Mon enfance dans le Bronx, enfin presque.

Jaskiers ?! Tu viens du Bronx ?!

Oui ! Enfin… presque ?

Avez vous entendu parler du groupe de musique dont les musiciens tapent sur des énormes bidons à coup d’énormes baguettes (pas de pain hein) et qui s’appel : Les Tambours du Bronx ?

Les Tambours du Bronx (crédit photo : Wikipedia)

Qu’importe votre réponse, si vous connaissez ou pas, recherchez sur YouTube et vous trouverez.

Mais quel rapport avec moi ? (Parce que vous êtes sur mon blog et que je suis peut-être mégalo, tout doit se rapporter à moi ici !)

Les Tambours du Bronx et ma petite personne avons en commun d’être nés au même endroit. Un commune de la Nièvre, accolée à Nevers.

Une partie de cette commune est appelée le Bronx, pourquoi ? Laissons répondre Wikipedia : « Leur nom vient d’un quartier de la commune surnommé « Le Bronx » à cause de son quadrillage de rues et de ses alignements de maisons identiques, de couleur sombre. »

Le Bronx à New-York (source photo : lonelyplanet.fr)

Autant vous dire que ce groupe de musique était notre fierté à tous.

Cette partie de la ville était juste en face de mon appartement, quand j’étais gamin. Cette ville de la Nièvre, sans grande prétention mais somme toute belle, est avec moi, est attaché à mon être. J’y retourne avec plaisir et nostalgie, les plus belles années de ma vie me reviennent en mémoire.

Une amie d’enfance m’a dis un jour que son compagnon ne comprenait pas pourquoi les habitants de cette petite commune étaient si attachés à cette dernière.

Je n’ai pas d’explication, c’est presque dans ma chair, une sorte de havre, My Hometown, j’y ai arpenté tous les recoins, j’y ai appris à lire, à écrire (avec des fautes), à compter, à jouer au foot et au Basket. J’y ai eu mes premiers amours, mon premier vrai amour, des drames, des joies, des soucis et des succès, des ami(e)s, des meilleurs amis, des bagarres, des emmerdes, mes premières rencontre avec la Police, la première fois où j’ai vu quelqu’un dégainer une arme et rentrer dans la partie cave de mon appartement…

Tellement de chose qui font que cette ville fait partit de moi.

Elle est mon Ithaque, et je suis Ulysse… Non disons plutôt un mélange d’Ulysse dont j’expliquerai que son talent pour la ruse viendrait de l’anxiété et Telemaque, l’enfant devenant adulte, ou presque. On dirait aujourd’hui, en utilisant la Novlangue (AKA À – NOTRE – ÉPOQUE – ON – A – DES – MOTS – POUR – TOUS – NOS – MAUX – !) que je suis un adulescent.

Excusez mon écart, j’ai lu il y a quelques jours « Un été avec Homère » de Tesson, le passage où il nous parle du lecteur et de son identification avec un des héros Homériques. Autant jouer le jeu !

A noter aussi cette théorie de Tesson dans cet ouvrage : nous sommes hantés par le lieu qui nous a vue naître, par le lieu où nous avons le plus vécus, ou où nous vivons (ou avons vécus) le plus d’émotions. C’est une sorte de possession qui s’emparerait de l’écrivain, nous devons voir dans un récit l’influence du lieu sur son auteur. L’art de l’artiste est habité par son environnement.

Et n’oublions pas non plus l’influence de l’endroit d’où l’on vient.

L’influence d’Ulysse de James Joyce, que je viens de terminer, tant a apporté une certaine crédibilité à la théorie de Tesson. James Joyce et Dublin. Et vice-versa ?

Pour finir, un article arrivera dans les prochaines semaines voir prochains mois, portant sur la littérature et New-York. Il me faut le temps, et surtout l’argent, pour réunir les ouvrages que j’ai prévus de me procurer.

D’ici là, si vous avez écris sur New-York, n’hésitez pas à partager vos article dans les commentaires. Même des anecdotes, des récits de voyage, pourquoi pas ?! Je me ferai un plaisir de les lire !

Patria est ubicumque est bene

Jaskiers

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Le livre noir par Ilya Ehrenbourg et Vassili Grossman

Quatrième de couverture :

Le 22 juin 1941, les troupes allemandes envahissent l’Union soviétique. « L’opération Barberousse » est, aux yeux d’Hitler, le début de la guerre d’anéantissement du « judéo-bolchevisme ».

Alors que son armée est obligée de reculer, Staline accepte la création d’un Comité antifasciste juif. Au cours d’une tournée aux États-Unis, une délégation de ce comité rencontre Albert Einstein qui suggère que soient désormais consignées dans un « livre noir » les atrocités commises par les Allemands sur la population juive d’URSS.

