Hier, ce fut loin. (Nouvelle)

Mon casque me tombait sur le nez, c’était chiant, avec le mouvement et la sueur, ça m’irritait le pif. J’ai l’air d’un con avec le nez tout rouge, déjà que j’ai l’air con sans rien.

Mais c’était la nouvelle drogue, la nouvelle hype ! On aimait ça, putain !

J’me rappelle plus où était le bouton pour l’allumer, devant sûrement, parce que quand t’es partie loin dans ta tête, vaut mieux que ça soit placé pas loin. Parce que c’est bien gentil de descendre mais faut remonter… malheureusement.

Souvent, je le faisais seul, c’est un truc d’addict, enfin, à ce qu’il parait. Mais j’imagine une planque de camé du casque, des types se grimpant dessus, grattant les murs, lavant les vitres avec la langue, d’autre essayant de creuser un tunnel jusqu’à Katmandou en creusant avec leurs épaules… et tout ça avec la gueule recouvert d’un casque. Mince, les autres camés ils sont calmes quand ils se sont piqués, nous, on été juste agités, heureux hein !, mais agités… intenables. Putain, combien de casqués se sont défenestrés ? Combien se sont foutus en travers des rails de trains ou de métros ? Combien se sont jetés sous les roues d’une voiture ? Combien se sont noyés ? Attends, d’autres se sont enterrés vivants !

Je peux pas t’expliquer ce qu’était vraiment le casque. En fait, si je peux, mais je ne veux pas. Car je m’en suis sortie, mais j’y suis rentré à cause d’histoires et de sensations que je voulais, et dont j’avais besoin, de ressentir. Parce que pour dire la vérité, c’était incroyable. Chaque session c’était partir quelque part, du Japon à la ceinture d’astéroïde de Saturne, du sommet de la Tour Eiffel aux Piliers de la Création ! Tu peux pas comprendre. Impossible. T’as déjà entendu parler du LSD ? De l’ayahuasca ? Et bien imagine ça, mais puissance cent… non… rajoute quelques zéros, puissance mille l’ami(e).

Même des personnes bien rangées, on en connaît tous qui fument un peu de marijuana hein ? Voir même un peu de coke par-ci par-là… et bien ces types tombaient comme des mouches sous l’effet du casque. Riches, pauvres, blancs, noirs, pauvres, riches, sur-diplômés, cancres, pilotes de chasse ou caissiers, ça prenait tout le monde, pareil. Pas de prise de tête, enfin, si, c’était un casque quoi… et puis ça te l’amener quelque part, très loin, ta pauvre tête. Une fois posé, allumé, tout le monde était logé à la même enseigne. Tiens, c’était comme un rêve lucide mais t’es réveillé. Tu comprends ?

Au début, t’écris sur tes voyages, sur tes expériences, mais ça dure pas longtemps, car tu veux y retourner le plus vite possible. Tu tiens encore un boulot, mais tu manges plus, tu dors plus, tu veux juste être en toi-même, vivre cette vie impossible et incroyable. Plus de femme, de mari, d’enfant. Il n’y avait que ce casque, ce truc mixant technologie de pointe et drogue dure, qui comptait.

Ça te détruisait ta vie physique, mais mentalement, c’était l’extase ! Les hippies ils auraient pas rêvé mieux. Et les gens tombaient comme des dominos.

Des gens sont morts de faim, de déshydratation, crises cardiaques… d’autres sont restés dans un état catatonique jusqu’à leur mort. Je vais pas vous faire la liste, ça serait trop long.

Nous, on était défoncés, mais ceux autour, ça les tuaient de nous voir comme ça. L’addiction sa touche les proches autant que le malade. Mais tout ça a dû prendre fin, heureusement. Mais, ça sera peut-être une histoire pour autrefois.

Car la vérité, c’est que je t’écris ce texte vingt ans avant ta naissance, je suis sous mon casque. Je ne connais pas vraiment la fin, pas entièrement du moins. Mais j’essaie de trouver une issue, comme je peux.

Jaskiers

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Johnny sur la route – Chapitre Final

Johnny a cette irrépressible envie de juste jeter un coup d’œil. Non qu’il aime voir des femmes uriner, mais juste parce qu’elle lui a interdit. Il se dit qu’il devrait peut-être relire Freud lui aussi.

Deux minutes passèrent avant qu’une SupraVoiture passe, ralentisse et klaxonne.

Robyn rentra rapidement dans la voiture, Johnny fut surpris et aussi, énervé par ce que le chauffeur venait de faire. Le type dans sa voiture ne s’est pas gêné et s’est même arrêté pour avoir l’opportunité d’en voir un peu plus.

« – Non, mais il est sérieux ce connard ?

  • Ah ! Celle-là s’est la meilleure ! C’est toi qui es offusqué à ma place Johnny Boy !
  • Attends… ça te fait rien ?! Cette… enflure s’est rincé l’œil sur toi, il a même le toupet de s’arrêter pour avoir une meilleure vue du spectacle !
  • J’ai jamais dit que je n’étais pas offusqué.
  • Fais quelque chose ?
  • Quoi ? Tu veux que je sorte mon calibre et que je le vide sur sa suprabagnole ?!
  • Ouai… ouai fais ça ! Je serais toi… mais comment tu peux être si calme ?! »

Robyn fouille sous son siège, sort un Glock 9 mm, et se tourne vers Johnny.

« – Tu l’aura voulu Johnny ! »

Johnny fouille dans une poche intérieure de son manteau et sort l’exacte réplique du pistolet de Robyn.

« – Si tu le fais Robyn, je le fais avoir toi. »

La jeune femme cache son calibre derrière son dos et sort de la voiture.

« – Hey chérie ! Sors, tu veux sûrement voir plus ? »

L’homme descend de la voiture et répond :

« – J’en étais sûr ! T’es une putain, c’est ça ? Vue ta bagnole, ouai… tu dois avoir des problèmes de trésorerie ma belle. Je peux te filer un coup de main. »

Robyn sort son pistolet et tire sur la voiture. Les 12 balles de son chargeur haute-capacité éclatent les vitres, les pneus et la carrosserie de la SupraVoiture.

