Génération Perdue #13 |Au-delà, la mort cueille et accueille.

Dessin inspiré par la photographie ci-dessous :

« La guerre m’a endurci. Je regardais cette tranchée pleine de nos morts ; et c’était tout. Ni pitié, ni peur d’être bientôt mort à mon tour, ni même colère ou haine contre ceux qui les avaient tués. À présent, je n’étais qu’une machine, un élément ou un pion dans cette guerre, un soldat qui faisait de son mieux pour remplir sa mission. Une seule règle dans cette guerre : tuer l’autre avant qu’il ne me tue. »

Alfred Pollard, sous-officier britannique de l’Army Service Corps. Cité dans « Les tranchées de l’Ancre » de Daniel Wintrebert.

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Génération Perdue #12 |Un au-revoir est un adieu

« 5 août 1915, à mon petit Armand,

Tu es encore bien jeune [quinze mois] et ne peux comprendre ce qui se passe en ce moment: la guerre, ses horreurs, ses souffrances. Cette carte sera un souvenir de ton père, et il souhaite qu’à l’avenir les hommes soient meilleurs, et que semblable chose ne puisse plus arriver. Que jamais tu n’aies besoin, et soit forcé, de mener la vie que je subis en ce moment en compagnie de beaucoup de papas qui ont laissé, comme moi, de petits anges chez eux. […] »

Lettre de Joseph Thomas, mort 8 mois après avoir envoyé cette lettre, à Verdun. Extrait recueillit dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno

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Génération perdue #11 | Est-ce le cœur qui est de plomb ?

« Barrès a eu et a su exprimer ce que je ressentais depuis longtemps : « Je peine à comprendre qu’un jour de bataille soit en même temps un beau jour paisible d’octobre et que tout y soit pareil aux après-midi ordinaires d’automne, sauf que des petites choses dangereuses voltigent dans l’air. » Lettre du Poilus Maurice Maréchal, 1915.Recueillie dans « Paroles de Poilus » de Jean-Paul Guéno.

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Génération Perdue #10 | Partir pour nul part.

« 6 septembre 1916

Mercredi soir

Ma chère mère,

Je t’envoie quelques lignes des tranchées où nous sommes depuis dimanche soir. De la boue jusqu’à la ceinture, bombardement continuel, toutes les tranchées s’effondrent et c’est intenable, nous montons ce soir en première ligne, mais je ne sais pas comment cela va se passer, c’est épouvantable. Nous avons déjà des tués et des blessés et nous avons encore deux jours à y rester. Je donnerais cher pour être loin d’ici. Enfin espérons quand même. Adieu, et une foule de baisers de ton fils qui te chérit.

Gaston [Biron] »

Lettre recueillie dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno.

(Dessin réalisé sur IPhone)

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Génération Perdue #9 |Machines à mort(s)

« […] partout, on se heurte aux machines. Ce n’est pas homme contre homme qu’on lutte, c’est homme contre machine. Un tir de barrage aux gaz asphyxiants et douze mitrailleuses, en voila assez pour anéantir le régiment qui attaque. […] On enlève une, deux, trois tranchées, et on en trouve autant derrière. » Lettre du Poilus Michel Lanson, juillet 1915. Recueillie dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno.

(Dessin réalisé sur IPhone)

Génération Perdue #8 | En avant, c’est disparaître.

« […] les cadavres à moitié enterrés montrant, qui un pied, qui une tête ; d’autres, enterrés, sont découverts en creusant les boyaux. Que c’est intéressant la guerre ! On peut être fier de la civilisation ! » Lettre du Poilus Pierre Rullier, du 26 juillet 1915. Recueilli dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno.

Création inspirée par cette image :

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Génération Perdue #6 | À qui se vouer quand même le ciel veut vous tuer ?

« Mes nerfs crient et se froissent à certaines imaginations et dans mon chaos, je ne trouve de causes et de raisons à mes souffrances que le besoin de jouir et de paraître chez mille qui ne sont point à la peine. Et si je refuse de souffrir pour leur donner des honneurs ou de la joie, des richesses et des maîtresses jeunes, jolies et parfumées, je ne suis pas austère pour agréer l’attente de ces maîtres, et j’ai l’estomac trop vide. Je suis trop sale et j’ai trop de poux. Je ne peux croire que c’est le fumier qui fait la rose – et que notre pourriture acceptée par le camp et la tranchée, que notre révolte, que notre douleur feront de la justice ou du bonheur. Et quel égoïsme de dire à son frère : tu mourras pour que je sois heureux ! N’est-ce pas là toute la guerre et ce calcul n’est-il pas le squelette effarant qu’on cache sous les oripeaux d’honneur, de devoir militaire, de sacrifice ?

Chaque putain de guerre représente les milles douleurs de celui qui la porte, mille morts de ceux que le combat a fauchés, et les milles jouissances des ventres et des bas-ventres de l’arrière. Voilà ce qu’elle crie cette putain de guerre : Celui qui me porte est un naïf qui croit que les mots cachent des idées, que les idées feront du bonheur, et qui n’a pas vu quelles bacchanales son dévouement permettait derrière le mur formidable des discours, des proclamations, des compliments et de la censure. […]»

Henri Aimé GAUTHÉ, Poilu. Écrit recueillit dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno.

(Dessin réalisé sur IPhone)

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Génération Perdue #5 | L’enfer, c’est un pas en avant.

« […] par ces temps de pluie, les terres des tranchées, bouleversée par les obus, s’écroulent un peu partout, et mettent au jour des cadavres, dont rien, hélas, si ce n’est l’odeur, n’indiquait la présence. Partout des ossements et des crânes. Pardonnez-moi de vous donner ces détails macabres ; ils sont encore loin de la réalité. » Lettre écrite par Jules Grosjean, Poilus. Lettre recueillie dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno.

(Dessin réalisé sur IPhone)

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Génération Perdue #4 | Tant de questions dans ce désert de dévastation

Ce dessin a été inspiré par cette photographie :

(Dessin réalisé sur IPhone)

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Génération Perdue #3 | Entre l’ouragan et l’accalmie.

« Situation militaire inchangée, ouragan de fer et de feu dans l’atmosphère. Secteur effroyable, théâtre de continuels engagements, chaque jour attaques acharnées dans l’un ou l’autre camp. Le spectacle est unique, tragique, magnifique, la nuit, l’univers est embrasé, le bruit fantastique et terrifiant. Le corps tremble, des émotions vives et soudaines transpercent le cœur comme une flèche aiguisée, l’âme affolée erre dans un enfer et dans un anéantissement se recommande à Dieu.

Ce n’est pas gai, mais la fournaise éteinte, le ciel apaisé, les Titans fatigués, le calme rétabli, la bonne humeur reprend ses droits […] »

‘Cousin Pelou’ dans une lettre à sa cousine Marthe Pelou, le 19 juillet 1915. Écrit recueillît dans « Paroles de Poilus » de Jean-Pierre Guéno.

(Dessin réalisé sur IPhone)

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