Réalisée sous la direction d’Ilya Ehrenbourg et de Vassili Grossman, cette relation « sur l’extermination scélérate des Juifs par les envahisseurs fascistes allemands dans les régions provisoirement occupées de l’URSS et dans les camps d’extermination en Pologne pendant la guerre de 1941-1945 » est assez avancée en 1945 pour être envoyée au procureur soviétique du procès de Nuremberg, puis aux États-Unis où elle est publiée.

L’édition russe du « livre noir », elle, ne verra jamais le jour : d’abord censurée, elle sera définitivement interdite en 1947.

En 1952, les principaux dirigeants du Comité antifasciste Juif sont condamnés à mort et exécutés d’une balle dans la nuque.

Après l’écroulement de l’URSS et grâce à Irina Ehrenbourg, la première édition intégrale en russe du Livre noir a enfin pu être publiée en 1993 à Vilnius.

La présente édition se veut le plus fidèle possible à ce livre retrouvé, terrible page d’histoire directe et témoignage bouleversant.

Cher(e)s lecteurs et lectrices, habitué(e)s du blog, je pense que depuis tous le temps que vous me suivez, vous avez remarqué à quel point la Shoah tient une grande place dans mes lectures. Depuis tout petit, j’essaie de comprendre ce qu’il s’est passé après être tombé par hasard sur un livre de mon grand-père sur l’Holocauste.

Je ne sais pas ce que je recherche. Je me contente de lire, beaucoup, de récit sur cette tragédie et j’emmagasine l’horreur, comme si j’étais une éponge. J’ai l’impression que je le dois, pour les victimes et les survivants. Je ne fais que lire après tous, je n’ai pas vécu de tels horreurs mais quelque chose en moi me pousse à lire ces témoignages pour ne pas oublier. Dans ces temps troublés, je crois qu’il est important de se rappeler comment tout bascule, à une vitesse vertigineuse. Ces lectures permettraient à certaines personnes de relativiser la situation et à faire de notre monde un endroit plus humain.

Ce livre représente l’ouvrage le plus horrible sur le génocide des Juifs par les allemands durant la Seconde Guerre Mondiale sur le front de l’Est. Une véritable entreprise d’extermination des Juifs et des Russes. Aucunes pitiés de la part des bourreaux, allemands, lettons, ukrainiens, roumains ect…

Fort d’avoir lu le journal de guerre et les deux fresques magnifiques de Vassili Grossman sur la mythique bataille de Stalingrad ; Vie et destin et Pour une juste cause, je savais que l’homme, l’écrivain, l’humaniste (?) russe était un homme intègre, talentueux et courageux. Il est le principal collaborateur de ce livre.

Je ne connais que sommairement Ilya Ehrenbourg, journaliste, comme Grossman, bon écrivain, je me suis dis qu’il fallait sauter le pas et le lire, dans cet ouvrage. J’ai découvert le travail de Ehrenbourg. Une plume émouvante mais gorgée de propagande soviétique.

J’ai encore en tête ma lecture de la découverte de Treblinka par Vassili Grossman. Un récit que nous devrions lire à l’école tellement est puissant et émouvant ce texte de la découverte par un russe Juif d’un camp d’extermination nazie. J’ai aussi en tête cette immense fresque qu’il a écris sur la bataille de Stalingrad, , œuvre de toute une vie, Vassili se l’est vu retiré par le KGB. Anéanti par la disparition du travail le plus important de sa vie, il trouvera le papier carbone qu’il a utilisé pour écrire son roman, l’envoya en deux exemplaire au-delà du rideau de fer ou ses deux livres seront publié. Romancier qui a vite découvert les dangers du communisme durant la guerre, son talent est digne de celui des plus grands écrivains russes, courageux et poétique dans ses écrits, cela lui coûtera sa santé et des démêlés avec la terrible justice soviétique. Il échappera de peu à une punition sévère.

Comment vais-je bien pouvoir parler de se livre ?

Ce que je savais sur Ilya Ehrenbourg était éparse. Je savais qu’il était parti en Espagne, couvrir la guerre civile espagnole pour le compte d’un journal russe (par ailleurs, il y rencontrera Hemingway), qu’il était un grand ami de Grossman même si des tensions sont apparu à cause des doutes sur le communisme de ce dernier. Il était aussi bien connu de Staline. Il était le journaliste le plus lu d’URSS. En tous cas, pas besoin de vous dire à quel point il était dangereux d’être lu par Staline. Lui aussi passera à travers les mailles des purges antisemites de Staline. Ce ne sera malheureusement pas le cas de beaucoup de collaborateurs du Livre Noir.