L’homme, au premier coup de feu, s’était jeté à terre. Il tempête :

« – Mais t’es malade espèce de sa… »

Il n’a pas le temps de finir sa phrase. Johnny est sorti d’une traite de la voiture et canarde de la même manière que son amie la voiture.

L’homme est abasourdi.

« – Finis ta phrase pendant que je recharge l’ami. »

Les mots de Johnny font paniquer l’homme qui essaie de rentrer dans sa voiture mais Robyn et John tirent presque simultanément une balle dans la portière.

« – Ca va ! Ça va je suis désolé ok ? Je… j’oublie… on oublie tout ce qu’il s’est passé d’accord ? Je vais reprendre ma route tranquille. Vraiment désolé. Je… je suis pas comme ça normalement.

  • Tu dois sûrement être pire que ça ! Je crois que ta souillé ton pantalon l’ami, ça va pas faire bonne impression au bureau ! Rétorque John.
  • Ah… ça donne un air plutôt… original je trouve moi Johnny Boy ! J’veux dire, hey, pas tous les jours que t’as l’opportunité de travailler avec un mec incontinent. Je suis sûr que ça va faire tomber les filles à ses pieds !
  • Avec l’odeur, oui ça c’est sur !
  • Écoutez, je veux pas d’ennuis. J’ai vraiment été… irrespectueux et je… c’est pas simple en ce moment pour…
  • Écoute l’ami, on n’est pas des psys. Je dirai qu’on est plus des philosophes. D’accord avec ça Robyn ?
  • Oui… oui. J’aime bien, philosophe calibré. C’est une nouvelle doctrine mon bon monsieur. On canarde puis après, et seulement après avoir vidé au moins un chargeur, on philosophie.
  • D’acc… ok. Je comprends. C’est… cool. Mais je dois vraiment y aller.
  • Tu restes pas pour le débat ? C’est le moment le plus important pourtant ! N’est-ce pas John ?
  • Évidemment !
  • J’apprécie… j’y vais. Laissez-moi partir par pitié.
  • On ne vous retient pas ! Vous être libre de circuler citoyen. »

Aux dernières paroles de la jeune femme, le voyeur rentre précipitamment dans sa voiture, son pied dérape sur le bas de caisse et il finit par terre.

« – Trop d’émotion mon bon monsieur ?

  • C’est un point de vue Johnny, moi je dirai plutôt le Karma.
  • Tu crois en ça toi ?
  • Pas toi ? »

L’homme réussit cette fois à remonter dans sa voiture et repart très rapidement.

C’est ici que nous laissons nos deux nouveaux amis. Ils remontent dans la voiture tout en débattant sur le principe du Karma.

La veille voiture démarre et s’éloigne.

Le coucher de soleil enveloppé le désert d’une couleur jaune, penchant sur l’or. Après tout, le Far-West, c’est la ruée vers l’or qui lui a donné naissance. Encore aujourd’hui, l’Homme chasse l’or, de multiples formes d’or.

(À suivre ?)

Jaskiers

Johnny sur la route – Chapitre 3

Robyn tourne son visage et fixe ses yeux verts dans les yeux marron de Johnny. Cela dure quelque secondes qui paraissent un peu trop longues pour Johnny. Il a toujours peiné à regardé les gens dans les yeux, surtout quand c’était la personne qui conduisait. Il détourna son regard inquiet vers la route.

« – T’as peur hein ?!

  • Robyn, je te connais pas, des… merde… regarde la route. Je vois pas qui tu es.
  • Dommage… pour toi j’veux dire.
  • Désolé, mais regarde la route s’il te plaît merde ! »

Robyn reposa son regard sur la route, elle avait légèrement déviée de sa trajectoire et la redressa.

« – Tu fais souvent des coups comme ça ?

