d’un Tesson. Un jour j’avalerai un Beschrelle, pour faire justice à ce genre d’ouvrage.
Quel ironie de lire ce livre dans mon appartement, accompagné des sirènes de pompiers, de SAMU, de polices, de Klaxons et d’alarmes de voitures.
Le silence est un luxe et la patience : une qualité mise à mal par la technologie.