Le publication du livre noir a été un combat, politique surtout. Dans l’URSS de Staline jusqu’a l’effondrement du mur de Berlin.

A cela, il faut ajouter plusieurs points de vues divergeant sur la construction et direction du livre. Ehrenbourg voulant des récits de survivants et de témoins uniquement, Grossman voulant apporter à ces témoignages des réflexions. Ce dernier aura gain de cause.

Bien qu’Ehrenbourg quittera le navire, son travail sur le projet ayant été considérable, il sera crédité aux côtés de Vassili.

Le travail des traducteurs est impressionnant. Ils ont réussis à retrouver les originaux, grâce à la fille d’Ehrenbourg, du Livre Noir, permettant au traducteurs de rajouter les passages censurés par les organes de censures soviétiques. Il est bien sûr à nous de faire attention à la propagande russe, pas vraiment subtile, disséminée dans les récits. Seul les récits écrits par Vassili Grossman semblent omettre cette dimension propagandiste, du moins l’apposer avec plus de tact, de distance et de discrétion. Il est d’ailleurs difficile d’oublier que la majorité des auteurs de ce livre ont été exécutés, ainsi que beaucoup de survivants des horreurs nazies, par les purges staliniennes. Parce que Juifs, parce que fait prisonnier par les allemands au lieu de se battre jusqu’à la mort, parce qu’avoir survécu à l’horreur nazie signifiait, pour Staline, un certain degré de collaboration avec l’ennemi.

La fin du livre contient les portraits de ces auteurs/collaborateurs qui ont aidé à la création de ce livre pour l’Histoire et la mémoire du peuple Juif exterminé en Europe de l’Est. La plupart, hommes et femmes, ont été exécuté par Staline. Hitler mort, Staline a continuer la persécution des Juifs d’Europe de l’Est. (Voir mon article sur l’ouvrage de Timothy Snyder : Terre de sang L’Europe : entre Hitler et Staline.)

Sur le livre maintenant.

J’ai appris que plusieurs centaines (milliers ?) de ghettos ont existé. Dans des villes et des villages et des hameaux perdus de l’Europe de l’Est.

Que les femmes et les enfants étaient souvent enterrés vivants, pour économiser les balles. Les bébés étaient attrapés par les pieds pour être fracassés sur le sol devant leurs mères.

Qu’il existait moult camps de concentrations. De petites tailles mais tout aussi cruels et meurtriers que les plus grands et les plus connus par le grand public.

Que les massacres perpétués à Oradour-sur-Glane et Tulles en France étaient commis quotidiennement sur le front de l’Est. D’ailleurs, je crois que les unités ayant commis ces exactions en France venaient du front russe.

Que la torture et l’humiliation étaient une partie importante du génocide. Tuer n’était pas suffisant, il fallait humilier.

Que les bandes de partisans soviétiques n’étaient pas une légende et que beaucoup de Juifs les ont rejoin et ont combattu les nazis armes à la mains, beaucoup préférant donner chèrement leurs peaux, femmes, enfants et hommes confondus.

J’ai, comme toujours pour ce genre de livre, hésité à partager des extraits de l’ouvrage avec vous. Comme vous en avez sûrement conscience, le livre contient des horreurs perpétrées par l’être humain sur d’autres êtres humains, des humiliations, des meurtres et des tortures que personnes n’auraient imaginé. Une preuve, comme si l’on en avait encore besoin, que l’Homme est le pire des animaux.

Dire que ces exactions font parties du passé n’est malheureusement pas vrai. Les camps de concentrations pour les Ouïgours en Chine en est la preuve. Et si ce n’était que ça…

Tous les jours, des innocents sont opprimé sans que personne ne bouge le petit doigts.

J’ai décidé de partager avec vous une poignée d’extraits extrêmement choquants. Ne les lisez pas si vous ne le sentez pas.

Extraits :

ATTENTION LES EXTRAITS SONT CHOQUANTS

Dans la note du 8 septembre 1944 intitulé « Le projet du Livre noir mentionné par Ehrenbourg et destinée aux ‘instances compétentes’ [Staline], il était dit : ‘Ce livre sera constitué de récits de Juifs rescapés, de témoins des atrocités, d’instructions des autorités allemandes, de journaux intimes et de témoignages de bourreaux, de notes et de journaux de personnes ayant échappé aux massacres. Ce ne sont pas là des actes, des procès verbaux, mais des récits vivants qui doivent faire apparaître la profondeur de la tragédie.