  • John… j’peux t’appeler John ouai ?
  • Au point où on en est.
  • John, faut vivre dangereusement, même un petit peu, ça te permet de te remémorer la valeur de la vie.
  • Oui, j’vois c’que tu veux dire. Mais c’est mieux quand on contrôle. Là, j’ai rien demandé.
  • Faut aussi apprendre à perdre un peu le contrôle.
  • Nan, là, ça tu vois, je peux pas.
  • Control freak ?
  • Carrément, et je l’assume.
  • Tu dois avoir une triste vie Johnny Boy.
  • Au contraire. Quoique… tout est question de perspective.
  • Non Johnny, tout est question de temps.
  • T’es du genre : on a qu’une vie faut en profiter ! C’est n’importe quoi.
  • Non, je suis d’accord, cette mentalité c’est pas mon truc non plus. Juste, tu ne peux rien contrôler totalement. Et la chose la plus importante, le temps, est bien la chose la plus importante que nous pouvons manipuler à notre guise. On est… une expérience.
  • T’a fumé avant de prendre le volant ? On peut pas manipuler le temps.
  • Peut-être que oui, peut-être que non.
  • D’accord, le temps, machin machin, tout est relatif, Albert Einstein, le Boson de Higgs, la théorie des cordes, la particule de Dieu, la matière noire, le nucléaire et machin machin encore machin. Je crois que le mieux Robyn, c’est juste de ne pas se poser de question. Plus tu t’en poses, moins t’as de réponse et tu finis avec encore plus de question. Y’a des types qui finissent en hôpital psychiatrique à cause de ce genre de questionnement.
  • T’es un foutu robot ?
  • Nan… c’est quoi cette question à la mord-moi le-noeud encore.
  • Le jour où tu demanderas à un robot ou une intelligence artificielle qu’elle est le sens de la vie et que la machine te répond avec aplomb une réponse qui n’est pas : je ne sais pas… Ça sera déjà trop tard.
  • Mais qu’est-ce que ça a à voir avec ce que je viens de dire ?
  • Rien… je dis juste que tu as raison. T’es perdu, tu te poses des questions, tellement que tu t’es arrêté de t’en poser et tu continues de vivre sans savoir.
  • Ouai… mais toi tu te les poses ces questions ?
  • Tu sais, l’hôpital psychiatrique, les maladies mentales, les fous comme les appellent les gens normaux… enfin la normalité c’est une question de point de vue… je disais, les malades, les schizophrènes, les dépressifs, les mégalomanes tout ceux-là. Ils sont pas dans la norme, ont les internes et ont les soigne pour qu’ils rentrent dans le moule, qu’ils travaillent et paient leurs foutus impôts et tutti quanti… mais si on prenait le problème différemment. Les schizos, moi ils me fascinent. Des hallucinations ? Des voix ? Et si au final, ils étaient des sortes de messagers ? De quoi ? J’en sais rien Johnny Boy, mais si on prenait le temps, encore le temps tu vois, si on les écoutait, je suis sûr que trouverait quelques choses…
  • Tu pars vraiment très loin Robyn. Trop même.
  • T’es pas de mon avis ?
  • Les schizos ? Tu leur dis ça, quand ils ne sont pas en crises, ils t’enverraient te faire voir. Y’a rien de plaisant à entendre des voix et voir des choses qui n’existent pas.
  • Qui n’existent pas… selon toi !
  • Non, là, là, honnêtement je ne te suis plus.
  • Tu vois, t’a peur de te poser des questions.
  • Jamais dis le contraire Robyn. Mais dans ce cas-ci, il n’y a pas de question. C’est le cerveau qui fonctionne différemment.
  • Oui et ?
  • C’est une maladie.
  • Ou un don.
  • Ok, moi j’arrête là, je ne te suis plus.
  • Tu as peur ?
  • De quoi ?
  • De remettre en perspective ta vision des choses ?
  • Il n’y a rien à mettre en perspective. Une maladie n’est pas un don.
  • La plupart des grands génies, artistes ou scientifiques, n’était pas vraiment sain d’esprit.
  • Il y a peut-être une concordance entre talent et santé psychique mais ça s’arrête là.
  • De mon point de vue, tu as tort.
  • Et du mien, tu réfléchis sur des choses qui n’ont pas lieux d’être.
  • Si tu regarde trop longtemps l’abime…
  • L’abîme regarde aussi en toi. Ça va, Nietzsche est devenu un poncif. Le supermarché de la philosophie.
  • Une idée bien arrêtée que tu as là Johnny Boy. Tu as déjà regardé l’abîme trop longtemps ou tu as peur de la regarder ?
  • À toi de me le dire.
  • Tu l’as regardé. Mais pas trop longtemps.
  • Super. Sortir Nietzsche, c’est devenu hype. Maintenant tu vas me parler de Freud ? Tu veux savoir si je suis venu à bout de mon complexe d’Oedipe ?
  • Non ! Rien à foutre. Et puis tu as dit que tu étais un meurtrier !
  • As-tu entendu parler de Kierkegaard ?
  • On dirait le nom d’un groupe de musique Suédois.
  • Mon dieu…
  • Quoi ? C’est vrai !
  • Très américain… je parie ta bagnole que si je te montre une carte de l’Europe, tu ne saurais même pas où se situe la Suède.
  • Tu m’as eu, je connais que l’Amérique. Ma bonne vielle Amérique.
  • Ta bonne vieille Amérique ? Si tu est native américaine d’accord, sinon…
  • Le bon vieux réflexe indicateur du sentiment d’infériorité de l’Européen !
  • Sans les Français, tu boirais du thé et mangerai du pudding à l’heure qu’il est. Mais ça, aucun Américain le sait. Mais je sais ce que tu vas me répondre Robyn chérie, sans nous, je parlerai allemand et blah blah blah. Sérieusement ? Les Français ont aidé l’Amérique à naître, à prendre, à gagner son indépendance. Lafayette, ça te dis quelque chose ?
  • Les galeries Lafayette ?
  • Très drôle. En attendant, en France, les écoliers ne portent pas de sacs pare-balles pour aller à l’école.
  • Tu aimes plonger la petite américaine dans les sujets qui fâchent ? D’accord. La guerre d’Algérie ? La torture ?
  • Je pourrai dire de même pour ce que vous avez fait un Irak… Abu Ghraib ?
  • Touché.
  • Aucun de nos pays n’est innocents.
  • J’en conviens.
  • Bon, j’en étais à Kierkegaard. Ça te dit vraiment rien ?
  • Non.
  • Sache qu’il n’y a pas que Nietzsche comme philosophe. Arrête de suivre ces modes internets. Il y a beaucoup plus à découvrir, par soi-même.
  • Tu me fais la leçon ?
  • C’est un reproche ou tu veux que je te parle de Kierkegaard ?
  • Tu sais quoi, j’ai bien envie d’un peu de silence ? Je dois même avoir du Simon and Garfunkel dans ma radio.
  • Les pauvres, ils y sont depuis longtemps ? C’est pour ça qu’on ne les entend plus chanter.
  • Un peu d’humour ! »

Robyn pianote sur sa radio, les premières notes de Sounds Of Silence de Simon and Garfunkel emplissent l’habitacle.

Jaskiers

Tout perdre – Chapitre 10

Ça a bataillé sec pour ces tubes. Les premiers jours ont été violents, il y a eu des morts, des estropiés. Mais cela ne dura pas longtemps. Non pas que les Sans-Riens soient revenus à la raison et décidèrent que chacun pourrait passer une nuit pour laisser sa place à quelqu’un d’autre la nuit d’après. Non, mon instinct avait raison, le Gouvernement avait bel et bien un plan, et il avait décidé de jeter l’éthique, le respect de l’être humain une bonne fois pour toutes.

C’est pour cela que vous lisez ces lignes, je m’apprête à venger les miens, à me venger moi-même. Je n’aurai pas le temps de vous dire si la vengeance est cathartique ou inutile, mais, je vous expliquerai cela plus tard, à la fin, sûrement.

Mais qu’est-ce que ces caissons nous ont-ils fait à la fin ?

Les premiers jours où les Sans-Riens avaient passé leurs nuits dans ces tubes, rien de spécial, excepté, évidemment les batailles sanglantes, ne s’était passé. Ceux qui avaient eu l’opportunité de passer quelques nuits à l’intérieur étaient heureux, et encore plus déterminés à garder ce privilège pour leur petite personne.

Ce n’est qu’au bout de deux semaines que les choses prirent une tournure que je qualifierais de crime contre l’humanité.

Les privilégiés disparurent. Tout le monde savait qui dormait dans un caisson, ces personnes étaient devenus des chef(fe)s, des leaders, des personnes que certains admirés, à qui beaucoup léché les bottes pour, peut-être un jour, avoir la chance de passer ne serait-ce que quelques minutes dans ces engins. C’était aussi dangereux d’en être propriétaire, les démunies suivaient ces privilégiés, tentant parfois de leur trancher la carotide, de les piéger, pour prendre leur place.

Et une nuit, les caissons s’ouvrirent d’eux-mêmes sans aucune âme à l’intérieur.

Vous pourriez penser que ce n’était qu’un événement anodin, mais laissez moi vous expliquer pourquoi ça ne l’était pas.

Tout d’abord, un Sans-Rien quittant cet abri de luxe, en plein milieux de la nuit, sans que personne ne le voit, été impossible. Comme je vous l’ai expliqué, les caissons attiraient la convoitise de tout le monde. Plusieurs personnes étaient autour, quelqu’un aurait vu l’occupant sortir. Une information qui paraît anodine mais dont vous vous êtes sûrement fait la réflexion à l’instant, il y avait possibilité de faire ses besoins naturels dans le tube. Le caisson, rappelez-vous, a une hauteur de près de deux mètres et quarante centimètres. Même s’il fallait une certaine souplesse, il suffisait d’ouvrir un hublot qui cachait un bidet et faire vos besoins. Donc non, personne n’avait à sortir du tube pour quoi que ce soit.

Mais ce n’est pas là le meilleur argument pour prouver que cette situation était étrange, la meilleure, c’était que toutes les personnes qui avaient dormi cette nuit-là, dans le caisson avaient disparu.

Aucune trace de leur présence. Les propriétaires avaient aménagé à leur grès l’intérieur de leur havre. Certains, surtout les leaders de gang, avaient gravé ou tagué leurs initiales ou les symboles de leur clan à l’extérieur et à l’intérieur de leur possession.

Mais en une nuit, c’était comme si le caisson, à l’intérieur, n’avait jamais accueilli quelqu’un. Tout était propre, sans gravure ni graffiti, pas d’effets personnels. Ils s’étaient évaporés.

Jaskiers

Tout perdre – Chapitre 8

L’impact est violent, les flics et les Sans-Riens se mélangent dans une bataille au corps-à-corps, c’est une bataille homérique qui fait rage.

Vous prenez quelques coups, dans la tête, les côtes, les bras et parfois les jambes. Mais vous ne vous arrêtez pas, la fuite, c’est votre but. Savoir qui vous a frappé et rendre les coups signerait votre arrêt de mort.

Vous sentez l’air du dehors, il est frais, ça change de l’air vicié que vous avez respiré jusqu’ici dans le camion-cellule et le hangar.

Il fait nuit, mais les grandes lumières donnent l’impression qu’il fait encore jour. Vous continuez à avancer dans la mêlée. Votre équipe gagne du terrain, certains ont eu la même idée que vous. Ils vous dépassent, une bonne chose, car les flics se concentreront sur eux en premier et cela vous donnera plus de temps et d’opportunités pour trouver le moyen de vous enfuir.

Ça pétarade encore, des corps tombent, vous trébuchez pour vous relever immédiatement. Les yeux aux aguets. Des tours de guets, des explosions, un grillage surmonté de barbelé électrifié, ceux qui vous ont dépassé se jettent dessus, leur corps tressautent avant qu’une fumée et que les flammes les consument. Certains cochons sont projetés dessus, cochons grillés.

Puis, une explosion plus forte que les autres, la foule belligérantes vous entraîne inévitablement vers le grillage. Vous serrez les dents quand vous le touchez. Rien ne se passe. La pression de la foule pleine de rages est tellement forte que vous êtes plaqué contre cette barrière qui cède.

Vous tombez, des gens tombent sur vous, trébuchent, vous piétinent. Utilisant la force du désespoir, la liberté étant toute proche, vous forcez sur vos bras, réussissez à vous dégager et vous courrez. Encore et encore. Des corps tombent raide mort devant et à côté de vous, vous slalomez, et utilisez votre adrénaline pour la dernière ligne droite. Une forêt, cette nature qui brûlait il y a quelques années est maintenant votre refuge.

Après vous êtes profondément enfoncé dedans, vous vous arrêtez, épuisé. D’autres survivants apparaissent, certains décident de se regrouper pour continuer leur fuite, l’union fait la force. D’autres repartent seuls. Des cochons sont à vos trousses mais ils ne connaissent pas la nature comme un Sans-Rien la connaît. Vous profitez du terrain pour vous camoufler, grimper dans un arbre, sous des racines, dans des buissons. Puis, après avoir attendu la nuit, vous avancez jusqu’à retrouver un bon paquet de survivants avec la même connaissance de la survie que vous.

Et vous voici libre.

Si vous avez besoin, ou envie, je ne sais pas quel est le terme approprié, des ami(e)s qui n’ont malheureusement pas pu s’échapper et qui ont survécus vous écriront leurs histoires. Ma connaissance de l’univers carcéral du Gouvernement Unie s’arrête à cette évasion. J’ai eu la chance de réussir à m’enfuir, et je m’apprête à venger mes amis, mais je vous expliquerai cela plus tard.

Revenons à la vie dans la jungle urbaine.

Le Gouvernement Unie, qui semblait nous délaisser, envoyé parfois quelques missionnaires pour essayer de nous remettre sur le droit chemin.

Ce n’était pas un travail facile pour eux, beaucoup avaient l’audace de rentrer dans des squats ou des repères de Sans-Riens. Et ils repartaient avec un nez cassé, des ecchymoses partout sur le corps, des dents en moins, un œil au beurre noir et, s’ils avaient eu l’excellente idée de venir avec des objets de valeurs, voir des objets pour nous appâter, ils ressortaient culs nus.

Je ne sais comment ces gens ont été recrutés, et encore moins comment ils ont été convaincus de faire ce sale boulot.

À ma connaissance, jamais de Sans-Riens n’ont accepté de revenir dans les rangs grâce à ces pauvres agents.

Toujours est-il que le Gouvernement Uni n’a jamais baissé les bras et a décidé d’utiliser la technologie pour nous ramener dans ses filets.