Il est extrêmement important de montrer la solidarité de la population soviétique. (…) Il est indispensable de montrer que les Juifs mouraient courageusement, de s’arrêter sur les actes de résistance. – Ilya Ehrenbourg

Les jours d’orgies, les SS ne tiraient pas. Ils transperçaient la tête des prisonniers avec des pics ou bien la fracassaient à coups de marteau, ils les étranglaient et les crucifiaient en leur enfonçant des clous dans la chair.

On faisait entrer les Juifs dans une immense salle qui pouvaient contenir jusqu’à mille personnes. Les allemands faisaient passer dans les murs des fils électriques qui n’étaient pas isolés. Les mêmes fils passaient dans le sol. Lorsque la salle était plein de gens nus, les allemands branchaient le courant. C’était une gigantesque chaise électrique dont n’imaginait pas qu’elle pu être inventé, même par l’esprit le plus malade.

Il avait construit une cage en verre sur un mirador. On y mettait un Juif qui mourrait à petit feu à la vue de tous.

La nuit, les allemands attaquaient les maisons Juives et en tuaient les habitants. Ces meurtres étaient perpétrés de façon particulièrement cruelle : on crevait les yeux des victimes, on leur arrachait la langue, les oreilles, on leur défonçait le crâne.

Les petits enfants, dès qu’on les avait fait descendre des camions, les policiers les enlevaient à leurs parents et leur brisaient l’échine contre leur genou. Les nourrissons, ils les lançaient en l’air et leur tiraient dessus, ou bien ils les attrapaient sur la pointe de leur baïonnettes, et les jetaient ensuite dans les fosses.

Deux Juifs avaient été découverts dans leurs caches. Les allemands en jetèrent un à terre et lui recouvrirent le dos de morceaux de verre, puis ils ordonnèrent au second de lui marcher dessus.

Les petits enfants, épuisés et faibles, se mirent à pleurer : leurs petits bras se fatiguaient et retombaient tout de suite. Pour la peine, on les leur coupait avec des poignards, ou bien on leur rompait la colonne vertébrale, ou bien encore, élevant l’enfant au-dessus de sa tête, le fasciste le jetait de toutes ses forces sur la chaussée pavée : après un tel choc, la cervelle de l’enfant jaillissait de son crâne éclaté.

Les allemands assassinèrent les Juifs des bourgades de façon horrible, en les jetant vivants dans les flammes. Dans la brigade de Charkovchtchina, on coupait la langue, on crevait les yeux, on arrachait les cheveux des gens, avant de les tuer.

Cher père ! Je te dis adieu avant la mort. Nous avons très envie de vivre, mais inutile d’espérer, on ne nous le permet pas ! J’ai tellement peur de cette mort, parce qu’on jette les petits enfants vivants dans les fosses. Adieu pour toujours. Je t’embrasse fort, fort.

Les enfants se mirent à crier. « Tante, où est-ce qu’on nous emmène ? » Bélénovna leur expliqua calmement : « À la campagne. On va aller travailler. »

On a trouvé dans une fosse près de Morozovsk les cadavres d’Eléna Bélénova et des six enfants Juifs.

Note de bas de page : le docteur Fainberg, sa femme et sa fille t’entêtent de se suicider en s’ouvrant les veines et en prenant de la morphine, mais les allemands les envoyèrent à l’hôpital, les soignèrent, après quoi ils furent fusillés.

Je me suis procuré un morceau de fil électrique, et un jour, à l’aube, je me suis pendu. Mais mon râle d’agonie a été entendu et on m’a décroché. Pour me punir, on m’a battu, on m’a brisé trois côtes. Je n’avais pas le droit de disposer de la vie, ce droit appartenait aux allemands.

J’ai fais mon exercice de mémoire en lisant se livre. Un exercice très difficile, découvrant ce qui est de plus exécrable, d’incroyablement sadique et mortel chez l’être humain.

Pourquoi ai-je lu se livre, ce genre de questions reviennent souvent dans mes articles sur la Shoah et la littérature de guerre/concentrationnaire. Je laisse ces mots de Vassili Grossman, présents dans l’introduction de ce livre, parler pour moi et finir cet article.

Puisse la mémoire des hommes conserver jusqu’à la fin des siècles le souvenir des souffrances et des morts atroces de ces millions d’enfants, de femmes et de vieillards assassinés. Puisse la mémoire sacrée des suppliciés être le gardien formidable du bien, puisse la cendre de ceux qui furent brûlés interpeller le cœurs des vivants pour enjoindre les hommes et les peuples à la fraternité. – Vassili Grossman

Jaskiers

En ligne de Ernest Hemingway

Quatrième de couverture :

Choix d’articles et de dépêches de quarante années

Journaliste et romancier, Hemingway a su mener les deux activités de front avec un égal talent, utilisant l’une au profit de l’autre et vice versa. Le jeune Ernest n’a pas dix-huit ans lorsqu’il publie son premier article. Pêche, chasse, descriptions de paysages et de mœurs, anecdotes de voyage, exotisme et reportage de guerre : il aborde tous les genres avec aisance et impose immédiatement ce style sans fioritures qui n’a pas pris une ride. Plus de quarante années d’articles et de dépêches écrites aux quatre coins de la planète sont réunies dans ce recueil qui se divise en cinq parties. La première représente les débuts d’Hemingway journaliste. D’emblée, le jeune homme porte un regard original, avisé et plein d’humour sur ce qui l’entoure. Après quelques années exclusivement consacrées à là littératures, Hemingway, devenu écrivain célèbre, renoue avec le reportage. Il couvre la guerre d’Espagne, qui lui inspirera Pour qui sonne le glas, puis la Deuxième Guerre mondiale. Le livre se termine sur l’après-guerre vu par un homme de plus en plus fasciné par la mort.

Le recueil d’article commence par son travail au Toronto Star Weekly, voguant entre l’Amérique, la France, la Suisse, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne.

En Europe, il vivra à Paris. Le Paris d’après guerre était un véritable vivier d’artiste américain. Son travail au journal de Toronto lui permettra de nourrir sa femme et son fils.

Hemingway écrit pour The Toronto Star Weekly :

Si vous voulez vous procurez des repas gratis, un logement gratis et des soins gratuits, il existe un moyen infaillible. Approchez-vous du plus gros agent de police que vous pouvez trouver et frappez-le au visage.

La durée de votre temps de repas et de logement gratis dépendra de l’humeur du colonel (George Taylor) Denison (juge de tribunal de simple police). Et l’importance de vos soins médicaux gratis dépendra de la taille de l’agent de police.

Voici un autre extrait d’un de ses article au Toronto Star Weekly, ou le jeune Hemingway devine déjà le drame que la dictature de Mussolini va provoquer en Europe :

Quand nous entrâmes dans la pièce, le dictateur [Mussolini] à la chemise noire ne leva pas les yeux du livre qu’il lisait, tant était intense sa concentration, ect…

Je m’approchai discrètement derrière lui pour voir quel livre il lisait avec tant d’intérêt. C’était un dictionnaire français-anglais — tenu à l’envers.

Ernest Hemingway jeune, à l’époque où il travaillait au Toronto Star Weekly.

Après le Toronto Star Weekly et une longue pose journalistique de 9 ans, Ernest décide de se consacrer à ses ambitions de romancier. Ambitions qui se concrétiseront avec l’énorme succès, de son roman Le soleil se lève aussi. Ernest est engagé par Esquire, où il écrira beaucoup d’article sur la chasse, la pêche, les safaris, l’écriture, le voyage et sur la situation politique en Europe, qu’il juge menaçante, surtout avec l’avènement de Mussolini en Italie et celui d’Hitler en Allemagne.

À noter le superbe article écrit sur un vieux marin qui revient de la pêche avec son énorme prise mangée par les requins donne des frissons… Pour des raisons évidentes pour ceux qui ont eux la chance de lire l’un de ses plus grand livre. D’ailleurs, comme noté précédemment, l’écriture fait parti intégrante de ses articles, comme si il voulait distiller un peu de son talent aux lecteurs.

Voici d’ailleurs un extrait d’un de ses articles pour Esquire :

La chose la plus difficile au monde est d’écrire une prose parfaitement sincère sur les êtres humains. D’abord il faut connaître le sujet ; et puis il faut savoir écrire. Apprendre ces deux choses nécessite une vie entière […] Écrivez sur ce que vous connaissez et avec sincérité et envoyé tous le monde au diable.

Vous devez être toujours prêt à travailler sans encouragement. C’est lorsque vous êtes inspiré par quelque chose que se fait la première rédaction. Mais personne ne peut la voir avant que vous l’ayez reprise encore et encore, avant que vous ayez communiqué l’émotion, les décors et les sons au lecteur. Et lorsque vous aurez accompli cela, les mots, parfois, n’auront plus de sens pour vous, tellement vous les aurez relus de fois.

Puis, il sera engagé par la North American Newspaper Alliance pour couvrir la guerre d’Espagne, pays dont il est follement amoureux. Il choisira le camps des Républicains dans la lutte fratricide qu’était la guerre espagnole.