Jaskiers

Tout perdre – Chapitre 5

Est-ce que je regrette d’avoir agressé des gens, des jeunes, des vieux ? Non. La nouvelle société ne m’a pas donné le choix. Je n’aime pas que les gens disent que la vie est une question de choix. Est-ce vraiment un choix si l’autre option est la mort ? Le suicide allait à l’encontre de mes prérogatives sur la vie, je ne considérais pas que m’ôter la vie était quelque chose de normal, d’acceptable. Je n’ai pas eu le choix. Même si au final, j’ai trouvé une porte de sortie, qui m’a fait reconsidérer le suicide. Mais les gens qui n’ont pas la force de mettre en perspective le fait de s’ôter la vie, pas la force ou simplement parce qu’ils veulent vivre, eux, n’ont pas de choix.

Je n’ai pas tué, ou du moins pas que je le sache. J’ai laissé pas mal de personne en sang dans mon parcours de Sans-Riens. J’ai bastoné, tailladé, poignardé, assommé pour rester vivant. Enlevé un peu de l’espérance de vie d’autre pour en ajouter à la mienne.
La faim, la soif, le froid, la chaleur, les tempêtes et ouragans, les autres truands, tout cela a poussé mon instinct de survie à un point de non-retour. J’avais dit adieu à la vie normale, j’allai vivre, comme je le voulais et comme je le pouvais,un point c’est tout.

Le Gouvernement Mondial, pour contrer la montée de violence des Sans-Riens, nous n’étions pas désignés comme sans-abris mais des Sans-Riens, devenait un problème important pour l’avenir et les projets grandioses de conquêtes de l’Espace. Des unités de police spécialement formées ont commencé à essayer de faire régner l’ordre. ‘Spécialement formée’ était le terme appliqué à ces unités, mais encore aujourd’hui, ce terme reste vague. Ont-ils été entraînés spécialement pour réprimer les Sans-Riens ? Et si oui, quel type de formation ont-ils dû passer ?

En-tous-cas, ces officiers ont dû apprendre à manier la tonfa électrique et le flashball électrisé dans leur cours.

Ils arrivaient souvent en retard après une agression. Nous, les voleurs, connaissions la ville et ses rues, ses égouts, ses ponts, ses planques. Eux non. Leurs véhicules blindés, car oui, il leur fallait des véhicules blindés pour mater les désœuvrés, étaient bien trop lents pour arriver à temps après une de nos aggression.

Là où ces Messieurs Dames étaient les meilleurs, c’était quand il s’agissait de repérer nos attroupements, car nous nous réunissions parfois pour s’échanger des tuyaux, des bons coups, et même, pour partager et échanger un peu nos maigres possessions.

Durant ces moments, ils nous tombaient dessus par surprise.

D’abord, nous recevions les projectiles de leur flashball, qui non seulement nous percutaient violemment mais lâchaient des décharges électriques. Si vous étiez touché, vous ne pouviez presque plus bouger. La douleur était terrible, mais sentir son corps ne plus réagir vous mettez dans un état de panique terrible.

Durant ces rassemblements, nous étions parfois plusieurs centaines. Parfois dans un parc, dans des étages de buildings inoccupés, dans des quartiers mal famés, dans de vieux quartiers résidentiels abandonnés car devenu dangereux à cause des catastrophes naturelles, voilà où se passaient nos réunions de Sans-Riens.

Nous avons vite compris qu’il y avait des mouchards et des balances parmi nous, mais nous ne faisions rien tant que nous n’avions pas de preuves concrètes de la collaboration d’un individu avec ces Cochons, le nouveau surnom des flics. Nous ne voulions pas recréer ce système où un simple doute pouvait mener un homme ou une femme à perdre la vie. Car oui, quand nous avions des, ou une, preuves concrètes de la trahison d’un des nôtres, la mort était la sentence. Mais pas une belle mort, nous devions faire passer un message à tous ceux qui voulaient se retourner contre-nous ou nous infiltrer. La torture, l’humiliation, la mise à mort, tout était planifié pour terroriser ces lâches. Je n’exposerai aucun exemple de ce que nous faisions subir à ces personnes. Là aussi, j’ai participé. Je n’en suis pas fier, là non plus, mais c’était quelque chose qu’il fallait faire pour le bien de tous, pour survivre.

Jaskiers

Tout perdre – Chapitre 4

Pourquoi n’ai-je donc pas cherché un autre travail ? J’ai tout simplement compris comment fonctionnait cette nouvelle société. Il n’est pas difficile de voir que nous sommes retombés dans nos vieux démons. Il faut à l’être humain, à une société, quelqu’un à détester, quelqu’un qui est tout le contraire du bon citoyen, qui n’a pas sa place. L’Utopie n’est qu’un mensonge, personne ne peut être totalement heureux dans une société ou, en-tout-cas, pas tout le monde. Pour l’être collectivement, il nous faudrait ne plus avoir de conscience, pas de libre-arbitre, être des robots. Et c’est bien par là que cette se société dirige, car un robot a pris mon travail, et personne ne me plaint.

Je ne cherche pas à être plaint, j’ai choisi de m’écarter de cette société. Je n’avais pas la force de lutter. De lutter pour revenir dans les rangs, comme un bon soldat, un citoyen model. Ce n’était pas le genre de vie que je souhaitais quand l’humanité a osé se regarder en face et décide qu’il fallait un changement radical pour continuer à vivre.

Le problème vient peut-être de moi, nous ne sommes pas forcément faits pour être dans le moule que la société veut nous imposer.

Et j’ai réalisé que beaucoup de personnes s’étaient retrouvées sans rien, comme moi.

J’ai vécu jusqu’ici dans la rue. J’ai vécu avec ceux que je haïssais, comme les gens me haïssaient maintenant. J’étais une bouche de trop à nourrir. Enfin, pas totalement sans ressources, non, une association du Gouvernement Mondial nous venait, très sporadiquement, en aide. Nous pouvions voir que ces gens voulaient nous aider, faire beaucoup plus. Mais ils étaient limités car surveillés de près. Trop nous donner d’attention, de nourriture, de refuge, d’aides en tout genre pouvait se retourner contre eux. Gâcher du temps à aider ceux qui n’ont rien au lieu de travailler pour le projet spatial commun était mal vu. Ces bons samaritains risquaient beaucoup, leurs vies confortables en fait, juste par le fait de nous donner une bouchée de pain.