Ces articles sont une mine d’or. Preuve qu’Hemingway était un aussi bon reporter qu’un excellent écrivain. J’ai beaucoup lu de récit de guerre mais les articles d’Hemingway nous plonge dans l’enfer de la guerre civile Espagnole. Tantôt avec les civiles, les collègues journalistes et avec les soldats républicains. La prose est dur, ferme, franche et je dirais presque romanesque à la vue des descriptions, vous avez l’impression d’y être. Oui. Confortablement installé, vous êtes plongé dans l’horreur grâce à son talent. Son expérience de la guerre civile espagnole lui inspirera Pour qui sonne le glas, l’œuvre sera dédié à Martha Gellhorn.

Extrait d’une dépêche pour la North American Newspaper Alliance ayant pour titre : Le bombardement de Madrid 11 Avril 1937

Mais en ville, où toutes les rues étaient pleines des foules du dimanche, les obus arrivèrent avec le brusque éclair que fait un court-circuit et puis il y eut le fracas assourdissant de la poussière de granit. Au cours de la matinée, vingt-deux obus tombèrent sur Madrid.

Ils tuèrent une vielle dame qui revenait du marché, la jetant à terre comme un ballot de vêtement noirs, une jambe, soudain détachée, allant frapper en tournoyant le mur de la maison voisine.

Ils tuèrent sur une autre place trois personnes, qui s’étalèrent comme autant de paquets éventrés de vieux chiffons dans la poussière et les gravats quand les éclats de 155 eurent explosé contre le bord du trottoir.

Une automobile arrivant dans la rue stoppa brusquement, fit une embardée après l’éclair lumineux et le fracas et le conducteur sortit en titubant, son cuir chevelu pendant sur ses yeux, pour aller s’asseoir sur le trottoir, la main sur le visage, le sang lui mettant un vernis brillant sur le menton.

[…] mais le bombardement qui s’abattît sur les rues à la recherche des promeneurs du dimanche n’était pas militaire.

Ernest Hemingway, au milieu avec le bonnet, se réchauffant avec des soldats républicains durant la guerre civile Espagnole.

Durant la Seconde Guerre Mondiale il couvrira pour le magazine PM. Du conflit sino-japonais, au débarquement de Normandie, de la Libération de Paris jusqu’à la percée de la ligne Ziegfried.

Hemingway sera d’abord envoyé en Chine pour couvrir la guerre Sino-Japonaise, afin de renseigner le public occidental sur se conflit qui était pour beaucoup de personnes, un conflit oublié, l’Allemagne Nazie et le conflit en Europe, la guerre pour la suprématie aérienne au-dessus de l’Angleterre étant plus importante à leurs yeux.

En analysant le conflit, Hemingway émet des théories sur une possible attaque japonaise dans le Pacifique, dans leurs quêtes d’extension et soumet l’idée qu’une attaque japonaise sur la flotte américaine était très probable, ce qui déclencherai l’entrée de l’Amérique dans la guerre. L’Histoire lui prouvera qu’il avait raison car l’attaque japonaise de Pearl Harbor entraînera l’entrée de l’Amérique dans la guerre totale.

Hemingway (troisième en partant de la gauche) et Martha Gellhorn, je crois, (première à gauche) en Chine durant la guerre Sino-Japonaise.

Vient ensuite, le récit d’Hemingway sur le débarquement de Normandie dont-il participa avec la septième vague d’assaut.

Le bond dans le temps, les articles sur la guerre en Chine dataient 1941, est dû aux autres activités qu’Ernest avait pendant la guerre. Écrire bien sur, mais aussi, la chasse au sous-marins allemand à bord de son bateau de pêche le long des côtes de Cuba. Selon certains experts, cette mission de chasse n’était qu’un prétexte pour boire entre ami, selon d’autres, ces missions ont permit de couler 2 ou 3 navires allemands.

L’article d’Ernest sur le débarquement est angoissant, car Hemingway et ses compatriotes n’arrive pas à trouver la plage sur laquelle ils devaient débarquer les soldats et la TNT qu’ils transportaient.

Ernest Hemingway avec des soldats américains avant le débarquement.

En lisant cette article, je me suis rappelé cette introduction dans le livre de Martha Gellhorn, La guerre de face disant qu’Hemingway n’aurait pas assisté au débarquement et qu’il aurait écrit cette article grâce aux témoignages des soldats revenus du front. Maintenant, à nous de nous faire notre propre avis. Je sais par contre que Robert Capa a participé au débarquement, sur la plage d’Omaha Beach, surnommé Omaha la Sanglante à cause du carnage infligé aux soldats américains par les allemands défendant la plage. ( C’est cette plate qu’à choisis Spielberg pour filmer Qui veut sauver le soldat Ryan.) Capa faisait parti de la première vague, la légende dit que la plupart des clichés qu’il a prit pendant le débarquement ont été perdu car les négatifs seraient tombés dans la mer. Des soldats diront qu’ils avaient beaucoup trop peur et qu’une fois arrivé sur la plage, il demanda d’être rapatrié illico-presto vers l’Angleterre. Encore une fois, qui dit vrai ?