Il fallait s’entendre avec les autres démunis, apprendre la débrouille. Et surtout, une chose que je n’aurai jamais imaginé faire de toute ma vie, mener une vie de truand.

Voler, agresser, intimider les honnêtes gens étaient essentiels à notre survie. Vous ne pouviez pas faire la manche sur le trottoir, illégal. Et ceux qui donnaient étaient accusés de dépenser de l’argent qui devait servir à alimenter le projet spatial. Nous n’étions pas les bienvenus, plus vraiment humains, donc pas étonnant que nous devenions des chiens galeux prêts à tuer pour quelques centimes.

J’abhorrais faire ça, je n’étais pas bon à la violence, j’ai dû me faire une raison, me fabriquer une carapace, un nouveau moi, un monstre.

Mais c’était le seul moyen de vivre. J’ai pensé au suicide, mais au fond de moi, j’avais cette petite voix qui me disait qu’un miracle pouvait advenir si je survivais jusqu’à demain. C’est l’espoir, vraiment, qui m’a fait vivre.

Jaskiers

Tout perdre – Chapitre 2

Une dernière lueur d’espoir est apparue quand l’Afrique est devenue le continent le plus sûr. Pas de catastrophes écologiques notables, faune et flore intactes. Ainsi la population mondiale s’est dirigé vers ce continent, là où l’Homme est née, un exode. Assez important pour réaliser, un peu tard, que l’humanité avait laissé l’Afrique de côté depuis tout ce temps, et maintenant, des gens de tout pays y affluaient pour avoir une place dans le dernier Eden de la planète Terre.

Cela bouscula le continent Africain, des tensions amenèrent à des conflits armées, les africains, délaissés depuis des siècles, se voyaient maintenant envahir par toute la planète.

L’économie s’effondra également. L’Afrique eut à subir le choc, le sursaut de désespoir de l’humanité.

Mais, chose improbable, il fallait y être pour le croire, nous nous sommes arrêté de nous entretuer, quelque chose de fort était apparue en nous, comme une sorte d’instinct. Ce dernier a surgit pour éviter notre autodestruction. Si nous continuions à nous entretuer, aucune chance de vivre, de survivre, était en perspective. La planète était déjà en révolution, pas besoin d’amener le grain de sel humain pour réduire à néant nos espoirs.

Nous étions tous dans le même bateau. Et ce fut cette prise de conscience qui changea tout. Peut-être est-elle arrivée tard, mais elle est arrivée à un moment charnière de l’humanité. La chose était simple : soit on s’unissait malgré nos différences, soit on continuait sur la voie de la dissonance qui nous mènerait à une extinction pure et simple.

Nos regards se sont posés sur les étoiles, avec un, voir des, espoirs que nous pourrions recommencer à zéro sur une autre planète.

Mais pour cela, pour mener à bien un projet spatial solide, il nous fallait déjà regarder à nos pieds, essayer de réparer, de rattraper les dommages faits à notre planète.

Il a fallu de l’abnégation, des leaders, pour essayer de limiter les dégâts et réparer ce qui pouvait l’être.

Il serait trop long d’expliquer chaque changement, chaque petite révolution, positive et non-violente, qui nous a permis de pouvoir rester sur Terre. Nous avons apaisé notre terre.

Certaines catastrophes se reproduisaient, beaucoup de mal avait été déjà fait, il nous a fallu nous adapter. Notre espèce a une capacité incroyable d’adaptation, nous avons des ressources en nous qui ressortent aux moments les plus cruciaux. Et bien sûr, nous avions l’espoir.

Les changements, prit d’un commun accord avec chaque pays, chaque gouvernement, ont permis à notre espèce de survivre, et de renaître rapidement de ses cendres.

Et puis, nous avons mis les bouchées doubles en matière de technologie. Tout le monde travaillait dans ce domaine. Nous en avions besoin. Nous sommes des créateurs géniaux. Et quand nous nous concentrons sur une tâche, collectivement, des choses incroyables arrivent. C’en est presque magique tellement le changement peut-être rapide quand nous sommes tous sur la même longueur d’onde.

La robotique a fait une avancée incroyable. C’est simple, les robots ont été utilisés pour les tâches les plus difficiles, rébarbatives, épuisantes, donnant ainsi plus de mains d’œuvre pour notre projet : soigner du mieux possible la planète Terre et conquérir l’Espace.

Avant que la Terre ne se rebelle contre nous, j’étais simple commercial pour une société produisant des applications pour smartphone. Je gagnais très bien ma vie. San Francisco, la Silicon Valley, était l’endroit idéal pour ma carrière. Mais c’était aussi, et reste encore, l’endroit où la fameuse faille de San Andreas pouvait réduire en miettes la côte Ouest. De terribles tremblements de terre nous ont touchés.

Ce n’est que par un concours de circonstances que ma famille et moi avons trouvé refuge dans un de ces bunkers spécialisés « doomsday » appartenant à un milliardaire ayant fait fortune en Californie durant le grand déluge.

L’ami d’un ami de travail connaissait quelqu’un qui pouvait nous trouver une place dans ces bunkers sous-terrains ultra sophistiqués.

Quand l’humanité a décidé de s’unir, nous appelons cette époque La Grande Union, il me fallait trouver ma place dans ce nouveau monde. Que faire quand on est un simple commercial dans un monde où les ingénieurs de tout bord, les scientifiques, les programmateurs, les physiciens et astrophysiciens étaient les piliers indispensables à notre redemption ?

Jaskiers

Félicitations ! Vous avez été choisis pour…

Harry avait reçu l’un de ces mails, que nous considérions, nous, ses ancêtres, comme un spam ou une mauvaise blague, mais à l’époque futuriste d’Harry, c’était on ne peut plus vrai.

« Vous avez été sélectionné pour séjourner une semaine dans l’espace ! »

Autant vous dire que Harry aurait préféré rester les pieds sur la bonne vielle planète Terre. La société du milliardaire Elon Besoz sélectionnait, au hasard, une personne chaque année pour aller séjourner sur la Lune. Pourquoi ? Parce que le millionnaire l’avait décidé ainsi il y a quelques décennies. Et pour vous mettre dans l’embarras, cette société n’hésitait pas à rendre publique votre sélection.

Évidement, certaines personnes auraient vendu leurs parents pour marcher sur la Lune. Et le richissime Elon avait des aficionados qui buvaient chacun de ses mots et acquiesçaient à chacune de ses décisions. Même après sa mort, il était perçu comme un demi-dieu.

Harry, lui, n’en avait que faire de la Lune. Depuis près de 50 ans, ce voyage vers la Lune, qui se déroulait une fois par an pour un pauvre bougre, était devenue ennuyeux à ses yeux. Il avait 22 ans, née en plein milieu de ce phénomène de tourisme spatial.

Pour nous, les ancêtres d’Harris, le tourisme spatial n’en est qu’à ses balbutiements. Pour lui, c’est une chose normale, rentrée dans les mœurs. On ne va plus en vacances au bord de la mer ou à l’étranger, mais sur Mars. On navigue dans les anneaux de Saturne, on observe les trous noir depuis des vaisseaux de vacanciers, on ne les traverse pas encore, ce n’est pas faute d’avoir essayé pourtant. Personne n’ai jamais revenu de ces trous noirs, des animaux puis deux hommes ont franchi un trou noir, aucuns n’est jamais revenus. Le mystère plane encore autour d’eux.

« Félicitions Harry Bertimore ! Vous êtes l’heureux gagnant du tirage au sort planétaire, vous voici détenteur de votre ticket pour un séjour sur la Lune d’une semaine ! »

Harris ne lu pas le mail entièrement. Il referma sa boîte mails, qui avait remplacé nos boîtes aux lettres actuelles depuis une centaine d’années, lorsque son téléphone portable, qui n’était rien d’autre qu’une puce implantée dans une main et que l’on activait par un simple toucher de la paume, se mît à émettre un son de notification. Puis un deuxième, un troisième. Ça ne s’arrêtait pas.

Il darda un coup d’œil pour savoir qui étaient les auteurs de ses messages.

Deux amis, son petit frère et un message vocal de sa mère.

Il ferma sa main droite contenant la puce téléphonique, geste qui consiste à éteindre son téléphone de nos jours.

Le jeune Harry resta planté sur sa chaise (qui n’avait pas de pieds, mais flottait doucement), il allait falloir dire à Space Kicks qu’il refusait leur voyage, une première dans l’histoire. Sa photo, ses informations, étaient déjà étalées sur l’UltraWeb, notre internet actuel, sauf que cet Ultraweb consistait en la même chose qu’avec le téléphone, une puce, dans la mains gauche dans le cas d’Harry. Ouvrez votre main et internet s’affiche de manière holographique devant vos yeux. Et uniquement les vôtres.

Toute la planète le connaissait maintenant, sans le vouloir, sans le désirer. Il allait être la cible de nombreux jaloux, des médias et de l’humanité toute entière.

Le monde allait le traiter comme un paria, un être ingrat, irrespectueux, mais jamais il ne quitterait la planète Terre. Pourquoi aller sur la Lune quand il n’était jamais sorti de son pays ? Rien n’était original dans ce voyage sur la Lune, car il était estimé que 2 personnes sur 5 avaient déjà visité la Lune et sa face sombre.

Il ouvrit sa main gauche, ouvrit le réseau social en vogue, FaceIntra et posta : « Je donne ma place pour le voyage sur la Lune. Premier arrivé, premier servit. »

Il reçut tellement de notifications qu’ils lui donnèrent le vertige. Il ferma son poing. Les notifications explosaient dans ses oreilles, il avait fermé l’IntraWeb mais les notifications continuaient à lui vriller les tympans. La technologie avait encore des bugs à cette époque, liés principalement à la difficulté de fusion entre corps humain, organique, et la technologie. Plus d’écran bleu, mais des décharges et des sons stridents se propageant dans tout votre corps. Le progrès !

L’envie d’arracher ces puces, ces « BioTechImp », lui vint, et ce n’était pas la première fois.

D’inquiétante enquêtes faites par des « anciens », surnom donné à ceux qui refusaient les implantations et ce, peu importe leur âge, ont révélé les secrets de ces centaines d’entreprises créant ces petites puces de très hautes technologies. Ils avaient découvert que des « programmes expérimentaux » avaient été installés dans ces petites perles de technologies. Ces programmes expérimentaux consistaient à récolter et à tester des « logiciel » permettant de « lire » dans les pensées et il y aurait même eut des logiciels expérimentaux amassant des datas dans le but prochain de pouvoir contrôler un corps « pucé ».

Les médias se sont faits les relais de ces enquêtes, sérieuses et minutieuses, mais des philosophes, des scientifiques, médecins et autres commentateurs ont accusé ces « anciens » d’être des adeptes de la théorie du complot, des ennemis du progrès et du futur.

Toujours est-il que Harry était devenu de plus en plus anxieux et sceptique envers cette technologie. Très peu de personne vivaient sans implants. Si l’on devait comparer à aujourd’hui, ne pas avoir de « puce » serait comme ne pas avoir de téléphone (smartphone ou fixe).

Perdu dans ses doutes, plongé dans une anxiété terrible et les sonneries incessantes, le jeune homme entendit des tambourinements dans sa porte. Croyez-le ou non, les portes non pas vraiment évoluées. Des accidents avec des portes blindées s’ouvrant automatiquement à votre passage à une vitesse incroyable a écarté la technologie des portes. Qu’elles ont été ces incidents ? Des membres écrasés, des corps décapités. Des hackeurs avaient trouvé le moyen de les contrôler et… de tuer.

Vous vous demandez peut-être si les implants, les « puces », pouvaient être hackés ? C’était possible. Et autant vous dire que certaines victimes de piratage se sont suicidées. Imaginer que quelqu’un prenne le contrôle de tout ce que vous pouvez voir, toucher ou entendre, projeter ce qu’il veut à vos rétines et enregistrer tout ce que vous faite ?

Enfin, Harry s’approcha de la porte à tâtons.

« – Harry ouvrez !