Extrait de la traversée de la victoire pour Radio Londres :

À ce moment, nous entrâmes dans la zone balayée par le feu des mitrailleuses et je baissai la tête pour échapper au crépitement des balles. Puis je descendis dans la cavité à l’arrière, là où le canonnier aurait pris place si nous avions eu des canons. Le feu des mitrailleuses faisait jaillir l’eau tout autour du bateau et un obus antichar fit lever une gerbe d’eau qui passa par-dessus nous.

« Vire et sors le bateau d’ici, Patron ! » cria Andy. « Sors le bateau d’ici ! »

Le lieutenant parlait, mais je n’entendais pas ce qu’il disait. Andy pouvait l’entendre : il s’était penché, la tête tout près de ses lèvres.

Pendant que nous pivotions sur place et nous en allions, le feu des mitrailleuses s’arrêta. Mais les balles de tireurs individuels continuèrent à siffler au-dessus de nos têtes et à frapper l’eau autour de nous. J’avais relevé lentement la tête et regardai le rivage.

Vient ensuite un article sur les bombes allemande V1 et V2, les premiers missiles longues portées inventé par les nazis et provoquant d’énorme dégâts humains et matériels dans Londres. Hemingway interview des pilotes de chasses chargés d’éliminer ses missiles, exercices périlleux et difficiles.

Missile V1 quelque seconde avec d’exploser dans une banlieue de Londres.

Ensuite, Hemingway s’embarque avec dans des bombardiers, l’article et court, se concentre sur la drôle de façon de parler des anglais. Je dirai que cet article est le plus anecdotique de se recueil, même si il reste bon et bourré d’humour.

Puis arrive bien sur la libération de Paris, la ville qu’il aime le plus. Avec moult détails, tout en glissant dans son article qu’en tant que reporter de guerre, il n’a pas le droit de commander de soldats, il décrit les manœuvres entre soldats américains et les F.F.I, les Forces Françaises Libres, pour mener à bien l’assaut sur Paris. L’article est mythique, les Résistants le nomme capitaine puis colonel, il se dédouane constamment, disant qu’il n’a aucune influence sur les soldats, mais se contredit plusieurs fois, et je crois intentionnellement, en écrivant qu’il servait juste de « traducteur » entre Résistants et l’armée U.S.

Saviez que Ernest Hemingway était à la tête d’un groupe de franc-tireur français et qu’il a mené se groupe jusqu’à durant la bataille pour la libération de Paris jusqu’à la terrible bataille de la forêt d’Hurtgen ? Bien sur, il a mené se groupe officieusement, ce qui n’a pas manqué d’attirer l’attention de l’état major américain. Interrogé par ce dernier, Ernest niera évidemment tous et sera lavé de cette accusation. Bien sur, Ernest ne parle pas de son implication, totalement illégale aux vues des conventions de Genève, dans ses articles, c’était juste pour la petite histoire. La légende dit même qu’il aurait libéré le Ritz ! (Une autre légende dit qu’il aurait sorti un lion qui s’était échappé d’un cirque, à main nu du Ritz. Le Ritz a d’ailleurs un bar nommé au nom d’Hemingway et plusieurs boisson nommé en son nom à Cuba, comme le Papa Doble.)

Aaron E. Hotchner, journaliste américain et grand ami de Hemingway jusqu’au suicide de se dernier écrira dans son livre Papa Hemingway cette petite rencontre a un hippodrome de Paris (je ne me rappel plus lequel) : Avant la course qui s’annonçait, quelqu’un appela Ernest, les deux amis tournèrent la tête pour se retrouver devant un petit homme mal habillé. Hemingway le reconnus. C’était un des francs-tireurs qu’il avait commandé lors de la Seconde Guerre Mondiale. Après un banal échange de politesse ils se quittèrent. Hemingway dit à Aaron : « – Avec ce petit français, pendant la guerre, on as fait du sale. On en a vu aussi, mais on as fait du sale. » Hemingway ne parlait que très peu de la guerre, c’est le seul passage du livre de Hotchner, si je me rappel bien, qui parle de la guerre.

Pendant la Seconde Guerre Mondiale. De gauche à droite : Robert Capa, le chauffeur de la Jeep et Hemingway.

Puis vient l’avancé et la percée de la ligne Ziegfried, dernière ligne de défense allemande. Les retranscriptions de batailles et de discutions entre soldats (incluant des résistants français, qui comme de par hasard, se retrouvent avec Hemingway aux frontière du Reich). Ces articles sont de loins les meilleurs reportages de guerres que j’ai lu. Captivants, effrayants, parfois même drôles.