  • Je… ne suis pas intéressé par la Lune.
  • Nous non plus !
  • Partez !
  • Non, nous pouvons vous aider !
  • Qui êtes-vous ?
  • Des « anciens ».
  • Et que me voulez-vous ?
  • Vous aider.
  • Comment ?
  • L’expliquer derrière une porte ne va pas être chose aisée, ni discrète. »

Harry qui ne recevait jamais de visiteur senti en son for intérieur qu’il lui fallait ouvrir et voir ce que pouvait lui proposer les « anciens ». Qu’avait-il à perdre ?

Il ouvrit et vit une jeune femme, deux hommes, un dans la trentaine et l’autre, plus vieux, dans la soixantaine. Ils rentrèrent sans se faire prier.

Puis, des lumières bleues et rouges émirent leurs lumières par les fenêtres.

« – Harry, il va falloir être courageux.

  • Vous êtes des flics !
  • Non, mais eux dehors oui. Je suppose que l’on a été suivis. Suivez-nous, ne doutez pas, obéissez jusqu’à ce que nous soyons hors de dangers
  • Putain, mais j’ai rien demandé.
  • Justement, vous êtes une victime ici, laissez nous vous aidez.
  • J’ai plus rien à perdre, allons-y. » Répondit Harry, dépité.

La jeune femme, celle qui était l’interlocutrice de Harry, sortit un vieux calibre, nos calibres du présent.

« – Une porte de sortie par l’arrière ?

  • Oui.
  • Ils ne doivent sûrement pas le savoir, enfin pas encore. Prenons-les de vitesses. Vite. »

La petite troupe sortit par la porte de derrière. Et ils s’enfoncèrent dans la ville tentaculaire, au loin, une forêt et quelque part au milieu, un refuge. Du moins, c’était ce que le jeune homme pensait. Les gens réfractaires à la technologie vivent dans la nature n’est-ce pas ? C’était ce qu’il avait vue à la télévision en tout cas.

La vie d’Harry avait basculé à jamais, sans n’avoir rien demandé. Rien ne change entre son époque et la nôtre, parfois, nous n’avons pas le choix, ou bien, ce choix est une mascarade. La vie a en réserve une bonne dose de mauvaise surprise. Et elle en a plus que des bonnes, de ces mauvaises surprises. Malheureusement.

Bonne chance Harry !

Jaskiers

Notifications

« Bonjour, comment vas ?! »

Arnold prends sont téléphone, son smartphone à vibré, un message pense-t-il.
Non, une note, écrite dans l’application bloc-notes.

« Surprise Arnold !

Qu’est ce qui se passe hein Arnold merde ! »

Arnold déverrouille son téléphone et tombe sur une interface totalement inconnue.

« Tu connais pas Arnold ? »

Les messages écrits sur l’application bloc-notes continuent de s’afficher, aucun moyen de répondre.

Arnold essaie d’éteindre son portable.

« Ça marche pas l’ami !

Il y a tellement de choses intéressantes sur ton téléphone ! »

Arnold ouvre l’application bloc-note. Tape sur le clavier numérique. Rien ne s’affiche.

« Hey Arnold, pas besoin de m’écrire, je peux t’entendre et te voir ! »

Arnold cache la caméra de son téléphone.

« Enlèves ta main ! »

Arnold ne l’enlève pas.

« Cadeaux ! »

Le téléphone émet un cri strident.

« Ça tape hein ?

N’essaie rien de fou. »

Arnold essaie d’éteindre son téléphone.

« Inutile l’ami. Si tu as la bonne idée d’essayer de casser ton téléphone je lâche tout ce que j’ai trouvé sur toi sur tes réseaux sociaux. »

Arnold reste coi.

« Tu te demandes qui je suis sûrement ? »

Arnold acquiesce.

« Tu crois vraiment que je vais te le dire ? »

Silence de Arnold.

« Bon, j’ai vu pas mal de chose qui pourrait rendre tes parents malades ! »

Avec determination, Arnold ouvre son téléphone et regarde la nouvelle interface. Tout n’est que charabia et code.

« Tu comprends quelque chose Arnold ? »

Le jeune homme murmure un « non » presque inaudible.

« Je te l’expliquerai bien mais honnêtement, cela prendrait beaucoup trop de temps. 

Tu dois te demander ce que je fiche ici ? »

Arnold acquiesce de la tête.

« Je pouvais entrer, je l’ai fais. Je n’ai rien contre toi particulièrement, je m’amuse, je m’occupe. »

Le jeune homme pose son téléphone sur l’écran, il ne peut plus lire les messages qui s’affichent.

La voix de l’IA du smartphone retentit :

« Ah ! Pauvre Arnold ! Décidément, la technologie ! Que ferait-on sans ! Et qu’est-ce que nous pouvons faire avec ! Moi je hack, et toi hey bien… on le sait tout les deux maintenant.

Tellement de secrets dans un si petit appareil. Nos parents avaient peut-être des boites à chaussures sous le lit ou d’autres planques, regardes-nous, la technologie, cette révolution qu’est internet ! Maintenant, ces secrets ne sont même plus matériels ! Perchés dans le cloud ! Et à la merci d’entreprises véreuses ou de personnes comme moi, qui touchent leur bille en informatique comme on dit ! Tu est toujours là Arnold ? »

Silence.

« Arnold si tu ne répond pas, je pourrais envoyer quelques photos compromettantes sur le groupe d’échange de mail collectif de ton lycée… »

Oui, je suis là, dit Arnold.

« Bon, je vais pas te torturer plus longtemps. La plupart des hackers ne sont pas des viles personnes, je voulais juste te montrer à quel point on peut être vulnérable avec tout objet connecté. Protèges ton téléphone dorénavant d’accord ? »

Silence

« Arnold ? »

Oui.

« Tu as compris ce que je viens de te dire ? »

Oui.

« Protèges toi ! Enfin ton téléphone je veux dire. Et puis aussi… enfin je vais pas te faire de dessin tu comprends ? »

Oui.

« Relaxe, je vais partir, je n’ai rien garder de tes secrets, je ne suis pas un monstre. Fais attention. Toujours. »

D’accord.

Le portable vibre.

Arnold le retourne, ouvre son téléphone. Tout a été remis comme avant.

Jaskiers