A noté aussi que son premier fils Jack, surnommé Bumby, était parachutiste durant la guerre et fut fait prisonnier par les allemands ! Il fut libéré, sain et sauf. Il n’en parlera que très peu, ce que j’ai pu lire de la réaction d’Hemingway sur l’emprisonnement de son fils était un petit passage dans une de ses correspondances.

Ernest Hemingway durant la Seconde Guerre Mondiale. Remarquer sa ceinture ? C’est une ceinture de soldat S.S., sur la boucle est marqué Gott Mit Uns, Dieu est avec nous.

Son expérience de la Seconde Guerre Mondiale le poussera à écrire Par delà le fleuve et sous les arbres.

Puis vient les articles d’après guerres. Là aussi se produit un bon dans le temps entre les articles sur la Seconde Guerre Mondiale et ces articles. Car Hemingway décide de repartir chasser, pêcher et écrire. Il partira en safari, safari qui faillit lui coûter la vie, à lui et à sa femme, à cause de deux accidents d’avions consécutifs, qui le marqueront physiquement et mentalement. Les médias pensèrent qu’Ernest et sa femme étaient morts. Hemingway adora lire les oraisons funèbres et les articles nécrologiques.

Ernest Hemingway sur son bateau de pêche le Pilar. Ce nom vous dis peut-être quelque chose ?

Les articles d’après guerres se concentrent sur la pêche en haute-mer, près des côtes de Cuba, sur le Golf Stream, à bord de son fameux bateau de pêche, le Pilar, sur les techniques et équipements de pêche, sur la chasse et sur son grand voyage en Afrique et bien sur, un peu de Corrida. Dans ses articles, Hemingway place souvent des références à la guerre, prouvant à quel point les conflits auxquels il a assisté auront marqués son psyché.

Ernest Hemingway (avec barbe et casquette) assistant à une corrida avec son ami toréador Dominguin (à droite, cheveux brun).

Extrait de l’article Le cadeau de Noël publié dans le magazine Look entre le 20 mai et le 4 avril 1965. La scène se passe après le premier crash de son avion :

[…] Notre conversation au sujet du bidon d’eau fut interrompue par un éléphant mâle aux défenses impressionnantes, qui apparut à vingt yards de nous. Il suivait manifestement la piste des éléphants, pour aller paître le long de la crête, lorsqu’il s’arrêta pour voir notre feu de plus près. Il écarta largement les oreilles. Elles me parurent avoir soixante pieds de largeurs, mais pour avoir vu des éléphants en plein jour je sais qu’elles n’atteignent pas de telles dimensions.

Il leva sa trompe qui me parut longue de plusieurs centaines de pieds, mais je sais aussi que de telles dimensions sont impossibles. Il poussa ensuite un cri aigu très curieux et donna tous les signes de vouloir se joindre à notre groupe. Roy et moi gardâmes une immobilité silencieuse, retenant même notre souffle, et nous espérâmes sincèrement que l’éléphant se déciderait à retourner à ses affaires personnelles. […]

Extrait du même article sur son deuxième crash d’avion consécutif :

J’ouvris la portière par un coup de ma tête et de mon épaule gauche. Une fois la porte ouverte, je montai sur l’aile gauche de l’avion, aile qui n’avait pas encore pris feu, et dénombrai Miss Mary, Roy et le pilote qui étaient sortis de l’avion par une ouverture où je n’aurais pas pu passer.

Hemingway se reposant après son double accident d’avion en Afrique.

À la fin de sa vie, accablé par les problèmes physique et mentale, il se pensait surveillé par le FBI. Personne ne l’a cru. Et pourtant il avait raison.

Après plusieurs tentatives de suicides, des hospitalisions en hôpital psychiatrique, de séances d’électrochocs qu’il jugeait responsable de ses pertes de mémoires et de son incapacité à écrire comme il le voulait, il se tira une balle dans la tête.

Ses dernières paroles seront à sa femme Mary Welsh Hemingway : Bonne nuit mon petit chaton.

Hemingway posant avec le fusil avec lequel il se suicidera.

Ainsi se termine ma dernière lecture d’Hemingway et cet article très long. J’ai ajouté des photographies pour aérer l’article. Certaines choses sont peut-être hors-sujet mais j’avais tellement envie de partager ce que je savais de lui avec vous.

Le prochain livre qui arrive s’intitule How It Was, de Mary Welsh Hemingway, livre, qui comme le mentionne le titre, parle de sa vie avec Ernest Hemingway.

Jaskiers